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Tandis que le policier revenait à pas lents vers la jetée de Dieppe pour y attendre le départ du bateau d’excursion qui, fort opportunément allait lui permettre de gagner l’Angleterre sans avoir à patienter jusqu’à l’heure du paquebot régulier, Henri de Loubersac, seul dans son compartiment, songeait, mélancolique.

Depuis longtemps il aimait Wilhelmine. Son affection, sincère, franche, était née petit à petit, s’était développée. À présent, elle tenait tout son cœur, envahissait toute sa pensée…

Les paroles de Juve, la veille, l’avaient profondément troublé. Dans la précipitation des minutes, dans l’inquiétude de la poursuite qu’il conduisait alors avec Juve, dans l’attente du caporal Vinson, il avait pu s’en distraire. Mais elles revenaient maintenant à sa pensée, mauvaises, bourdo

Le jeune homme s’absorba si bien dans ses réflexions qu’il perdit conscience de la marche, assez lente, de son train. Les stations succédaient aux stations, sans qu’il prît co

— Il faut me secouer, pensa-t-il…

Homme d’action, il avait horreur des réflexions stériles, des agitations vaines et sans but…

Henri de Loubersac sauta de son wagon, profitant des minutes d’arrêt, il alla se dégourdir les jambes, arpentait les quais de la gare, flânant aux vitrines des kiosques de journaux et d’ailleurs, l’esprit toujours hanté d’une même vision : Wilhelmine…

Il lui fallait bientôt regagner son compartiment ; les hommes d’équipe hâtaient les voyageurs :

— En voiture !… en voiture pour Paris !…

L’officier mit la main sur la rampe, s’apprêta à reprendre sa place. Une stupeur le cloua sur le marchepied…

Tandis qu’il flânait dans la gare de Rouen, une jeune femme voyant le wagon vide, y avait pris place. Elle s’était assise dans un coin du compartiment, et probablement occupée à faire des adieux ou à surveiller l’animation de la gare, avait baissé la glace de la portière, située à l’opposé de celle où Henri de Loubersac, montait.

Le jeune homme ne pouvait encore distinguer le visage de cette voyageuse, mais en vérité rien qu’à son attitude, rien qu’à sa ligne, il croyait la reco

C’était… oui, c’était…

Après un coup de sifflet strident, le convoi s’ébranlait, lentement d’abord, puis, petit à petit, il accélérait son allure… comme il quittait définitivement la gare, la voyageuse qu’Henri de Loubersac ne perdit point de vue se recula, releva la place et, se retournant enfin, s’assit à sa place… Henri de Loubersac la vit.

— Vous, monsieur Henri ?

— Vous, mademoiselle Bobinette !…

Henri de Loubersac, cependant, se ressaisit rapidement :

— Par quel hasard, commençait-il…

Mais, du ton le plus naturel, Bobinette l’interrompit :

— C’est plutôt à vous qu’il faudrait demander cela, monsieur Henri… moi je reviens de passer quatre jours dans ma famille qui habite Rouen.. J’avais demandé un congé à M. de Naarboveck, mais vous ?…

Le lieutenant Henri mordilla nerveusement un bout de sa moustache blonde, il haussa les épaules en répondant :

— Oh ! moi ! il n’est jamais éto

— D’excellentes nouvelles. Vous viendrez à la maison prochainement, monsieur Henri ?

— Je compte aller saluer M. de Naarboveck ce soir même…

La conversation se poursuivit, banale, quelconque, sans aucun intérêt…

— Elle ment ! pensa Henri, tout en écoutant Bobinette qui lui do

Dans le wagon cahoté à chaque virage, le lieutenant et la jeune femme causaient de choses et d’autres, d’insignifiances, de mondanités… Mais soudain…

Sous la jupe de taffetas clair, que portait la jeune femme, Henri de Loubersac, tout d’abord, avait distingué un vague liséré noir.

Mais, quelques minutes après, comme la jeune femme faisait un mouvement, sa robe s’était un peu soulevée…

Et cette fois, le lieutenant Henri de Loubersac n’avait pu s’y tromper.





Il avait vu, nettement vu.

Ce qui dépassait par moments de la robe de Bobinette… le vêtement qu’elle portait sous cette robe, c’était… c’était une soutane de prêtre !…

Bobinette, sous sa robe, avait un déguisement de prêtre…

Ah ! parbleu ! Henri de Loubersac comprenait le rôle joué par la perverse créature ! Il se rendait compte pourquoi il la rencontrait dans ce train revenant de Rouen… Bobinette avait joué le rôle du prêtre auprès du caporal Vinson…

Tout autre que le lieutenant Henri de Loubersac se fût peut-être trahi dans la surprise d’une pareille découverte… C’était, en effet, pour lui, la confirmation douloureuse des paroles de Juve, car il semblait difficile d’admettre que Wilhelmine fût complètement i

Il fallait arrêter Bobinette.

Mais comment procéder ?

Tout en continuant à parler de choses et d’autres, Henri de Loubersac se décidait :

— Je ne peux pas, moi, officier, pensait-il, même en un cas aussi grave, appréhender cette femme perso

La chose lui semblait d’autant plus facile que Bobinette avait, avec elle, une assez lourde valise.

 Avec un grand bruit de ferraille, le convoi s’immobilisa gare Saint-Lazare.

— Je vous dis adieu, mademoiselle Bobinette. Comme je vous l’ai a

Le jeune homme sauta sur le quai, bouscula les voyageurs qui se pressaient devant lui pour atteindre plus vite la sortie.

Mais comme il allait do

Trop préoccupé pour s’inquiéter d’un incident étranger à ses craintes, Henri de Loubersac qui, instinctivement, s’était arrêté lui aussi, allait continuer son chemin, lorsqu’il entendit un homme d’équipe lui souffler à voix basse :

— Ne vous arrêtez pas, monsieur Henri, vous seriez peut-être remarqué !…

Le lieutenant reco

À tout hasard, Henri de Loubersac, tendait à l’agent son paquet de couvertures, feignant, aux yeux des passants, de s’adresser à un homme d’équipe ordinaire. Il demandait :

— Qu’est-ce qui se passe donc ?

— Je ne sais pas au juste, répondait l’indicateur… mais c’est une arrestation demandée par le Deuxième Bureau… il y avait un bonhomme ou une bo

Henri de Loubersac poussait un large soupir de satisfaction…

— Évidemment, se dit-il, Bobinette aura été reco

Rassuré sur le sort de celle qu’il haïssait si profondément, maintenant, pour le tort qu’elle pouvait causer à Wilhelmine, il remercia l’homme d’équipe et s’apprêta à quitter la gare.

Mais, comme il descendait l’escalier menant à la cour du Havre, le lieutenant Henri de Loubersac s’arrêta.

Derrière lui, entre deux hommes qu’il co