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Sur le quai, la foule poussait des vivats, enthousiasmée, folle d’émotion.

Enfin, après un instant qui sembla éternel, car une terrible anxiété serrait les cœurs, la chaloupe s’éloigna.

On suivit sa course vers le navire, le British Queen, qui, au lointain, dressait sa silhouette désolée…

Bientôt, ce ne fut plus qu’une petite tache noire. À peine, dans les lorgnettes avidement braquées, pouvait-on distinguer, debout à l’avant de l’embarcation, le point blanc que constituait ce médecin si extraordinairement audacieux.

***

Quels étaient les sentiments de cet homme, qui, de la sorte, risquait la mort dans le seul but d’aider à l’infortune de ses semblables ?

Ah ! certes, on aurait été éto

Tout le temps que la chaloupe fendait les flots, s’approchait du British Queen, il gardait un aspect impassible, une attitude indifférente et pourtant, sous les bandages qui enserraient son front, voilaient sa face entière, son regard avait d’étranges flamboiements.

Le médecin pensait :

— Vit-il encore ? Vais-je le trouver à bord ? Car il est bien de taille à s’être échappé. Juve. Juve. Êtes-vous mort ?

Car cet homme, ce médecin dont l’héroïsme incroyable venait d’être acclamé par la population entière, celui-là qui, dédaignant la peste, n’avait pas craint de visiter cet enfer de désolation qu’était le British Queen, c’était Fantômas. Fantômas qui n’avait pas reculé devant cet abominable forfait : créer cette épidémie pour maintenir Juve priso

***

La chaloupe passa rapidement entre les rangs des bateaux qui, à bo

Elle précipitait sa course, eût-on cru, elle atteignait bientôt le navire maudit.

Les matelots épouvantés de se trouver si près du terrible foyer de l’épidémie, hâtaient la manœuvre. La chaloupe accosta à l’escalier de la coupée et celui que tous prenaient pour un médecin débarqua rapidement. Plus rapidement encore, on posa auprès de lui les trois caisses de sérum.

— Dans un quart d’heure, docteur, nous serons là, criait le patron de l’embarcation…

Puis la chaloupe s’éloigna à toute vapeur.

Le British Queensemblait une épave abando

— Hélas, songeait Fantômas, combien vivent encore de ceux que les lois impitoyables, mais justes ont empêché de débarquer ?

Car, dans son extraordinaire aveuglement, le bandit oubliait presque qu’il était la cause de toute cette horreur dont il s’effrayait.

Fantômas fit lentement le tour du bateau pestiféré…

Rien. Perso

— Mon Dieu, songea le bandit, va-t-il donc falloir que j’explore tout le bâtiment ? Ce matin, ils ont fait des signaux. Donc, il reste des gens en vie. Donc, je dois pouvoir les retrouver. Et puis, où est Juve ? C’est Juve que je veux.

Les minutes passaient. Fantômas, se souvenant soudain qu’il ne pouvait espérer rester plus d’un quart d’heure dans l’infernal bâtiment, sous peine d’être contraint à y demeurer, se sentit frémir.

Il appela :

— Juve. Juve.

Mais l’écho seul répondit.

Frisso

— Si Juve vit, il doit être là. S’il est mort, c’est là qu’il a dû mourir.

Fantômas, par l’étroit escalier, pénétra dans le steamer… Il s’éto

Où étaient-ils donc ?

Pourquoi se cachaient-ils ?

Ils savaient bien, cependant, que celui qui venait d’arriver était un médecin.

Ils auraient dû se précipiter au-devant de lui pour réclamer ses soins, se partager le sérum antipesteux…





Fantômas, lentement, précautio

Il était maintenant dans l’un des étroits couloirs qui séparaient les cabines.

Il lui semblait, à chaque aspiration, que la mort entrait en lui. Il lui semblait surtout que partout il allait rencontrer un piège qui l’immobiliserait, qui l’empêcherait de regagner le pont, l’air libre, de réembarquer sur la chaloupe. Et, pour la première fois de sa vie, Fantômas avait peur.

De temps à autre, pourtant, d’une main tremblante, il entrebâillait la porte d’une cabine. Mais partout, dans tous les salons, des cadavres.

Et saisi de stupeur, il avançait criant toujours :

— Juve, Juve.

Mais, soudain, il s’immobilisa…

Devant lui, marchant à sa rencontre, deux hommes s’avançaient…

L’un d’eux, entièrement vêtu de noir, était méco

Il portait des vêtements flottants ; sa tête, dissimulée sous des bandeaux noirs, ne pouvait être vue.

Près de lui, au contraire, se trouvait un homme que Fantômas reco

Oui ! c’était Juve ! Juve lui-même ! Juve ou son fantôme… Car Juve avait une face livide, tourmentée, effrayante à voir…

Fantômas, après s’être arrêté, instinctivement, constatait que ceux qui venaient au-devant de lui s’étaient eux-mêmes arrêtés. Sans doute étaient-ils aussi surpris de le voir, qu’il avait été effaré de leur apparition ?…

Le bandit, pourtant, bientôt, se précipita…

Dans la terreur folle qui, petit à petit, avait envahi son cerveau, il éprouvait le besoin de rencontrer des êtres vivants, de parler, d’entendre des voix humaines…

— Juve ! Juve ! hurla-t-il encore…

Mais comme il s’élançait en avant, vers les deux hommes, voilà que ses mains qu’il tendait vers eux se heurtaient à une cloison qui lui barrait le passage et qu’à la même minute, brutalement, par derrière, il se sentait saisir aux épaules.

Un genou s’appuyait sur son dos…

Deux mains nerveuses s’accrochaient à ses bras.

Un croc en jambes lui faisait perdre l’équilibre…

Fantômas tomba !

Fantômas, en une seconde, sentit qu’on empriso

— Au secours, cria-t-il, ne sachant même plus s’il n’était point victime d’une effroyable hallucination…

Il dut vite comprendre, au contraire, que tout ce qui lui arrivait était réel, bien réel.

C’était la voix railleuse de Juve, en effet, qui lui répondait :

— À votre tour, Fantômas, d’être le priso

« C’est mon tour de triompher ! Mon cher docteur, vous resterez ici. C’est moi, moi seul, qui repartirai tout à l’heure dans la chaloupe, moi qui, vêtu de la blouse comme vous, masqué comme vous, car je vais troquer mes vêtements contre les vôtres, passerai le plus aisément du monde pour vous.

Fantômas ne répondit rien.

Telle était l’énergie de cet homme que maintenant qu’il se trouvait en face d’un danger co

Et, se taisant, Fantômas réfléchissait…

Peu lui importaient les paroles de Juve.