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            Romuald tourna son regard vide vers la baie vitrée et plongea dans un étrange mutisme.

            Emma le secoua par l’épaule.

            – Oh, tête de lard ! Tu m’expliques ?

            Il poussa un long soupir et se frotta les yeux. Il aurait préféré être ailleurs, même si une partie de lui-même avait envie de se délester de son secret.

            – Il y a trois ans, commença-t-il, en fouillant dans les affaires de ma mère, j’ai découvert que j’avais été adopté à la naissance.

            Emma marqua un mouvement de surprise.

            – Tes parents ne te l’avaient jamais dit ?

            – Non, mais je l’avais deviné.

            – Comment ?

            – Des petites choses, des réflexions, des remarques, des silences qui m’ont mis la puce à l’oreille…

            Emma se doutait de ce qui avait suivi.

            – Tu as essayé de retrouver tes parents biologiques ?

            – Ça m’a pris deux ans. Je me suis d’abord débrouillé pour dérober le dossier à la maternité d’Auxerre, mais, comme je le craignais, il ne mentio

            – Bon, et que s’est-il passé ?

            – Rien, justement. Je suis parvenu à me faire embaucher. Je la croisais tous les matins au bureau, mais elle ne levait jamais la tête vers moi.

            – C’est normal. Comment voulais-tu que…

            – Au bout de quinze jours, j’ai décidé de lui avouer la vérité. J’ai repéré son adresse en accédant aux fiches de paie du restaurant. J’ai attendu le week-end et j’ai acheté un billet de train pour Scarsdale. Je suis arrivé un peu après onze heures. J’ai dû marcher une bo

            – Et ensuite ?

            – Ensuite, je lui ai dit…

            *

            – Bonjour, madame Berkovic.

            – Bon… bonjour, qui êtes-vous ?

            – Je suis Romuald Leblanc. Je travaille au service presse et communication de l’Imperator. C’est vous qui m’avez engagé.

            – Ah oui, je me souviens, le stagiaire français. Qu’est-ce que vous voulez ?

            Elle avait laissé la porte ouverte. Dans l’entrebâillement, j’apercevais un salon confortable, un sapin de Noël. J’entendais de la musique, des exclamations joyeuses d’enfants. Je sentais l’odeur d’un bon plat en train de mijoter.

            Pendant près d’une minute, je n’ai pas cessé de la regarder dans les yeux. Jusqu’au dernier moment, j’étais persuadé qu’elle me reco

            Mais rien. Elle était devant un étranger. Un importun.

            – Bon, ça suffit maintenant, s’énerva Michele Berkovic. Vous n’allez pas rester planté là avec votre air niais. Partez, ou je demande à mon mari d’appeler la police.

            J’ai hoché la tête. J’ai hésité et je lui ai dit :





            – Je suis votre fils.

            D’abord, ses traits se sont figés, puis son visage s’est décomposé.

            – Qu’est-ce que tu racontes ? s’alarma-t-elle.

            Elle a fermé la porte derrière elle, puis a fait quelques pas pour m’inciter à la suivre dans le jardin.

            – Écoute, je ne sais pas qui t’a raconté ces sornettes, mais ce n’est pas vrai.

            J’ai fouillé dans ma poche et je lui ai tendu les documents que j’avais eu tant de mal à rassembler, dont le dossier d’adoption de l’Aide à l’enfance qui mentio

            Elle a parcouru le papier et j’ai vu apparaître de la panique dans ses yeux. Elle ne cessait de se retourner de crainte que son mari ou un de ses enfants ne vie

            Elle m’a rendu le document et elle m’a raccompagné jusqu’à la rue. Elle m’a expliqué que cette naissance n’était qu’une « erreur de jeunesse ». Elle n’avait que dix-huit ans et elle ne s’était pas aperçue tout de suite qu’elle était enceinte. Apparemment, elle avait pris ses précautions, mais…

            *

            – Je présume que tu lui as demandé qui était ton père.

            – Elle ne le savait même pas elle-même. « Un type d’un soir », a-t-elle prétendu, un militaire rencontré dans un bar à Besançon. À l’époque, elle était seule, mais elle avait de l’ambition : elle voulait à tout prix quitter l’est de la France et partir étudier aux États-Unis. Et il était exclu de s’encombrer d’un enfant…

            – Elle t’a posé des questions sur toi ?

            – Aucune. J’ai bien compris qu’elle voulait en savoir le moins possible. Elle m’a expliqué que ni son mari ni ses enfants n’étaient au courant de cette période de sa vie et qu’il était très important qu’ils ne sachent jamais rien, car c’était le type de révélation qui pouvait briser une famille. Puis elle s’est éclipsée un court moment. Lorsqu’elle est revenue, elle tenait dans ses mains un carnet de chèques. Elle m’a demandé de ne pas revenir travailler au restaurant le lendemain et elle m’a fait un chèque de 5 000 dollars. Elle me l’a tendu comme si on était quittes et m’a ordo

            – Je suis désolée que ça se soit passé comme ça, Romuald. Mais tu dois essayer d’y trouver des points positifs. Tes vrais parents, ce sont ceux qui t’ont élevé, tu le sais très bien. Et au moins, à présent, tu sais qui sont tes parents biologiques. Tu peux aller de l’avant et…

            La so

            Romuald regarda l’écran et décida d’y répondre. C’était Jarod.

            Il décrocha, échangea quelques mots avec l’informaticien et écarquilla les yeux.

            – Il faut qu’on rentre à l’hôtel le plus vite possible, dit-il en enfilant sa parka.

            – Qu’est-ce qui se passe ?

            – Je sais comment Kate s’est procuré les 500 000 dollars.

 21

            A girl on the run

            On transforme sa main en la mettant dans une autre.

            Paul ELUARD

            Boston

            24 décembre 2010

            9 h 43

            – Ne touchez pas à cet ordinateur !