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Il faut avoir observé le paysan russe devant un tribunal pour bien apprécier sa position; il faut avoir vu de ses propres yeux son œil morne et consterné, le profond silence de sa bouche, l'expression scrutatrice de son regard, pour comprendre que c'est là un priso

Le peuple parle un russe un peu ancien; le greffier, le juge écrivent la langue moderne bureaucratique, dépravée et à peine compréhensible. Ils remplissent des in-folios de fautes grammaticales, et les débitent, le plus vite possible au paysan; c'est son affaire à lui de comprendre ce grondement nasillard, sans accentuation, et d'aviser à son salut. Il le sait, aussi se tient-il sur ses gardes; il ne dira jamais un seul mot de trop, rien ne transpire à travers son agitation, il reste là, l'air hébété, comme un nigaud, comme un muet.

Le paysan sort du tribunal aussi triste lorsqu'il est acquitté qu'après sa condamnation. Il ne voit dans les deux cas que l'arbitraire ou le hasard.

C'est ainsi que cité comme témoin à charge, il est parvenu à mentir sous serment, à nier tout, à nier toujours, même lorsque les preuves sont irrécusables. Aux yeux du peuple russe, un homme condamné n'est pas pour cela flétri. Les déportés, les forçats se nomment dans la langue du peuple les malheureux.

Le peuple russe n'a vécu que de la vie communale; il ne comprend ses droits et ses devoirs que par rapport aux communes et à leurs membres. Hors d'elles, il ne reco

Il est un fait incontestable pour tout homme qui a observé de près le peuple russe. Entre eux, les paysans se trompent rarement; ils manifestent les uns pour les autres une confiance presque illimitée, ils ne co

Les questions d'arpentage sont nécessairement très compliquées, grâce à l'éternel partage des terres d'après le nombre d'ouvriers[58], et pourtant la campagne russe ne retentit jamais ni de plaintes ni de procès. Le seigneur, le gouvernement ne demandent qu'à intervenir; l'occasion, les motifs leur manquent. Les petits différends qui surgissent sont promptement terminés par les anciens ou par la commune; tout le monde se soumet franchement à leur décision. La même chose a lieu dans les communes. mobiles des associations ouvrières (artèl). Il existe des associations, maçons, des charpentiers et autres, formées de plusieurs cen-ines d'individus appartenant à des communes différentes, qui groupent pour un temps do

Les liens entre les paysans d'une même commune se resserrent davantage quand la population se compose non pas d'orthodoxes mais de sectaires. Le gouvernement exécute parfois une sauvage irruption dans quelque commune sectaire; il empriso

Ce caractère du Russe rend les enquêtes policières extrêmement difficiles. Je l'en félicite de tout mon cœur. Le paysan russe n'a d'autre moralité que celle qui découle instinctivement, naturellement de son communisme; elle est profondément nationale; le peu qu'il co

La commune a sauvé l'homme du peuple de la barbarie mongole et du tzarisme civilisateur, des seigneurs vernis à l'europée

Pour la Russie c'est là un fait providentiel.

L'autocratie russe entre dans une nouvelle phase. Issue d'une révolution antinationale, elle a rempli sa mission; elle a réalisé empire colossal, un armée nombreuse, une centralisation administrative. Dénuée de principes, de traditions, elle n’a plus rien á faire: elle s’est do





Ce rôle, elle l'a abdiqué aujourd'hui.

Le gouvernement qui avait rompu avec le peuple au nom de la civilisation, se hâta, un siècle après, de rompre avec la civilisation au nom de l'absolutisme.

Il le fit aussitôt qu'il entrevit à travers les tendances civilisatrices, le spectre tricolore du libéralisme: il essaya alors de revenir vers la nationalité, vers le peuple. C'était impossible; le peuple et le gouvernement n'avaient plus entre eux rien de commun; le premier s'était déshabitué de l'autre, tandis que ce dernier croyait voir surgir du fond des masses un spectre beaucoup plus terrible, le spectre rouge. Tout bien pesé, le libéralisme était encore moins dangereux qu'un autre Pougatcheff. La panique et le dégoût des idées libérales devinrent tels, que le gouvernement ne pouvait plus se réconcilier avec la civilisation.

Dès lors le tzarisme n'a pour but que le tzarisme; il gouverne pour gouverner; ce sont là des forces immences qui s'entre-sou-tie

Faire de l'autocratie pour de l'autocratie, c'est impossible à la longue; c'est par trop absurde et trop stérile.

L'on s'en aperçoit, et l'on cherche de l'occupation en Europe. La diplomatie russe est la plus active; partout elle envoie des notes, des agents, des conseils, des menaces, des promesses, des espions. L'empereur se considère comme tuteur naturel des princes allemands; il se mêle aux moindres intrigues de leur petites cours; с'est lui qui règle les différends, morigène les uns, do

Malheureusement, il n'y a rien de commun entre la monarchy féodale avec son principe prononcé, son passé, son idée sociale et religieuse, et le despotisme napoléonien de Pétersbourg, qUj n'a pour lui qu'une triste nécessité historique, une utilité passagère, et aucun principe.

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Et non d'après le nombre d'enfants

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Les paysans d'une commune qui appartient au prince Kozloffski, achetèrent leur affranchissement en payant une somme convenue au propriétaire. Le sol a été partagé entre les paysans en raison de la somme pour laquelle chacun a contribué au rachat de sa liberté. Cet arrangement semblait aussi juste que naturel. Cependant les paysans le trouvèrent si incommode et si peu conforme à leur habitude, qu'ils résolurent de répartir entre eux le montant de la somme de rachat, comme une simple dette de la commune et de procéder au partage du terrain d'après le système généralement adopté. C'est Haxthausen qui raconte ce fait dans ses Etudes sur la vie populaire en Russie. L'auteur lui-même a visité la commune en question. – M. Tégoborsky, membre du conseil d'Etat en Russie, dans un ouvrage dédié à l'empereur Nicolas, publié récemment à Paris, dit que le système du partage des terres lui paraît être défavorable à la culture (toujours de l'agriculture pour l'agriculture), mais, il ajoute: «Ce sont des inconvénients auxquels il est très difficile de remédier, car ce système de partage se rattache à l'organisation de nos communes, à laquelle il serait dangereux de toucher: il repose sur l'idée fondamentale de l'unité de la commune et de l'égalité des droits qu'a chacun de ses membres à une part proportio

«Ce qui est remarquable c'est le bon sens et la pratique avec lesquels nos paysans modifienteux-mêmes, selon les circonstances locales, les inconvénients de ce système; c'est la facilité avec laquelle ils s'arrangent entre eux pour compenser les inégalités résultant de la qualité du sol, et la confiance avec laquelle chacun se soumet aux décisions des anciens de la commune. – On devrait croire que ces sortes de répartitions de terrains, souvent renouvelées, do

(Etudes sur les forces productives de la Russie, par M. Tégoborski, tome premier, page 142 et page 331.)