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Aziraphale hésita.

« C’est vrai, effectivement.

— Tu vois une manigance, crac ! tu déjoues. J’ai tort ou pas ?

— Dans les grandes lignes, dans les grandes lignes. En réalité, j’encourage les humains à s’occuper du côté pratique du déjouement. Rapport à l’ineffabilité, tu comprends.

— Bien, bien. Donc, tout ce que tu as à faire, c’est de déjouer. Parce que, s’il y a une chose que je sais, c’est que sa naissance n’est qu’un début. Le facteur décisif, c’est l’éducation. Les Influences. Sans Elles, ce gamin n’apprendra jamais à utiliser ses pouvoirs. » Il hésita. « En tout cas, pas forcément comme prévu.

— Mon côté ne verra sûrement pas d’objection à ce que je déjoue les manigances du tien, supputa Aziraphale. Bien au contraire.

— Exact. Ça ferait bien reluire ton auréole. » Rampa adressa un sourire encourageant à l’ange.

« Mais qu’est-ce qui arrivera au gamin s’il ne reçoit pas une éducation satanique ?

— Rien, probablement. Il n’en saura jamais rien.

— Mais l’héréditéc

— Ne me parle pas d’hérédité ! Qu’est-ce que l’hérédité vient faire dans l’histoire ? Regarde Satan. Il a été créé ange, et il devient le Grand Adversaire en grandissant. Si tu veux discuter génétique, autant affirmer que le gosse deviendra un ange. Après tout, son papa avait un poste important au Paradis, dans le temps. Dire qu’il deviendra un démon plus tard, simplement parce que son père en est devenu un, c’est comme si tu affirmais qu’une souris à laquelle on coupe la queue do

— Et si les influences sataniques n’ont pas libre cours ?

— Eh bien, au pire, l’Enfer devra recommencer à zéro. Et la Terre gagne onze ans de répit, au bas mot. Ça vaut peut-être le coup, non ? »

Aziraphale parut de nouveau songeur.

« Selon toi, l’enfant ne serait pas mauvais par nature ? demanda-t-il lentement.

— Il est potentiellementmauvais. Mais potentiellement bon, aussi, je suppose. C'est juste une énorme potentialité qui attend qu’on l’oriente. » Rampa haussa les épaules. « De toute façon, pourquoi est-ce qu’on discute de ces histoires de bien et de mal ? Nous savons bien, toi et moi, que ce sont juste des noms qui définissent de quel côté on se trouve.

— Je suppose que ça vaut la peine d’essayer », admit l’ange. Rampa hocha la tête d’un air encourageant.

« Alors, c’est d’accord ? » demanda le démon en tendant la main.

L’ange la serra avec prudence.

« Ce sera probablement plus intéressant que les saints, reco

— Et ce sera pour le bien de l’enfant, en fin de compte. Nous lui servirons de parrains, pour ainsi dire. On surveillera son éducation religieuse, en quelque sorte. »

Aziraphale eut un sourire radieux.

« Tu sais, je n’avais pas vu les choses sous cet angle. Des parrains .Ce sera un travail d’enfer !

— C’est pas désagréable, une fois qu’on est habitué », répondit Rampa.

On l’appelait Scarlett. À cette époque, elle vendait des armes, mais elle commençait à s’en lasser. Elle ne conservait jamais longtemps la même profession. Trois, quatre siècles, au grand maximum. Il ne fallait pas s’enferrer dans la routine.

Ses cheveux étaient d’un auburn parfait, ni carotte, ni châtain : un roux cuivré, franc et luisant. Ils lui tombaient jusqu’à la taille, en mèches pour lesquelles les hommes auraient été capables de tuer, ce qui avait souvent été le cas, d’ailleurs. Ses yeux étaient d’un orange éto

Elle possédait un camion poussiéreux, rouge brique, rempli d’armements divers, et elle montrait un don presque incroyable pour franchir à son bord toutes les frontières du monde. Elle faisait route vers un petit pays d’Afrique occidentale, où se déroulait une guerre civile de faible envergure, afin d’effectuer une livraison qui, avec un peu de chance, la changerait en guerre civile de grande envergure. Malheureusement, le camion était tombé en pa

Pourtant, elle était douée pour la mécanique, de nos jours.

Elle se trouvait alors dans un centre-ville 12 . L’agglomération en question était la capitale du Kumbolaland, une nation africaine qui avait co

La chaleur fit bâiller Scarlett. Elle s’éventa avec son chapeau à large bord, abando

Elle acheta une bière en boîte, la vida puis lança un sourire au barman. « J’ai besoin de faire réparer mon camion. À qui puis-je m’adresser, dans le coin ? »

Le barman lui rendit un immense sourire aux dents blanches. Il avait été impressio

Scarlett paya une autre bière. « Alors ? Ce Nathan ? Vous savez quand il rentre ?

— La semaine prochaine, peut-être. Ou dans quinze jours, chère Miss. Ho, ce Nathan, c’est un vrai vaurien, vous savez ? »

Il se pencha en avant.

« Vous voyagez toute seule, Miss ?

— Oui.

— Ça pourrait être dangereux. Il y a de drôles de gens sur les routes, ces temps-ci. De sales types. C’est pas des gens d’ici », se hâta-t-il d’ajouter.

Scarlett leva un sourcil parfait.

Il frisso

« Merci de me prévenir », ronro

Elle lui adressa un signe de chapeau et sortit d’un pas tranquille.

Le chaud soleil d’Afrique l’écrasait ; son camion était immobilisé en pleine rue avec une cargaison d’armes, de munitions et de mines. Il n’irait pas plus loin.

Scarlett contempla le véhicule.

Un vautour était perché sur le toit. il accompagnait Scarlett depuis maintenant cinq cents kilomètres. Il étouffa un rot.

Elle parcourut le décor des yeux : deux femmes bavardaient à un coin de rue ; un marchand, assis devant un étalage de pastèques bigarrées, s’e

« Bah, au diable, dit-elle à voix basse. J’ai besoin de vacances, après tout. »

C’était un mercredi.

Le vendredi, perso

Le mardi suivant, l’économie du Kumbolaland était en ruine, on dénombrait vingt mille morts (dont le barman, abattu par les rebelles alors qu’il montait à l’assaut des barricades du marché), le compte des blessés s’élevait à presque cent mille, toutes les armes de Scarlett avaient rempli la tâche pour laquelle on les avait conçues et le vautour était mort d’embolie graisseuse.

Scarlett était déjà à bord du dernier train qui quittait le pays. Elle estimait qu’il était temps de changer de carrière. Elle vendait des armes depuis trop longtemps. Elle voulait passer à quelque chose de neuf. Quelque chose qui ait de l’avenir. Elle se verrait bien correspondante pour un journal. Pourquoi pas ? Elle s’éventa avec son chapeau et croisa ses longues jambes devant elle.