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— Je commence… murmura Fandor.

— À Verdun, reprit le caporal qui, s’étant levé, allait et venait dans la pièce, se comprimant les tempes, en proie à une angoisse inexprimable… à Verdun, c’est-à-dire sur la frontière même, c’est-à-dire au milieu de tous ces gens-là, à leur merci !… Ah ! le coup a été bien combiné, j’ai voulu sortir du guêpier, je suis retombé au milieu de la ruche. Alors, monsieur, pour tout vous dire, je perds la tête, absolument ! je sens qu’ils me tie

— Vinson, soyez brave, dites tout à vos chefs ?

Le caporal secouait la tête…

— Jamais !… monsieur… jamais je ne pourrai. Songez donc que c’est le pire désho

Longuement Fandor chapitra Vinson.

Le journaliste se fit tour à tour éloquent, persuasif… il accumula arguments sur arguments, appela à son secours l’amour-propre, le devoir.

Lorsqu’il vit enfin que l’infortuné caporal hésitait, qu’une lueur d’espoir, qu’un vague désir de réhabilitation renaissaient dans son esprit, il s’arrêta court et brusquement, lui demanda :

— Vinson, êtes-vous toujours disposé à vous tuer ?

Le caporal se recueillit une seconde, ferma les yeux et sans forfanterie, mais d’une voix sûre, répondit :

— Oui, j’y suis décidé !

— Dans ce cas, dit Fandor, considérez, voulez-vous, que c’est chose faite et que vous n’existez plus ?…

Le caporal le regardait interdit, Fandor précisait sa pensée :

— À partir de ce moment vous n’existez plus, vous n’êtes plus rien, vous n’êtes plus le caporal Vinson…

— Et alors ? interrogea celui-ci.

Mais Fandor voulait avant tout une promesse :

— Est-ce entendu ?

— C’est entendu…

— Jurez-le !

— Je le jure…

— Eh bien ! Vinson, conclut Fandor, vous m’appartenez, vous êtes ma chose, je vais vous do

7 – DEUXIÈME BUREAU

Ce matin-là, dès neuf heures, une animation inaccoutumée régnait au Deuxième Bureau de l’État-Major.

Le Deuxième Bureau.

Cette formidable organisation installée au Ministère, que tout le monde co





Les services du Deuxième Bureau s’amorcent sur un long couloir et tie

Lorsque, d’aventure, on est autorisé à y pénétrer, on rencontre d’abord une assez grande pièce où, installés à des pupitres en bois, travaillent une douzaine de secrétaires d’État-Major, jeunes gens à belle écriture. On les change fréquemment afin d’éviter qu’ils ne soient trop renseignés sur la nature des travaux qu’ils exécutent. Le plus souvent d’ailleurs, ces travaux n’ont aucun caractère confidentiel, ou tout au moins leur signification est si dissimulée que les secrétaires ne peuvent en comprendre l’importance.

Attenant à ce local, se trouve la pièce réservée aux travaux dits de « la statistique ».

C’est un vaste local carré qu’éclairent abondamment deux larges fenêtres, et au milieu duquel se trouve une grande table en bois blanc. Parfois des dossiers l’encombrent, mais le plus souvent elle est nette, débarrassée des paperasses et l’on y voit étalées des cartes de tous les pays de France et de l’étranger, bariolées de traits de crayon rouge et bleu, ornées de signes cabalistiques, surchargées d’a

Autour de la pièce, adossés au mur, se trouvent les bureaux occupés par les officiers du service, deux capitaines et deux lieutenants.

La pièce voisine est un petit cabinet où se tient ordinairement le sous-chef, le commandant Dumoulin.

Ce cabinet ne présenterait aucun aspect particulier et ne retiendrait pas autrement l’attention du visiteur si l’on ne savait que dans le mur de droite se trouve scellée la fameuse armoire de fer dont seul le commandant Dumoulin possède la clé et dans laquelle sont enfermées, dit-on, les instructions les plus secrètes relatives à la Défense Nationale et à la Mobilisation.

Le cabinet du commandant Dumoulin qui do

C’est dans ce salon que le perso

On peut d’ailleurs parler sans crainte dans ce salon ; un tapis épais étouffe le bruit des pas, rideaux et portières mettent les causeurs à l’abri des indiscrétions.

Enfin tout à l’extrémité du couloir on arrive au cabinet du commandant en chef du Deuxième Bureau, le colonel Hofferman, officier jeune, instruit, appelé au plus grand avenir.

L’installation du colonel Hofferman ne ressemble en rien à celle des pièces voisines : le bureau est élégamment meublé ; l’officier a contribué pour sa part perso

Tout un jeu de téléphones unit le colonel Hofferman avec les divers services du ministère et aussi avec la Ville ; deux fils directs le relient, l’un au Ministre, l’autre au Gouverneur de Paris.

Dans un petit réduit, enfin, attenant au bureau de cet officier supérieur est installé un poste télégraphique.

Le colonel Hofferman, qui appartient à l’infanterie, est un homme d’une grande distinction.

Avec tact et autorité, depuis trois ans déjà, le colonel Hofferman dirige le délicat service de la « statistique » auquel il a fait faire de gros progrès.

Très homme du monde, il est reçu dans les milieux les plus aristocratiques ; célibataire et encore fort beau garçon malgré l’approche de la cinquantaine, on assure qu’indépendamment des visites professio

***

Dans le bureau des officiers, on causait avec animation :

— Alors, c’est encore un artilleur ? interrogea le lieutenant Armandelle.

Le capitaine Loreuil, qui était occupé à tailler un crayon, s’arrêta. Souriant, il se renversa sur le dossier de son fauteuil et répondit :

— Non, mon ami, cette fois nous allons avoir un sapeur.

Levant les yeux par-dessus ses lunettes, le capitaine Loreuil fredo

Rien n’est sacré pour un sapeur…

Armandelle éclata de rire :

— Ah ! mon cher, on peut dire que vous n’engendrez pas la mélancolie, quoi qu’il advie