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— Un colporteur, songea Catherine, ou un ménestrel...

Elle opta pour le ménestrel quand il fut tout près d'elle. Sous le manteau noir, le costume était vert et rouge, vif et gai, quoique fatigué. L'homme ôta son chapeau fané pour la saluer.

— Femme, dit-il avec un fort accent étranger, quel est ce bourg, s'il vous plaît ?

— C'est Montsalvy. Est-ce là que vous allez, sire ménestrel ?

— C'est là que je vais pour ce soir. Ma, per la Madona, si toutes les paysa

— Hélas non, ce n'est pas le Paradis, fit Catherine amusée par l'accent du garçon. Et si vous espérez l'accueil d'un château, sire ménestrel, vous serez déçu. Le château de Montsalvy n'existe plus.

Vous ne trouverez qu'une antique abbaye où l'on chante fort peu de chansons d'amour.

— Je sais, fit le ménestrel. Mais s'il n'y a plus le château, il y a toujours la châtelaine. Co

— Vous allez être déçu tout de même, reprit Catherine. Je suis la dame de Montsalvy.

Le sourire s'effaça du joyeux visage du voyageur. De nouveau il ôta son feutre verdi, mit genou dans la neige.

— Très noble et très gracieuse dame, pardo

— Vous ne pouviez deviner. Les châtelaines courent rarement les chemins par un temps pareil, surtout seules.

Comme pour lui do

— Ne restons pas ici, fit-elle, il fait un temps affreux et la nuit tombe. Le château est ruiné, mais l'hôtellerie du monastère où j'habite peut vous offrir l'hospitalité. D'où vient que vous me co

Le ménestrel s'était relevé et époussetait machinalement ses genoux maigres. Un pli soucieux s'était creusé entre ses sourcils et sa bouche ne retrouvait plus le gai sourire de tout à l'heure.

— Un homme que j'ai rencontré dans les hautes montagnes du Sud m'a parlé de vous, noble dame... Il était très grand, et fort. Un vrai géant ! Il m'a dit qu'il s'appelait Gauthier Malencontre...

Catherine poussa une exclamation de joie et, sans souci de cérémonial, saisit le ménestrel par le bras pour l'entraîner plus vite.

— Gauthier vous envoie ? Oh, soyez béni, qui que vous soyez !

Comment va-t-il ? Où était-il quand vous l'avez rencontré ?

A toute allure, remorquant le ménestrel qui semblait tout à coup très inquiet, elle remontait vers le village, franchissait la porte et lançait au passage à Saturnin qui réparait un volet de sa maison :

Cet homme a vu Gauthier. Il a de ses nouvelles ! Avec une exclamation de joie, le vieux bailli les rejoignit. Le ménestrel le regarda avec une espèce de terreur.

— Par grâce, noble dame, gémit-il, vous ne m'avez même pas laissé le temps de vous dire mon nom et...

— Dites-le alors, fit Catherine joyeusement. Mais pour moi, vous vous appelez Gauthier.

L'homme hocha la tête d'un air accablé.

On m'appelle Guido Cigala... Je suis de Florence, la belle cité, mais, pour le pardon de mes péchés qui sont nombreux, j'ai voulu aller prier en Galice, au tombeau de l'apôtre... Dame, n'ayez pas tant de joie et ne me faites pas si bel accueil ! Les nouvelles que j'apporte ne sont pas bo

Catherine et Saturnin s'arrêtèrent tout net au milieu de la rue.. Le rose joyeux qui était monté au visage de Catherine fit place à une pâleur tragique.

— Ah, fit-elle seulement.





Son regard alla du ménestrel à Saturnin, inquiet, presque suppliant.

Mais elle se reprit, redressa le cou.

— Bo

Guido Cigala baissa la tête, comme un coupable.

— Dame, murmura-t-il, je crois bien qu'il est mort.

— Mort !

Le même cri avait échappé à Catherine et à Saturnin, mais ce fut le vieil homme qui traduisit leur commune pensée.

— Ce n'est pas possible. Gauthier ne peut pas mourir.

— Je n'ai pas dit que j'en étais sûr, fit Cigala penaud, j'ai dit que je le croyais.

— Vous allez nous raconter, coupa Catherine. Rentrons.

À l'hôtellerie, Sara s'occupa de l'arrivant, lava ses pieds meurtris, le réconforta d'une soupe chaude, de pain et de fromage et d'un coup de vin avant de l'envoyer dans la grande salle où Catherine l'attendait, avec Saturnin et Donatie

— Il y a bien longtemps qu'une chanson n'est pas entrée ici, dit-elle doucement. Et je n'ai guère le cœur d'en entendre.

— La musique est bo

— Quand avez-vous vu Gauthier, et où ?

— C'était au col d'Ibaneta, bien avant l'hospice de Roncevaux.

J'étais tombé dans un ravin et ce Gauthier est venu à mon secours.

Nous avons passé la nuit ensemble, dans un abri de montagne. Je lui ai dit que je rentrais dans mon pays, mais que je m'arrêterais dans tous les châteaux que je rencontrerais. Il m'a demandé si je pouvais venir jusqu'ici pour vous do

— Quel message ? demanda Catherine en se penchant vers le jeune homme.

— Il a dit : « Dites à dame Catherine que la jument blanche n'a plus guère d'avance sur moi. Demain, j'espère là rejoindre. »

— Et... c'est tout ?

— C'était tout... Je veux dire : il ne m'a rien confié de plus, mais il s'est passé quelque chose. Au matin, nous nous sommes séparés. Il devait prendre la route d'où je venais et j'ai continué vers Roncevaux, mais le chemin que je suivais montait et, longtemps, j'ai pu voir votre ami, noble dame. Il suivait la route tranquillement, au pas de son cheval. Et, juste au moment où il allait disparaître à mes yeux, le drame a éclaté. Il faut dire que la population de ce pays est sauvage et rude, les brigands y pullulent. Ils ne se sont pas attaqués à moi parce que, sans doute, ils m'ont jugé trop misérable gibier. Mais le grand voyageur était bien habillé, bien monté... De loin, je les ai vus surgir des rochers, l'entourer comme un essaim de guêpes. Il s'est défendu magnifiquement, mais ils avaient le nombre... Je l'ai vu tomber sous leurs coups et puis, tandis que l'un emmenait le cheval, l'autre le bagage, trois hommes ont déshabillé le corps et l'ont jeté dans l'un de ces ravins sans fond dont la seule vue produit l'effroi... Il était mort, bien certainement, ou bien la chute l'a achevé. Mais je ne peux pas jurer sa mort.

Et, s'indigna Saturnin, vous n'êtes pas revenu sur vos pas ? Vous n'avez pas cherché à savoir si celui qui vous avait porté secours vivait encore ou s'il était réellement mort ?

Le ménestrel hocha la tête, haussant les épaules et écartant les mains en un geste d'impuissance.

— Les bandits devaient avoir leur repaire tout près car ils sont restés sur les lieux, attendant sans doute d'autres voyageurs...

Qu'aurais-je pu faire, moi, faible et seul, contre ces sauvages ? Et puis le précipice était effrayant. Comment y descendre ? Dame, ajouta-t-il en se tournant vers Catherine d'un air suppliant, je vous prie en grâce de croire que s'il avait été possible de faire quelque chose pour aider votre ami, ou votre serviteur, je ne sais, je l'aurais fait, même au risque de ma vie. Guido Cigala n'est pas un lâche... il faut le croire.