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« — Bah ! ça me fait plaisir de vous la payer ce prix-là… c’est une façon de vous remercier de m’avoir prêté votre trousse. Ma foi, monsieur Fandor, j’étais bien trop dans la dèche pour refuser. J’ai accepté donc, en m’excusant : le militaire n’est pas riche…

« Je passe sur les détails… En me reconduisant à la caserne, Alfred, en qui j’avais toute confiance, car il avait vraiment l’air d’un chic type, voulut à toute force me prêter de l’argent. Je lui avais parlé de Nichoune et aussi de mes difficultés. Il me glissa d’autorité un louis dans la main :

« — Quand vous serez redevenu civil, dit-il, vous vous arrangerez bien pour me rembourser, et puis d’ailleurs, je vais vous demander d’ici peu de me rendre quelques services, je vous paierai pour cela… Vous comprenez bien, monsieur Fandor, que je n’avais aucune raison de refuser, surtout qu’il m’offrait cela très gentiment et qu’il tombait à un moment où, je dois le reco

« Nous nous sommes revus bien des fois depuis lors ; Alfred m’invitait toujours, et souvent avec Nichoune ; jamais il ne voulait me laisser payer ; j’avoue d’ailleurs, que la plupart du temps j’aurais bien été en peine de le faire… Nos rendez-vous avaient toujours lieu hors de la ville où il n’aimait pas rester, parce que, prétendait-il, l’air était mauvais pour ses poumons très délicats. Il s’intéressait à tout, particulièrement à l’aviation et sans cesse il me faisait le piloter dans le camp des aviateurs. – Toi qui dessines bien, me disait-il, fais-moi donc un plan de cet appareil… explique-moi comment sont construits ces baraquements… Il m’interrogeait aussi sur les effectifs des régiments, sur les états qui me passaient par les mains dans les bureaux… Enfin un jour, comme je ne comprenais pas où il voulait en venir, Alfred me cassa le morceau :

« — Vinson, me dit Alfred, j’ai confiance en toi, tu co

« Ah ! monsieur Fandor, toute cette histoire-là ne tenait pas debout, mais j’eus la faiblesse d’y croire… ou tout au moins de faire semblant !… d’ailleurs, la proposition d’Alfred venait à pic ; je n’avais plus un sou vaillant. Nichoune faisait un tapage épouvantable et c’est à peine si j’osais sortir dans les rues, tant j’avais de créanciers. Plus tard, j’ai su que c’était là un procédé qu’on emploie pour “amorcer” les indicateurs. On leur fait livrer d’abord des choses insignifiantes qu’on leur paie très cher, ensuite, on les boucle… Les photographies faites, j’ai rejoint Alfred qui m’avait dit d’obtenir à tout hasard une permission de quarante-huit heures. Alfred m’a entraîné à la gare. Il avait deux billets, nous partions pour Nancy où se trouvait, disait-il, l’acheteur. À Nancy, perso

« Soudain, vers quatre heures de l’après-midi, Alfred me dit : Bah ! n’hésitons plus, si l’étranger n’est pas venu c’est qu’il nous attend ailleurs, je sais où… allons donc le rejoindre… à Metz… À Metz ? mais il faut passer la frontière et je n’ai pas… Alfred m’interrompt. Il ouvre une armoire, en tire des vêtements civils, puis dans un tiroir une fausse barbe.

« Au bout d’une demi-heure, nous nous étions travestis. Une heure après nous débarquions en Lorraine. C’est là que, pour la première fois, j’ai commencé à avoir peur, car il m’a semblé qu’en sortant de la gare de Metz, Alfred venait d’échanger un coup d’oeil avec le gendarme de service. Ah ! monsieur Fandor, comme je l’ai regretté ce voyage. Sitôt en pays étranger, Alfred a changé d’attitude à mon égard. Ce n’était plus un ami, mais un maître que j’avais. Il me tenait, le brigand, et joliment bien !

« — Où allons-nous ? lui ai-je demandé. Alfred ricana : — Parbleu ! tu t’en doutes, qu’il me répond, chez le major Schwartz, dans la Wornerstrasse, au Bureau des Renseignements… — Je n’irai pas ! Alfred me lance un coup d’oeil menaçant. — Tu viendras ! me fit-il à voix basse. Songe donc que si tu refusais, au bout de cinq minutes la police t’aurait démasqué !…

« Il n’y avait rien à faire. Je le co





« Je croyais que tout était fini et m’apprêtais à sortir de ce lieu abominable, mais le gros homme me mit la main sur le bras – c’était le major Schwartz, en perso

— Et… vous avez… fourni tout cela ?

— J’ai fourni tout cela !

— C’est tout ?

— Pas encore ! Alfred m’avait raccompagné jusqu’à Nancy où j’avais repris mon uniforme, puis j’ai regagné Châlons tout seul.

« Je me suis demandé s’il me serait possible de me débarrasser de mon triste entourage, mais je n’ai pu y réussir… Alfred, chaque jour, me harcelait, me menaçait, j’ai dû lui obéir, comme je viens de vous le dire ; puis aussitôt après il y a eu l’affaire du capitaine Brocq…

« Alors, sans rien dire à perso