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Et le seul point, le seul fait qui permettait de s’apercevoir qu’on ne se trouvait pas au centre le plus élégant de Londres ou de New York, c’était la présence dans les rues d’une multitude de cafres aux oripeaux bariolés, et dont les faces noires demeuraient confondues d’éto

Fandor, toutefois, n’attachait qu’une médiocre importance à tout ce qui pouvait constituer le côté pittoresque de ses aventures. Le journaliste, comme il regagnait la petite chambre qu’il avait louée dans un faubourg de la ville, réfléchissait à la situation.

— Parbleu, se disait Fandor, elle est mauvaise la situation.

Le journaliste, trois ou quatre fois par jour, en plus des circonstances qui l’amenaient devant le concierge de sa maison, ne manquait jamais de demander s’il n’y avait pas de télégramme, ni de lettre à son adresse.

Invariablement, on lui répondait : non, et chaque fois Fandor se mettait à jurer.

Ce jour-là, tandis qu’il s’habillait, Fandor grommelait encore contre le silence obstiné de son ami.

— Cet animal de Juve est d’une insouciance. Dire qu’il n’a pas même daigné répondre à ma dépêche. Je lui ai pourtant télégraphié sur un tel ton qu’il a dû s’en alarmer.

Le journaliste avait d’ailleurs d’autres soucis. Fandor en achevant de revêtir son smoking, monologuait à haute voix pour préciser sa pensée.

— Il y a trois points principaux qui m’inquiètent et ces points ne sont autres que : Hans Elders, mon ami Teddy et la tête de mort disparue.

Quel lien y a-t-il entre ces deux crânes et ce crâne défunt ? Voilà ce qu’il faudrait savoir, et voilà ce que j’ignore… D’autre part, je suis assez tranquille, car l’asile de fous dans lequel on m’a fait l’ho

J’en veux à ce Hans Elders qui est venu me dérober la fameuse tête de mort, au risque de se faire pincer par toute la police du Natal, et je lui suis reco

Pour un peu j’aurais une entière sympathie pour ce gamin, si je ne craignais pas d’accorder mon amitié à une fichue fripouille, car si certains côtés du caractère de Teddy me paraissent dignes et généreux, d’autres me font l’effet d’être parfaitement suspects.

Tout en monologuant, Fandor avait achevé de s’habiller.

— Allons, fit-il en étouffant un soupir, allons, il faut aller voir ce monde, monde interlope, mais indispensable à co

Et Fandor, avec l’allure d’un parfait gentleman, quitta son humble domicile et sauta dans le tramway qui devait le conduire au centre de la ville.

Par suite de quels événements Fandor, jusqu’alors employé en qualité d’ouvrier dans la chercherie de diamants, s’était-il soudain transformé en un élégant clubman prêt, semblait-il, à passer la soirée dans un lieu de plaisir ou dans un salon du monde ?

Fandor, après la nuit au cours de laquelle il avait découvert l’équivoque conduite de son ami Teddy, s’était juré de percer à jour les mystères de Diamond House.

Se rendant compte que s’il continuait à effectuer d’humbles besognes dans la chercherie de diamants il n’apprendrait rien, le journaliste s’était décidé à risquer le tout pour le tout, à s’habiller en homme chic, à dépenser largement les quelques livres sterling gagnées par lui, à faire croire qu’il était riche, afin de s’introduire coûte que coûte dans le milieu des relations de Hans Elders où, certainement, il trouverait matière à se renseigner.

Ce soir-là, Fandor ayant exécuté la première partie de son programme, autrement dit s’étant vêtu luxueusement, décidait délibérément de mettre à exécution la seconde.

***





— Faites vos jeux, messieurs… faites vos jeux, rien ne va plus. Sept à droite, huit à gauche… en cartes avec le banquier, en prenez-vous ?… rien ne va plus, messieurs… neuf en trois…

La partie de baccara était des plus ardentes au National Club et le croupier en chef, avec une joie non dissimulée, a

Mêlé aux habits noirs, et observant ce qui se passait autour de lui, se trouvait Fandor.

Qu’est-ce que le journaliste venait faire dans ce lieu ?

Après avoir dîné d’un sandwich et d’une tasse de café, le journaliste avait décidé de se fendre de deux livres pour avoir le droit de pénétrer, en qualité de membre temporaire, au National Club.

Le National Club, dont la façade en ciment armé toute boursouflée de moulures et dont l’entrée était défendue par deux nègres en grand uniforme, n’était, en réalité, qu’un tripot, mais il présentait cet intérêt particulier pour Fandor qu’il était, non seulement le rendez-vous de la bo

C’était le seul établissement qui ne fermait point de la nuit et où l’on pouvait boire, jouer et fumer à son aise.

Les salons du rez-de-chaussée étaient réservés aux gens qui voulaient paisiblement lire les journaux et les revues. Mais, au premier étage, un brouhaha intense était de rigueur, notamment dans la grande salle du baccara où cinq tables ne chômaient pas.

Les femmes n’étaient pas admises, mais les hommes, sans distinction de profession ou d’origine, pouvaient s’y réunir, du moment qu’ils avaient acquitté le droit d’entrée.

Le comité du cercle, toutefois, étant composé en majorité d’Américains, l’entrée de ces locaux était formellement interdite à tout homme de couleur. Mais la plus grande latitude était accordée aux blancs et jamais on ne se préoccupait de leur état civil, encore moins de leur casier judiciaire.

Fandor, sitôt arrivé dans l’immense salle, avait reco

Machinalement, comme invinciblement attiré vers lui, il s’était rapproché de l’homme dont il avait été toute une semaine le modeste employé. Fandor avait aperçu, vautré dans un fauteuil de cuir, le chercheur de diamants Hans Elders, ample, à demi assoupi, fumant béatement un cigare voluptueux.

— Celui-là, s’était dit le journaliste, je le co

— Peut-être même… le reco

En pensant ainsi, Fandor, malgré lui, songeait à Fantômas, si expert, si subtil dans l’art des travestissements. Fandor, de son regard perspicace et chercheur, détaillait les moindres traits du visage de cet homme, interrogeait ses gestes, sa silhouette. Hans Elders était-il Fantômas, ainsi que Fandor le redoutait à la fois et l’espérait ? Mais non, ce perso

Fandor, pour avoir la tenue décente et correcte exigée par les règlements du cercle, avait dû faire un rude accroc à son modeste capital et le journaliste qui, de propos délibéré, avait renoncé à sa profession de ratisseur de terre, profession modeste sans doute, mais assez lucrative – car chaque ouvrier touche une prime dès qu’il trouve un diamant, et le cas est fréquent, – se rendait compte qu’il ne pourrait mener longtemps une existence oisive de snob, sans avoir à pourvoir aux nécessités de son existence matérielle.

Quelques livres sterling se trouvaient encore au fond de sa poche et le journaliste qui, machinalement, les remuait dans ses mains, se disait qu’après tout, il aurait peut-être tort de ne pas risquer la chance et de se tenir perpétuellement loin du fameux tapis vert.

Fandor, qui n’était pas joueur, était superstitieux et il savait que le proverbe dit : « Aux i