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À présent, le navire ayant quitté le port venait de se séparer de son pilote pour piquer en direction de la haute mer. Les côtes de France s’estompaient avec la ville du Havre mais aussi, les toits bleus de Honfleur et plus loin le liséré beige des plages de Houlgate, de Deauville et de Cabourg. Le vent fraîchit encore et Morosini quittant enfin son bastingage allait rejoindre sa cabine quand un bruit de moteur, relayé par les cris des passagers l’attira vers l’autre côté du pont : un petit avion biplan « Bluebird Blackburn » tournoyait juste au-dessus du paquebot, s’approchant si près que l’on pouvait voir le pilote agiter un mouchoir par le cockpit ouvert. Ce sémaphore semblait parfaitement compris d’un groupe de perso

Et puis ce fut un silence total parce que les machines venaient de stopper puis de rétrograder : l’immense navire revenait en arrière pour tenter de sauver le pilote. Il parcourut deux ou trois milles avant de réduire l’allure et de croiser lentement à l’endroit où l’avion s’était englouti mais aucun débris ne flottait en surface. À bord on retenait son souffle et durant un moment une angoisse proche du désespoir habita le paquebot. Toute trace de drame semblait effacée et pourtant l’ Île-de-Francecherchait encore ne pouvant se résoudre à abando

— Il est là ! Je le vois…

De l’endroit où il se trouvait, Aldo lui ne voyait rien, sinon le canot de sauvetage que l’on descendait rapidement. Un moment plus tard on entendit venir de l’embarcation :

— On le tient ! Il est vivant !

— Dieu soit loué ! exhala près d’Aldo la voix de la dame en gris. La pauvre Dorothy ne se serait jamais remise de cette catastrophe.

— Vous la co

— Nous sommes même un peu cousines. Elle s’appelle Dorothy Paine, d’une de nos meilleures familles new-yorkaises mais son fiancé, l’aviateur, est français. Il se nomme Pierre van Laere et c’est le fils d’un richissime courtier en coton (10).

La baro

— Qu’avez-vous fait de mon ami Vauxbrun ? demanda-t-il.

— Oh ! Il a couru sur la passerelle voir le Commandant mais je pense que ce grand marin n’avait pas besoin de ses conseils. C’est un vrai gentleman ! Détourner un si grand navire pour un si petit perso

— Il doit penser qu’une vie humaine a sa valeur et qu’il faut faire de son mieux pour la préserver mais vous avez raison c’est un bonheur que naviguer sous un tel homme ! À présent peut-être serait-il convenable que je me présente à vous…

Elle se mit à rire et, en dépit de sa voix troublante, son rire était extraordinairement gai.

— C’est inutile. J’ai interrogé notre ami. En revanche vous, vous ignorez qui je suis ?

— Je le regrette depuis que je vous ai vue.

— Ah que galamment ces choses-là sont dites ! Eh bien sachez que j’ai nom Pauline Belmont, veuve depuis six mois du baron Frantz von Etzenberg et que je rentre chez moi à New York.

Une énorme acclamation lui coupa la parole : le jeune aviateur trempé comme une soupe sous la couverture qui l’enveloppait venait d’apparaître porté par deux marins qui l’emportèrent à l’infirmerie où le médecin allait l’examiner. Il eut juste la force d’adresser un signe à sa fiancée qui, cette fois, pleurait de joie.

Cependant Vauxbrun revenait et s’il fut un rien contrarié de voir que la baro





— Quel type, ce Commandant ! Quel sang-froid, quelle élégance ! Il m’a poliment fichu à la porte mais je ne peux lui en vouloir. Lui et son bateau vont décidément bien ensemble (11). Peut-être serait-il temps de nous préparer pour le dîner ? ajouta-t-il en offrant son bras à la baro

— Allez sans moi ! Je vais prendre des nouvelles de Dorothy et resterai un moment auprès d’elle et perso

— Moi qui espérais vous inviter ? émit Vauxbrun avec une grimace de déception. Tous les deux bien sûr ! ajouta-t-il avec une précipitation qui fit sourire Morosini.

— Vous aurez largement le temps pour ce faire ! Et je suppose que vous avez beaucoup de choses à vous dire si vous ne vous êtes pas vus depuis un moment.

— Ce n’est pas une si mauvaise idée, approuva Gilles aussitôt. Il y a paraît-il à bord deux vedettes et quelques autres perso

— Ben voyons ! murmura Aldo tandis que Pauline von Etzenberg s’éloignait vers les escaliers. C’est tellement agréable d’être un pis-aller ! Je suppose que tu es, une fois de plus, très amoureux ? J’avoue que je ne saurais te do

— Elle est superbe, n’est-ce pas ? soupira l’antiquaire avec dans la voix un trémolo qui fit comprendre à Aldo que le dîner se passerait à vanter les charmes de la belle Américaine.

— Absolument mais il y a longtemps que tu la co

— Huit jours. Je l’ai rencontrée au « Bœuf sur le Toit » où j’avais emmené un client suisse. Elle y était avec des amis et il se trouvait que mon client la co

— Une veuve de six mois au « Bœuf sur le Toit » ? Voilà un mari vite enterré il me semble ?

— Il buvait comme une éponge et la battait comme plâtre quand il était ivre. Étant do

— Pas le moindre. Elle se prépare à me do

— Tu vas me raconter ça pendant le dîner, on se lave les mains, on va boire un verre et on y va…

Pur produit des Arts Décoratifs, les pièces d’apparat du paquebot desservies par le monumental escalier de marbre, de cuivre poli et de glaces, alliaient la simplicité des lignes au luxe le plus raffiné. Les plus grands décorateurs en avaient composé l’harmonie : Ruhlma