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— Pourquoi donc poser une question dont tu co

Il n'avait pas insisté. D'autre part, le jeune homme désirait faire halte chez un de ses cousins, au château de Ventadour, où sa mère, qui appartenait à cette puissante famille limousine, avait vu le jour. Il dépeignait Ventadour comme une terrible forteresse, un refuge puissant où l'on saurait des nouvelles sûres des événements et d'où l'on pourrait repartir pour Montsalvy avec une aide accrue. Le vicomte Jean était riche, puissant et de bon conseil. De son côté, Catherine s'était mise à désirer cette halte de toutes ses forces déclinantes. Le dur voyage agissait sur elle de plus en plus cruellement. Elle maigrissait à vue d'œil et les longues heures de chevauchée étaient devenues une torture pour son corps épuisé. Des douleurs la traversaient parfois, brutales comme un coup de lance, et d'atroces courbatures nouaient ses membres et son dos quand elle mettait pied à terre. De plus, elle en arrivait à ne plus tolérer la nourriture, parcimonieuse, et surtout composée de gibier, qu'on lui offrait.

À mesure que son visage s'amenuisait, Arnaud s'assombrissait. Il se reprochait de l'avoir emmenée et de lui avoir imposé cet interminable calvaire. Il laissait maintenant Gauthier marcher en tête, se fiant à l'instinct quasi animal du forestier pour flairer les dangers possibles, et chevauchait tout près de Catherine. Souvent, quand il la voyait trembler de froid, il l'enlevait du dos de Morgane et l'installait devant lui, sur son cheval, pour mettre entre la bise et la jeune femme transie le rempart de sa poitrine, de ses bras et du grand manteau noir dont il rejetait un pan sur elle. Malgré sa faiblesse et son état maladif, Catherine aimait aller ainsi, contre lui. Elle aimait la délicieuse impression de sécurité qu'il savait lui do

Quand, à la fin d'un jour pluvieux, Catherine découvrit enfin Ventadour, elle soupira de soulagement tandis qu'Arnaud, joyeusement, lui disait :

— Regarde, ma mie, voici le château du vicomte Jean ! Là tu auras repos, réconfort et sécurité. Si tu n'es pas en sûreté ici, tu n'y seras nulle part.

C'était, en effet, impressio

— On dit, poursuivit Arnaud en riant, que toute la paille du royaume de France ne suffirait pas à emplir les fossés de Ventadour !

« Étranges fossés, en effet », songea Catherine, que cette saignée entre deux montagnes d'où la forteresse jaillissait comme des entrailles mêmes de la terre. Le sentier qui, du milieu d'un minuscule village poussé n'importe comment sur un épaulement rocheux, escaladait la butte formidable, serpentait à flanc de rocher jusqu'à un massif portail, haut comme une entrée de ville, qui commandait l'entrée du château. La petite troupe fatiguée s'y engagea. Envahi d'une joie soudaine, Arnaud, berçant Catherine contre lui, se mit à chanter à pleine voix :

J'ai le cœur si plein d'amour, de joie et de douceur Que la glace me paraît fleur et la neige verdure...

Elle lui sourit tendrement, appuyant sa tempe contre la joue chaude.

— La chanson est belle... Et je ne savais pas que tu aimais les chansons.

— Je suis aussi civilisé que Xaintrailles, si c'est cela que tu veux dire, répondit-il en riant. C'est ma mère qui m'a appris cette chanson ! Elle a été composée ici même, voici bien longtemps, par un troubadour qui se nommait Bernard. Il était le fils du meunier et s'était épris de la dame du château. Il a bien failli en mourir, mais il a pu fuir à temps. On dit qu'ensuite une reine l'a aimé.

Chante encore ! pria Catherine. J'aime t'entendre. Docilement, le jeune homme reprit et sa voix joyeuse se répercuta aux quatre horizons.

Quand je vois l'alouette mouvoir de joie ses ailes contre le rayon de soleil...

Mais la chanson s'arrêta net et Arnaud retint son cheval. Là-haut le portail venait de s'ouvrir, livrant passage à une forte troupe de cavaliers qui s'avança rapidement vers les voyageurs. Sourcils froncés, Arnaud les regardait. Son expression tendue inquiéta Catherine.

— Qu'y a-t-il ? Ce sont les hommes du vicomte, je pense, et...

Il ne lui répondit pas, appela sèchement :

— Gauthier !

Le Normand accourut. Sans un mot, Arnaud enleva Catherine dans ses bras et, avant qu'elle fût revenue de sa surprise, la passa dans ceux du géant.





— Vite ! Retourne et emmène aussi Sara. Va les mettre à l'abri !

— Mais, Seigneur...

— Obéis... Vite, sauve-la et, si je meurs, conduis-la à ma mère...

-— Arnaud ! cria Catherine... Non !

— Emmène-la, je te dis ! Je le veux. Ceux qui vie

Sourd aux cris de Catherine, insensible à sa défense désespérée, Gauthier fit volter son cheval, rafla au passage la bride de Sara et emmena les bêtes vers le village. Catherine se tordait le cou pour voir par-dessus l'épaule du géant. Les Gascons s'étaient groupés autour d'Arnaud qui avait mis l'épée à la main et, debout sur ses étriers, regardait venir l'e

Laisse-moi, criait Catherine. Va les aider, ils ne tiendront jamais... La troupe est trop puissante ! Ils sont au moins cinq contre un.

— Votre époux est brave et il sait se battre ! Pour une fois, dame Catherine, souffrez que je lui obéisse, à lui... Vous n'avez que faire dans cette rencontre...

Pour qu'elle ne vît plus rien du combat qui se préparait et aussi pour la mettre hors de vue des routiers, Gauthier plongea soudain à flanc de ravin à travers les arbres et les broussailles, droit vers le lit de la Luzège, le petit torrent qui entourait Ventadour. Mais il ne put empêcher qu'elle n'entendît le choc des armes et les cris sauvages des hommes qui s'encourageaient à la bataille.

— Mon Dieu ! sanglotait Catherine... Ils vont me le tuer... Je t'en supplie, ami, laisse-moi ici... Laisse- moi au moins voir...

Mais Gauthier, les dents serrées, piquait toujours droit vers le fond de la gorge, traînant par la bride Rustaud qui portait Sara plus morte que vive.

— Voir quoi ? gronda-t-il. Le sang qui coule et les hommes qui meurent ? Je vais vous mettre à l'abri i autant que je pourrai, ensuite je remonterai voir ce que jje peux faire. Essayez d'être raiso

Il trouva l'abri plus vite qu'il n'aurait cru, en remontant le lit de la rivière. Il avisa une grotte étroite qui surplombait l'eau écumante. Elle semblait profonde et, après une rapide reco

Gauthier posa Catherine sur la paille et se tourna vers Sara qui descendait à son tour de cheval.

— Allumez du feu et restez près d'elle, je vais revenir.

Il tourna les talons laissant les deux femmes en tête à tête. Sara se frottait les reins en grimaçant.

— Encore un peu et il me do

Mais la diatribe qu'elle apprêtait tourna court quand elle vit la pâleur de Catherine. La jeune femme s'était tapie dans la paille, tout contre le rocher, et le peu de jour qui passait montrait son visage blême où perlait une sueur légère. Il y avait de la peur au fond de ses prunelles et aussi une souffrance qui alerta Sara.