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— Mère, pria-t-elle doucement. Mère, écoutez-moi. Regardez-moi. Je suis là... près de vous. C'est moi, votre fille. C'est Catherine...

Catherine.

Quelque chose parut s'animer dans le regard vague et douloureux.

La bouche se ferma puis se rouvrit, souffla :

— Ca... therine.

— Oui, insista la jeune femme. C'est moi... Je suis là.

Les yeux tournèrent dans leur orbite, leur regard parut se fixer, glissa vers la jeune femme qui se penchait en étreignant les doigts desséchés.

— C'est pas la peine, dame Catherine, murmura Donatie

— Mais si. Elle revient. Mère ! Regardez-moi. Vous me reco

Toute sa volonté était tendue, bandée pour tenter d'atteindre la pensée flottante de la malade. Elle souhaitait tellement faire passer ses forces, à elle, dans ce corps exténué qu'elle avait l'impression d'un courant de chaleur unissant leurs mains. Une fois encore, elle supplia

:

Regardez-moi. Je suis Catherine, votre fille, la femme d'Arnaud. Un frisson courut sous la peau sèche d'Isabelle à ce nom. Son regard, net cette fois, se posa sur le visage anxieux de la jeune femme.

— Catherine, fit-elle dans un souffle... Vous êtes revenue ?

— Oui, Mère... je suis revenue. Et je ne vous quitterai plus., plus jamais.

Les yeux sombres de la malade la regardèrent avec une anxiété nuancée de doute.

— Vous... resterez ? Mais... ce jeune homme... Brézé ?

— Il a pris ses rêves pour une réalité. Je ne le reverrai plus. Je suis Catherine de Montsalvy et je le resterai, Mère. Je suis « sa » femme...

Rien que sa femme !

Une intense expression de béatitude et de soulagement détendit les traits de la malade. Sa main, qui s'agrippait à celle de Catherine, se fit molle et souple, un léger sourire entrouvrit ses lèvres.

— Dieu soit béni, soupira-t-elle. Je peux mourir en paix.

Elle ferma les yeux un instant, les rouvrit et regarda Catherine avec tendresse. Elle lui fit signe de se pencher vers elle et, mystérieusement :

— Je l'ai revu, vous savez.

— Qui, ma Mère ?

— Lui, mon fils. Il est venu à moi... Il est toujours aussi beau. Oh oui ! Tellement beau !

Une violente quinte de toux lui coupa la parole brutalement. Son visage s'empourpra, le regard vacilla. La pauvre femme retomba en arrière luttant contre l'étouffement. L'instant de rémission était passé.

Donatie

— Le mire dit qu'il faut lui faire boire, quand elle tousse, une décoction de coquelicot, de mauve et de violette séchés, mais ce n'est pas facile.

Avec l'aide de Catherine, elle parvint tout de même à faire avaler à la malade quelques gouttes du liquide. La toux se fit moins caverneuse. Peu à peu, le corps crispé se détendit, mais les yeux ne se rouvrirent pas.

— Elle va peut-être dormir un peu, chuchota Dona- tie





— Vous êtes exténuée, Donatie

— Bah ! je suis solide, fit la vieille paysa

De la tête, Catherine désigna la malade qui, en effet, semblait s'assoupir.

— Il y a longtemps qu'elle est malade ?

— Plus d'une semaine, gracieuse dame. Elle a voulu aller là-bas...

à Calves, avec Fortunat. Elle n'en pouvait plus d'être séparée de son fils... Quand elle est revenue, elle avait reçu toute la grosse pluie qui est tombée pendant trois jours, sans vouloir s'arrêter. Fortunat n'a pas pu l'obliger à s'abriter. Elle est revenue trempée, transie, claquant des dents. La nuit qui a suivi elle a été prise d'une grande fièvre. Depuis, le mal ne l'a plus quittée.

Sourcils froncés, Catherine avait écouté Donatie

Machinalement Catherine demanda :

— Au fait, où est Fortunat ?

Ce fut Gauthier, qui était demeuré en contemplation auprès de Michel, qui répondit :

— C'est vendredi, aujourd'hui, dame Catherine. Fortunat est parti hier pour Calves, comme il le fait, chaque semaine. Pas une fois, il n'y a manqué et il va toujours à pied, par humilité.

— Avez-vous donc tant de vivres à envoyer là-bas ?

— Non. Parfois, Fortunat n'emporte qu'une petite miche de pain ou un fromage, parfois même rien du tout. Mais il s'assoit sur un tertre d'où l'on voit la maladrerie et il reste là des heures, à regarder... C'est un étrange garçon, mais, je vous l'avoue, dame Catherine, je n'ai jamais rencontré fidélité semblable.

Gênée, quoi qu'elle en eût, Catherine détourna la tête pour dérober la subite rougeur de son front. Certes, le petit écuyer gascon do

— Moi non plus, murmura-t-elle. Qui aurait pensé que ce garçon s'attacherait de la sorte ? Au fait, quand rentre-t-il... de là-bas ?

— Demain dans la journée.

Mais, le lendemain, Fortunat ne revint pas. C'est seulement vers le soir que Catherine s'en aperçut, lorsque l'on se réunit dans la salle commune pour le souper. Tout le jour, elle était demeurée auprès d'Isabelle qui semblait aller un peu mieux. De plus, elle avait eu avec le prieur de l'abbaye, une assez longue conversation. Il était temps, pour elle, de rebâtir le château et elle en avait les moyens. L'Argentier Royal lui avait compté une belle somme en écus d'or et elle possédait toujours ses bijoux, moins peut-être les quelques pierres vendues par elle-même ou par Isabelle pour subsister tous ces derniers temps.

Bernard de Calmont, le jeune abbé de Montsalvy, était un homme énergique et intelligent. Elle lui offrit, en remerciement de la protection accordée aux siens, une superbe plaque de rubis pour agrafer sa chape de cérémonie et commença de faire les premiers projets de reconstruction. L'un des moines de l'abbaye, le Frère Sébastien, fut chargé de dresser des plans, un autre de chercher la carrière d'où l'on tirerait les pierres. Comme toutes les grandes abbayes, Montsalvy offrait un ensemble de tous les corps de métiers, ou peu s'en fallait.

— De toute façon, lui avait dit l'abbé, vous pouvez demeurer ici aussi longtemps que vous le désirerez. La maison des hôtes est suffisamment à l'écart des bâtiments conventuels pour que la présence même prolongée d'une jeune femme ne soit point matière à scandale.

Tranquille sur ce point, Catherine s'était alors occupée de Tristan l'Hermite et de ses hommes qui, le matin suivant, devaient repartir pour Parthenay. Les soldats avaient reçu une généreuse gratification.

Quant à Tristan, elle lui avait offert une lourde chaîne d'or garnie de turquoises qui avait appartenu jadis à Garin de Brazey.

— Elle vous fera souvenir de nous, lui dit-elle en la lui passant au cou. Portez-la souvent en mémoire de Catherine.

Il avait eu son curieux sourire de coin et avait murmuré d'une voix sans doute plus émue qu'il ne l'aurait voulu :

— Croyez-vous qu'il soit besoin d'un joyau royal pour me souvenir de vous, dame Catherine ? Dussé-je vivre deux cents ans que je ne vous oublierais pas. Mais je porterai avec joie cette chaîne aux grands jours. Avec orgueil aussi puisqu'elle me viendra de vous.

Le souper pris en commun devait être le dernier avant leur séparation. Catherine éprouvait une peine réelle à se séparer de ce bon compagnon, peu bavard, mais qui savait se montrer tellement dévoué et d'un courage si efficace. Aussi voulut-elle que, malgré l'état de sa belle- mère, ce repas revêtit quelque éclat. Avec l'aide de Donatie