Добавить в цитаты Настройки чтения

Страница 74 из 93

— Vous en parlez comme s’il s’agissait d’une sorte de duel. Savez-vous seulement que dans le Palazzo où vous serez conduite existe un mystère, une partie cachée, souterraine semble-t-il, où vit un être tout-puissant, servi par d’autres êtres et qui effraie même les domestiques, cependant durs à cuire de Ricci ? C’est ça que vous voulez affronter seule ?

Il vit vaciller son regard que traversa une fugitive angoisse qu’elle chassa vite avec un mouvement d’épaules.

— Qui vous dit que je serai seule ? Et vous-même avez-vous un plan ?

— Je pense…

— En ce cas, pourquoi n’envisagerions-nous pas…

— Ah, vous étiez là ! Je vous cherchais.

La forme sans grâce d’Aloysius venait de se matérialiser devant eux avec dans les yeux une foule d’interrogations qu’il n’osait pas formuler. Morosini se leva :

— Miss Forsythe souhaitait prendre l’air… et puis nous évoquions le British Museum, ajouta-t-il mi-narquois mi-sérieux. J’espère que vous n’y voyez pas d’inconvénients ?

— Non mais je n’aime pas être loin d’elle trop longtemps ! Vous auriez pu évoquer vos souvenirs en ma présence et celle de mes amis ?

— Je ne vous co

— Au contraire je préférerais qu’elle m’en confie davantage. Nous pourrions peut-être partager ensemble le souper qui va venir.

— Désolé mais je suis déjà retenu ! Merci pour ces quelques instants Miss Mary ! Ils ont été fort agréables…

— Pourquoi ne pas les renouveler, dit Ricci… au Palazzo par exemple quand elle y sera installée après notre mariage ?… Ou avant si vous acceptiez l’invitation que je vous avais adressée au Ritz ?

Cette fois ce fut Pauline qui évita à Aldo de répondre. Elle aussi le cherchait pour le compte de lady Ribblesdale.

— Elle vous réclame à cor et à cri. Vous la co

— Oh oui ! fit Aldo en levant les yeux au ciel.

En suivant la baro

— Est-ce possible ! Cette chère Mary ici ! Quelle merveilleuse rencontre !

Aldo ne put résister à l’envie de se retourner. Si Hilary jouait parfaitement le jeu en montrant un enthousiasme convenable, la tête de Ricci était à peindre : un taureau grincheux prêt à charger mais ligoté par un reste de conscience de l’endroit où il se trouvait. Il devait commencer à trouver excessif le nombre de vieux amis de sa Mary !

Le moment de distraction prit fin rapidement : Ava Ribblesdale arrivait sur lui avec des frémissements de houlette et clamait :

— Que faites-vous donc avec ces gens-là, mon petit prince ? Il faut être aussi négligent que les Belmont pour les laisser traîner chez eux !

Sans souci de l’équilibre fragile de l’échafaudage capillaire qui lui mettait la tête à mi-chemin des pieds, Aldo empoigna la dame par le bras pour l’entraîner vers le premier buffet venu :

— Pour l’amour du Ciel, lady Ava, mettez une sourdine ! Vous me démolissez mon ouvrage…

— Comment ça votre ouvrage ?

Un laquais emperruqué passait à sa portée avec un plateau de champagne, il saisit deux coupes et en fourra une dans la main d’Ava :





— C’est cet homme qui possède les joyaux dont je vous ai parlé et vous voulez le chasser ?

— Ah, mon Dieu ! Vous êtes sûr ?

— Pas depuis longtemps mais cela ne fait aucun doute.

— C’est lui qui possède la croix et les pendants ?

— Vous devriez le savoir puisque ses deux mariages précédents ont eu lieu à Newport et que, pour le premier, la fiancée les portait…

— Je ne suis pas en permanence ici. Et même pas souvent heureusement ! Ce n’est pas mal pendant la Season – bien que ce ne soit plus ce que c’était avec tous ces touristes qui nous envahissent ! – mais je préfère de beaucoup l’Europe ou surtout New York… Elle prit soudain un ton rêveur pour ajouter : « Ici, il n’y a pas de quartier chinois. C’est l’endroit du monde où je m’amuse le mieux ! »

— Vous allez là-dedans ? fit Aldo visité par un désagréable souvenir celui de la ravissante Mary Saint-Alban passio

— Pourquoi m’en priverais-je ? J’y vais jouer aux échecs avec un vrai mandarin. C’est formidable et j’adore le voir balayer l’échiquier d’un geste furieux quand je le bats ! Ici il n’y a pas d’adversaires à ma taille.

— Vraiment ? J’aimerais jouer avec vous.

— Voilà une bo

— Je n’ai pas encore arrêté de stratégie. On verra après le mariage.

— Si c’est à une offre d’achat que vous pensez, vous devriez la faire maintenant : après le mari sera envolé à l’autre bout du pays et la femme en route pour le cimetière ! C’est d’ailleurs assez excitant cette histoire !

— Ah vous trouvez ?

« Marie-Antoinette » lui offrit l’un de ces sourires pour lesquels tant d’hommes s’étaient damnés et qui, malgré les a

— À quoi pensez-vous, voyons ? Perso

Au point où Aldo en était, se dérober eût été maladroit, il se résigna donc et subit sa compagne le reste de la soirée qui fut parfaite en tous points. Servis par tables de six sur des brocarts blancs tissés d’argent autour de candélabres anciens chargés de hautes bougies, caviar, clams, langoustes et foies gras accompagnés de champagne – John-Augustus avait défendu farouchement les crus millésimés de sa cave en cas d’une hypothétique encore qu’improbable descente de police ! – la fête fut une réussite absolue de même que le feu d’artifice tiré depuis des pontons amarrés sur la baie. Après quoi on dansa encore et l’aube se levait quand, une à une, les limousines s’égrenèrent dans le vent frais du matin emportant des fantômes plus ou moins réussis d’un monde qui n’existait plus… Quelques-uns tellement ivres qu’il avait fallu les ramasser un peu partout pour les installer sur les coussins de leurs voitures. Et tandis que Cynthia recevait les compliments – largement mérités ! – de ceux qui logeaient au château, John-Augustus dépouilla Paul Jones, révélant un maillot de bain rayé noir et blanc qui lui do

— Vous devriez en faire autant, lança-t-il au retour, à Pauline, Aldo et Adalbert réunis dans la bibliothèque autour d’une cafetière. Ça réveille !

— Ça aussi ! riposta sa sœur. Et au moins ça réchauffe ! Vous auriez intérêt à essayer ! Vous êtes bleu pâle…

— Plus tard ! Pour l’instant je vais dormir ! fit Belmont en parfaite contradiction avec lui-même avant de galoper vers l’escalier monumental suivi immédiatement par Adalbert qui avait réussi l’exploit de passer toute la soirée avec Ricci et les Schwob en leur délivrant une conférence magistrale – et interminable mais apparemment passio

Resté seul avec Pauline qui ne disait plus rien et semblait lasse, Aldo lui conseilla gentiment d’aller se reposer elle aussi mais elle lui répondit par une question :

— Étes-vous satisfait de cette soirée ?

— Oui et non. J’ai essayé d’avertir Miss Forsythe du danger qu’elle courra en épousant Ricci mais elle semble en être entièrement consciente et m’a déclaré avoir pris des précautions…

— Lesquelles ?

— Je ne sais pas. Ricci ne m’a pas laissé lui parler très longtemps et je ne lui ai pas dit tout ce que je savais. Peut-être Adalbert aura-t-il mieux réussi que moi ? C’est ce que je souhaite.