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— Tant pis ! Son attaque de ce soir ne manquait pas d’audace. Je me demande ce qu’il nous réserve encore ?
— Qui vivra verra ! fit Aldo avec un haussement d’épaules résigné. L’important est que Lisa soit à l’abri de ses coups tordus !
Une surprise les attendait : Amu, qui avait l’habitude de dormir sur le tapis du salon à la porte d’Aldo, était étendu de tout son long dans l’ouverture de cette porte, si magistralement assommé que l’on eut du mal à le ranimer. Ce qui s’était passé était évident : il avait voulu défendre l’accès à la chambre de son maître où tout était retourné. Celui qui avait fait cela pouvait être satisfait : la « Régente » avait disparu…
Ce que le brave garçon put dire, une fois revenu à la conscience, n’éclaira guère la situation : alors qu’il préparait la couverture du lit, il avait entendu du bruit dans le salon et naturellement était allé voir, et c’est en y pénétrant qu’il avait reçu sur la nuque un choc violent. Autrement dit, il n’avait rien vu. Quant à l’examen des lieux, il n’apprit pas grand-chose aux deux hommes : l’agresseur n’avait pas eu la courtoisie d’abando
— Si tu veux mon avis, on n’a pas besoin d’indices, soupira Adalbert en se laissant choir dans un fauteuil pour se verser un verre de whisky. Le vol est signé : le cher Alwar a envoyé un ou plusieurs de ses sbires pour récupérer la perle, un point c’est tout !
— Une chose m’éto
— Pour deux raisons : d’abord l’homme portait sans doute la livrée du palais et il a dû profiter du moment où tout le monde admirait le feu d’artifice. Les hindous en sont friands et c’est en outre l’une des manifestations de la vie mondaine à laquelle les serviteurs peuvent prendre part à égalité avec leurs maîtres : il suffit pour cela d’avoir des yeux.
— D’accord, mais ils pourraient être revenus ? Les fusées sont éteintes depuis un moment déjà.
— Il est tard et leurs journées sont longues. De plus, tu oublies qu’Amu jouait volontiers les chiens de garde. En tout cas, le coup n’est pas si mal agencé : tu as déclaré hautement avoir repris la « Régente » et si, ce soir, tu vas dire à Jagad Jit Singh qu’on te l’a volée, il pourrait penser, si Alwar revenait à la charge, que tu as choisi un moyen tout simple d’éviter son arbitrage : tu n’as plus la perle, donc il n’est plus possible de la rendre à cette sombre brute.
— Je me vois mal courant me plaindre à cette heure auprès de notre hôte. C’est dans la matinée que commence le grand défilé vers la ville et le Durbar du Vieux Palais. Jagad Jit Singh n’a pas beaucoup de temps pour se reposer, en admettant qu’il rejoigne son lit. Je l’imagine plutôt se recueillant avant cette sole
— En d’autres termes : tu laisses tomber ?
Aldo fouilla dans sa robe, réussit à trouver son étui à cigarettes, en alluma une, tira quelques bouffées méditatives et finalement sourit :
— Oui.
— Mais ça te coûte une fortune ?
— Je ne dis pas non, mais je suis tellement content d’être débarrassé de cette foutue perle sans espoir de retour ! Si elle cause à Alwar seulement la moitié des emmerdements que je lui dois, je serai le plus heureux des hommes ! Malheureusement je n’en saurai rien !
— Mais on peut toujours imaginer ? fit Adalbert, sa bo
Le lendemain la petite ville de Kapurthala était plus rose que jamais. Dans l’attente du cortège d’éléphants qui amènerait bientôt le maharadjah, son héritier et les princes jusqu’à la cour d’ho
Sur une autre, dans l’enceinte même du palais et placée en face du trône d’or, un vélum bleu et or abriterait les invités des ardeurs du soleil. C’est là que, réintégrés dans leurs austères jaquettes de cérémonie, Morosini et Vidal-Pellicorne rejoignirent Francis de Croisset qui les accueillit avec cordialité. La veille, occupé à faire un doigt de cour aux princesses, l’écrivain n’avait rien vu de l’altercation.
— Je crois, dit-il, que nous allons assister à quelque chose d’extraordinaire, mais j’ai très envie de redescendre dans la rue pour voir arriver le cortège.
— Il y a un monde fou. Vous allez vous faire étouffer, remarqua Aldo.
En effet, sur toute la longueur de l’artère principale coupant la ville en deux comme à Alwar, les soldats bleus et blancs contenaient fermement une foule impatiente qui n’aurait pas demandé mieux que de les déborder.
— Le spectacle vu d’ici n’est déjà pas si mal, ajouta Adalbert.
La vaste cour s’emplissait d’hommes portant presque tous des robes dorées et des turbans framboise qu’un protocole sévère menait à des places bien définies.
— Peut-être vais-je quand même m’y risquer. Je pars très tôt demain matin pour Amritsar et Lahore, et j’ai demandé mon dîner de bo
— Mais la fête ici ne finira que tard ce soir. Vous n’y serez pas ?
— Non hélas, car j’ai un programme très chargé et je suis attendu demain soir chez le gouverneur de Lahore !
— Nous vous regretterons, dit Morosini, sincère.
— Moi aussi mais nous nous reverrons à Paris. De toute façon je vais remonter dans un moment.
Et il se dirigea vers l’escalier menant à l’entrée du palais.
L’attente fut longue. Enfin le premier coup de canon se fit entendre : le cortège venait de franchir l’enceinte de la ville. Éblouissant ! Cinq éléphants peints et caparaço
La première salve avait dressé les perso
Pendant la plus grande partie de la cérémonie, Aldo avait observé son e