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Il entendit des pas et se retourna. Ari venait vers lui, vêtue d’une robe imprimée aux motifs géométriques qui scintillaient sous les lumières ; une tenue qui n’eût pas été de circonstance pour un rendez-vous d’affaires. Il la regarda et son cœur se mit à marteler sa poitrine. Et il fut pris de panique en prenant conscience que cette femme était bien réelle, qu’il ignorait tout de sa situation, et qu’il n’existait pour lui aucune échappatoire.

— Tu apprécies ma collection ?

Elle désigna la toile devant laquelle il s’était trouvé à son arrivée.

— Elle a été peinte par mon oncle. Un véritable artiste.

— Un vrai maître.

Il resta un instant décontenancé. Il ne s’était pas attendu à ce qu’Ari débutât leur entretien en évoquant des souvenirs.

— En bien des domaines. Tu ne l’as pas co

— Avant ma naissance.

— Bon sang, je finis par m’y perdre.

Elle glissa son bras sous le sien pour le guider vers le tableau suivant.

— Celui-ci est inestimable. Fausberg, un artiste naïf mais une des rares représentations d’Alpha Cent. Plus aucun humain ne s’y rend, désormais. J’adore cette toile.

— Elle est en effet très belle.

Il s’en dégageait une étrange sensation d’éternité et d’antiquité. Justin avait conscience d’avoir devant lui une œuvre originale, peinte par un artiste qui s’était rendu là-bas, jusqu’à cette étoile que l’humanité avait depuis perdue.

— À une époque, nul ne soupço

— Corot ?

— Voyons, mon enfant. Des arbres. Des arbres au feuillage vert. As-tu vu des bandes terrie

— Un grand nombre.

Il oublia un instant son anxiété pour se rappeler des paysages plus étranges encore que ceux non terraformés de Cyteen.

— Eh bien, voilà ce que peignait Corot. Entre autres choses. Il faut que je te prête quelques bandes. Tout de suite, pendant que j’y pensec Catlin, peux-tu me trouver cette série sur Les Origines de l’Art humain ?

— Oui, sera. Je vais les demander à l’ord.

— Parmi tant d’autresc Celui-ci, jeune homme, est un des nôtres. Shevchenki. Nous avons son fichier. Il est mort d’une pa

Le rouge des falaises et le bleu des lainebois étaient trop banals pour susciter l’intérêt de Justin. Ilaurait pu en faire autant. Mais les règles de politesse les plus élémentaires l’empêchèrent d’exprimer cette pensée à haute voix. Il dessinait. Il lui était même arrivé de peindre, à l’époque où il se sentait contaminé par l’inspiration des artistes-explorateurs. Cloué au sol, il avait imaginé des étoiles et des mondes étrangers, faute de pouvoir espérer quitter un jour Reseune.

Jusqu’au moment où Jordan avait paru en avoir la possibilité.

Florian vint présenter une boisson à Ari, un breuvage doré dans un verre en cristal taillé.

— Vodka-orange, dit-elle. As-tu déjà goûté de l’orange ?

— Synthétique ?

Tous l’avaient fait.

— Non, le jus du fruit véritable. Tiens. Bois une gorgée.





Il y trempa les lèvres et découvrit une saveur étrange, douce-amère et indéfinissable, sous celle de l’alcool. Un goût de Vieille Terre, si elle disait vrai. Et celle qui possédait de tels chefs-d’œuvre ne se serait pas abaissée à mentir en ce domaine.

— C’est bon, dit-il.

— Bon ? C’est un délice ! L’AG va essayer d’acclimater ces arbres fruitiers. Nous pensons leur avoir trouvé un sitec et il ne sera même pas nécessaire de les modifier, car le sol devrait leur convenir. Le fruit est orange vif. Comme son nom l’indique. Il contient plein de bo

Elle lui serra le bras avec plus de force et le guida vers les marches, qu’ils descendirent jusqu’au divan.

— Qu’as-tu dit à Jordan ?

— Que Grant est parti et qu’il n’a pas à s’inquiéter.

Il s’assit, but une gorgée de vodka-orange, puis posa le verre sur la tablette de cuivre placée derrière le siège. Il avait repris le contrôle de ses nerfs autant qu’il jugeait possible d’y parvenir en ce lieu, et en cette compagnie.

— Je ne lui ai rien dit d’autre. J’estime que ce sont mes affaires.

— Est-ce vraiment le cas ?

Elle s’installa à son côté, ce qui eut pour effet de tendre son estomac et de le mettre mal à l’aise. Elle posa la main sur sa cuisse et se pencha vers lui, alors qu’il pensait au jeune azi et à ceux qu’elle avait éliminés sans raison, ces malheureux qui ne savaient même pas qu’ils allaient mourirc seulement qu’ils devaient se présenter à un examen médical.

— Rapproche-toi, mon chéri. Tout va bien. C’est agréable, pas vrai ? Tu ne devrais pas être aussi tendu, aussi nerveux.

Elle glissa un bras entre le dossier du siège et ses côtes, pour lui masser le dos.

— Là, décontracte-toi. Ça fait du bien, pas vrai ? Tourne-toi, et laisse-moi faire.

Comme le jour où elle l’avait pris au piège dans le labo. Il chercha une repartie, mais échoua. Il reprit le verre et but une gorgée, puis une autre, sans lui obéir pour autant. La main de la femme poursuivait ses mouvements.

— Tu es si tendu. C’est pourtant très simple, perso

— Bo

Ses mains commençaient à trembler et les extrémités de ses doigts devenaient aussi froides que de la glace. Il vida son verre, sans la regarder.

Je pourrais la tuer,se dit-il sans éprouver de colère. Lui briser le cou avant que ses azis n’aient le temps d’intervenir. Que feraient-ils ensuite ?

Un psychosondage révélerait les agissements de cette femme. Autant pour sa réputation.

C’est peut-être le meilleur moyen de me tirer de ce mauvais pas.

— Justin a terminé son verre, Florian. Apporte-lui-en un autrec Allons, mon cœur. Détends-toi. Tu ne peux pas faire une chose pareille, tu le sais aussi bien que moi. Désires-tu en obtenir la confirmation ? Est-ce ce que tu veux ?

— Ce que je veux, c’est une autre vodka-orange, marmo

Tout lui paraissait irréel, cauchemardesque. Dans un instant elle s’adresserait à lui comme elle l’avait fait lors de ses interrogatoires. Il était pris dans un piège et ne savait pas comment s’en libérer. Il décida de boire, de s’enivrer au point d’en être malade et impuissant, ce qui la contraindrait à renoncer à ses projets.

— Tu m’as déclaré n’avoir eu aucune expérience sexuelle, celles procurées par les bandes exceptées, fit-elle. Est-ce bien la vérité ?

Il sedétourna sans répondre pour découvrir si Florian lui apporterait bientôt un verre et chercher un moyen d’orienter la conversation vers un autre sujet.

— Penses-tu être normal ?

Il s’abstint à nouveau de répondre. Il étudiait le dos de l’azi qui versait et mélangeait les ingrédients, pendant que les doigts d’Ari pétrissaient son dos et que les coussins s’affaissaient sous le poids de la femme. Elle s’était collée contre lui pour faire glisser sa main le long de son flanc.

Florian lui tendit la vodka-orange, qu’il but en restant accoudé au dossier du divan. Ari continuait de le masser, avec lenteur et douceur.