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Elle découvrait, en outre, qu'elle n'avait jamais cru Arnaud vraiment perdu pour elle avant cette minute. On l'avait retranché des vivants, mais, quelque part sous le ciel, il respirait et elle gardait, elle, Catherine, la possibilité d'aller le retrouver une fois sa tâche terminée.

Mais, maintenant, que lui restait-il ? Un vide immense et un goût de cendres sur les lèvres... De temps en temps, Gauthier poussait son cheval auprès du sien, lui parlait pour tenter de l'arracher à cette a

Pourtant, lorsque Catherine rentra dans la cour de Montsalvy, quelque chose se ranima en elle, quelque chose qui ressemblait à une joie. Au seuil de l'hôtellerie, le petit Michel dans les bras, il y avait Sara ! Elle se tenait immobile, le bambin niché contre son cœur, semblable à quelque madone rustique, mais, à mesure que les cavaliers avançaient dans la cour, les yeux aigus de la bohémie

L'amour, presque maternel, qu'elle avait pour Catherine devina sa souffrance, rien que dans sa silhouette accablée. Sans la quitter des yeux, elle tendit Michel à Donatie

Aucun mot ne fut prononcé. Comme Sara arrivait près de sa monture, Catherine se laissa glisser à terre et s'abattit en sanglotant dans les bras qui se tendaient déjà. Comme il lui parut bon, à cet instant de désespoir, le cher refuge momentanément perdu ! Mais si pitoyable était l'aspect de la jeune femme que Sara, à son tour, se mit à pleurer. Etroitement embrassées, mêlant leurs larmes, elles retournèrent vers la maison.

Là, Catherine retrouva un peu le contrôle de ses nerfs et leva sur sa vieille amie une figure de noyée.

— Sara ! Ma bo

— Maudite, toi ? Pauvrette... Qu'est-ce qui a pu te mettre ça dans l'idée ?

Elle est persuadée que messire Arnaud a péri dans l'incendie qui a ravagé la maladrerie de Calves, fit derrière elles la voix grave de Gauthier. Elle ne veut entendre aucune consolation, elle ne veut accepter aucun doute.

— Ouais ! fit Sara toute sa combativité retrouvée à la seule vue de son ancien e

Et, laissant Catherine embrasser son fils avec un emportement qui en disait long sur son cœur débordant, elle entraîna le Normand sous le manteau de la cheminée. En quelques mots Gauthier eut tout dit le retour de Catherine, la maladie de dame Isabelle, l'étrange vision nocturne de la jeune femme, la disparition des deux chevaux et, enfin, le drame de Calves. Sara l'écouta sans l'interrompre, les sourcils froncés, relevant le moindre détail du récit. Quand il eut terminé, elle demeura un moment silencieuse, les bras croisés, le menton dans une main, regardant l'âtre noir de la cheminée où l'on avait accumulé des branchages.

Enfin, elle revint vers Catherine qui, assise sur un tabouret, l'épiait avec angoisse en berçant Michel machinalement.

— Qu'en pensez-vous ? demanda Gauthier.

— Que c'est vous qui avez raison, mon garçon. Le maître n'est pas mort. Ce n'est pas possible.

— Comment aurait-il pu échapper ? fit Catherine.

— Je n'en sais rien. Mais ce n'est pas un fantôme que tu as vu. Les fantômes ne portent pas de masque. Je les co

— Je veux bien te croire, soupira Catherine. Mais alors, dis-moi ce que je dois faire ?

— Attendre quelques jours, comme le disait Gauthier, pour do

— Sinon?

— Nous retournerons à Calves, avec Saturnin et quelques hommes solides. Nous fouillerons les ruines jusqu'à ce que nous ayons une certitude. Mais, pour moi, j'ai déjà cette certitude : il n'y a pas de cadavre à Calves... du moins pas celui que tu crois...

Cette fois, un peu d'espoir revint dans le cœur de Catherine. Si forts étaient les liens qui l'unissaient à Sara qu'elle avait fini par voir en elle, sinon une sorte d'oracle, du moins un esprit qui ne se trompait guère et qui, même, avait parfois d'étranges clairvoyances... Elle ne répondit rien, mais prit la main de sa vieille amie et la posa contre sa joue, humblement, comme une enfant qui veut se faire pardo





— Les moines vont se rendre à la chapelle, dit Sara. Tu devrais, toi aussi, aller prier.

Catherine hocha la tête.

— Je n'en ai plus le désir, Sara. À quoi bon prier ? Dieu ne se souvient de moi que pour me frapper.

— Tu es injuste. Il t'a do

— Mais à quel prix !

— A un prix que tu ignores encore... à moins que tu ne regrettes celui que tu as laissé à Chinon ? ajouta intentio

Elle voulait voir comment réagirait Catherine à ce rappel de l'homme à cause de qui toutes deux s'étaient séparées. Mais elle fut immédiatement rassurée de ce côté-là.

Catherine haussa les épaules avec impatience.

— Qui veux-tu que je regrette quand j'ignore ce qu'il est advenu d'Arnaud ?

Il n'y avait rien à ajouter à cela.

La fièvre qui brûlait Isabelle de Montsalvy semblait s'atténuer. La vieille dame ne délirait plus, elle toussait moins, mais elle s'affaiblissait peu à peu, comme une lampe dont l'huile baisse.

— Nous ne la sauverons pas, disait Sara qui se relayait avec Catherine à son chevet pour permettre à Donatie

— On dirait, remarquait à son tour Catherine, qu'elle n'a plus la force de vivre.

Toute la pharmacopée du couvent, tout le savoir du mire d'Aurillac, qui était revenu la visiter, étaient impuissants à retenir le flux vital dans ce corps épuisé. Tout doucement, Isabelle s'éteignait. Elle demeurait maintenant, durant des heures, étendue dans son lit, les mains jointes sur son chapelet ou sur un livre d'heures qu'elle ne lisait pas, silencieuse et immobile. Seules, les lèvres qui remuaient doucement montraient qu'elle priait.

Un soir, trois jours après le voyage de Catherine et de Gauthier à Calves, la vieille dame souleva ses paupières, regarda Catherine qui se tenait près d'elle, assise sur un escabeau.

— C'est pour vous que je prie, mon enfant, dit-elle doucement, pour Michel... et aussi pour lui, pour mon fils. Ne l'abando

Catherine noua ses doigts et les serra, puis elle toussota pour empêcher sa voix de trembler. Isabelle ne savait rien du drame de Calves qu'on lui avait soigneusement caché, mais comme il était difficile de jouer la comédie, de feindre l'apaisante et nécessaire sérénité quand son âme était ravagée d'angoisse ! Chaque minute des trois jours qui venaient de s'écouler avait été pour Catherine une minute de torture. Confiante en ce que lui avait affirmé Sara, elle attendait le retour de Fortunat, et ce retour ne s'était pas encore produit... Mais elle parvint à sourire, tendrement, au vieux visage anxieux.

Soyez sans crainte, Mère. Jamais je ne m'éloignerai de lui. Je voudrais bâtir pour lui une demeure, non loin d'ici, où il pourrait vivre à l'écart des autres, mais d'une manière meilleure, plus conforme à ses goûts, à son rang... J'ai tant rêvé de l'arracher à cette horrible maladrerie.

Les yeux de la malade s'illuminèrent d'une joie intense. Sa main maigre se tendit pour étreindre celle de Catherine.