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Le jour de son arrivée, il fut décidé que mon père et Elsa iraient l'attendre à la gare de Fréjus. Je me refusai énergiquement de participer à l'expédition. En désespoir de cause, mon père cueillit tous les glaïeuls du jardin afin de les lui offrir dès la descente du train. Je lui conseillai seulement de ne pas faire porter le bouquet par Elsa. A trois heures, après leur départ, je descendis sur la plage. Il faisait une chaleur accablante. Je m'allongeai sur le sable, m'endormis à moitié et la voix de Cyril me réveilla. J'ouvris les yeux: le ciel était blanc, confondu de chaleur. Je ne répondis pas à Cyril; je n'avais p'as envie de lui parler, ni à perso

«Etes-vous morte? dit-il. De loin, vous aviez l'air d'une épave, abando

Je souris. Il s'assit à côté de moi et mon cœur se mit à battre durement, sourdement, parce que, dans son mouvement, sa main avait effleuré mon épaule. Dix fois, pendant la dernière semaine, mes brillantes manœuvres navales nous avaient précipités au fond de l'eau, enlacés l'un à l'autre sans que j'en ressente le moindre trouble. Mais aujourd'hui, il suffisait de cette chaleur, de ce demi-sommeil, de ce geste maladroit, pour que quelque chose en moi doucement se déchire. Je tournai la tête vers lui. Il me regardait. Je commençais à le co

«Cyril, dis-je, nous étions si heureux...» II m'embrassa doucement. Je regardai le ciel; puis je ne vis plus que des lumières rouges éclatant sous mes paupières serrées. La chaleur, l'étourdissement, le goût des premiers baisers, les soupirs passaient en longues minutes. Un coup de klaxon nous sépara comme des voleurs. Je quittai Cyril sans un mot et remontai vers la maison. Ce prompt retour m'éto

«C'est la maison de la Belle-au-Bois-dormant! dit-elle. Que vous avez bronzé, Cécile! Ça me fait plaisir de vous voir.

– Moi aussi, dis-je. Mais vous arrivez de Paris?

– J'ai préféré venir en voiture, d'ailleurs je suis va

Je la conduisis à sa chambre. J'ouvris la fenêtre dans l'espoir d'apercevoir le bateau de Cyril mais il avait disparu. A

«Cette villa est ravissante, soupira-t-elle. Où est le maître de maison?

– Il est allé vous chercher à la gare avec Elsa.»

J'avais posé sa valise sur une chaise et, en me retournant vers elle, je reçus un choc. Son visage s'était brusquement défait, la bouche tremblante.

«Elsa Mackenbourg? Il a amené Elsa Mackenbourg ici?»

Je ne trouvai rien à répondre. Je la regardai, stupéfaite. Ce visage que j'avais toujours vu si calme, si maître de lui, ainsi livré à tous mes éto

«J'aurais dû vous prévenir, dit-elle, mais j'étais si pressée de partir, si fatiguée...

– Et maintenant..., continuai-je machinalement.

– Maintenant quoi?» dit-elle.

Son regard était interrogateur, méprisant. Il ne s'était rien passé.

«Maintenant, vous êtes arrivée, dis-je bêtement en me frottant les mains. Je suis très contente que vous soyez là, vous savez. Je vous attends en bas; si vous voulez boire quelque chose, le bar est parfait.»

Je sortis en bafouillant et descendis l'escalier dans une grande confusion de pensées.

Pourquoi ce visage, cette voix troublée, cette défaillance? Je m'assis dans une chaise longue, je fermai les yeux. Je cherchai à me rappeler tous les visages durs, rassurants d'A

A cinq heures, mon père arriva avec Elsa Je le regardai descendre de voiture. J'essayai de savoir si A

«A

– Elle est dans sa chambre, dis-je; elle est venue en voiture.

– Non? C'est magnifique! Tu n'as plus qu'à lui monter le bouquet.

– Vous m'aviez acheté des fleurs? dit la voix d'A

Elle descendait l'escalier à sa rencontre, détendue, souriante, dans une robe qui ne semblait pas avoir voyagé. Je pensai tristement qu'elle n'était descendue qu'en entendant la voiture et qu'elle aurait pu le faire un peu plus tôt. pour me parler; ne fût-ce que de mon examen que j'avais d'ailleurs manqué! Cette dernière idée me consola.

Mon père se précipitait, lui baisait la main.

« J'ai passé un quart d'heure sur le quai de la gare avec ce bouquet de fleurs au bout des bras et un sourire stupide aux lèvres. Dieu merci, vous êtes là! Co

Je détournai les yeux.

«Nous avons dû nous rencontrer, dit A

Mon père s'ébrouait. A ses yeux, tout allait bien. Il faisait des phrases, débouchait des bouteilles. Mais je revoyais tour à tour le visage passio

Ce premier dîner fut très gai. Mon père et A

« Lombard est drôle, A

– Vous avouerez qu'il est quand même insuffisant, et même son humour...

– Il n'a peut-être pas une forme d'intelligence courante, mais... »

Elle me coupa d'un air indulgent: «Ce que vous appelez les formes de l'intelligence n'en sont que les âges.»

Le côté lapidaire, définitif de sa formule m'enchanta. Certaines phrases dégagent pour moi un climat intellectuel, subtil, qui me subjugue, même si je ne les pénètre pas absolument. Celle-là me do

«Au moins, tu n'es pas rancunière.»

Je ne pouvais l'être, car A

Ce premier soir, A

«Je trouve cette Elsa très gentille», dit-elle, avant que je ne sorte.

Elle me regardait dans les yeux, sans sourire, elle cherchait en moi une idée qu'il lui importait de détruire. Je devais oublier son réflexe de tout à l'heure.

«Oui, oui, c'est une charmante, heu, jeune fille... très sympathique.»

Je bafouillais. Elle se mit à rire et j'allai me coucher très énervée. Je m'endormis en pensant à Cyril qui dansait peut-être à Ca

Je me rends compte que j'oublie, que je suis forcée d'oublier le principal: la présence de la mer, son rythme incessant, le soleil. Je ne puis rappeler non plus les quatre tilleuls dans la cour d'une pension de province, leur parfum; et le sourire de mon père sur le quai de la gare, trois ans plus tôt à ma sortie de pension, ce sourire gêné parce que j'avais des nattes et une vilaine robe presque noire. Et dans la voiture, son explosion de joie, subite, triomphante, parce que j'avais ses yeux, sa bouche et que j'allais être pour lui le plus cher, le plus merveilleux des jouets. Je ne co