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Au moment où le bateau allait appareiller, un des fonctio

— Qu’est-ce qui se passe ? demanda Aldo.

— Un passager de dernière minute, traduisit Adalbert. Ou plutôt une passagère, mais qui semble être une perso

— S’il y a une chose dont j’ai horreur en voyage, c’est la présence d’une « perso

— Cela n’a aucune espèce d’importance ici ! D’ailleurs, la voilà ! Je me demande qui ça peut être ?

Le fourgon du Winter Palace déversait en effet plusieurs malles-cabines et un nombre impressio

— Seigneur ! soupira Adalbert. Décidément, je me demande qui cela peut être ?

— Là, je suis en mesure de te répondre, dit Aldo qui se souvenait d’avoir vu dans le hall du Shepheard’s une complaisante photo qui devait dater de quelques a

— Comment le sais-tu ? Tu l’as déjà entendue ?

— Oui et non. Elle est arrivée en catastrophe au Shepheard’s la nuit où tu as jugé bon d’aller prendre le train sans prévenir et on l’a logée dans la chambre que tu venais de quitter. Elle répétait pendant que je me rasais.

— Oh moi, l’opéra !… J’aime la musique mais j’ai du mal à m’accrocher aux perso

— Iconoclaste !

— Parce que l’opéra me déçoit toujours ! Je ne comprendrai jamais pourquoi on se do

— Alors, tu fermes les yeux…

— Tu apportes de l’eau à mon moulin ! Quel besoin dans ce cas de dépenser des fortunes en décors et costumes ? Non, je crois que j’ai raison quand je prétends qu’à partir d’un certain âge ou d’un certain tour de taille, nos rois et nos reines du bel canto ne devraient plus chanter qu’en concert !

— Alors, réjouis-toi ! Tu n’auras à bord ni décors ni costumes ! Rien que le Nil et la nuit !

La vedette ne l’entendait pas de cette oreille. Au soir de l’embarquement, elle fit une entrée d’impératrice dans la salle à manger, drapée d’une manière de toge romaine en crêpe-satin jaune soufre, escortée de ses deux satellites, mais quand le maître d’hôtel se précipita pour la conduire à sa table, elle laissa planer sur les dîneurs un regard méprisant, tourna les talons, déclara qu’elle n’avait pas envie de manger avec ces gens-là et ordo



— Eh bien, dis donc ! Elle est charmante, ta compatriote ! commenta Adalbert. Elle a peut-être une voix d’or, mais elle est franchement odieuse ! On ne peut pas dire qu’elle s’y entende à soigner sa publicité !

— Ce doit être parce qu’elle ne t’a pas vu ! ironisa Aldo. Tu es à moitié caché par les fleurs de la table de service ! Cela dit, je rends les armes. Cette femme est impossible !

Le dîner achevé, et peu tentés par une soirée au salon entourés d’inco

— On n’est pas mieux ici qu’enfermés à écouter bramer ta diva ? soupira Adalbert.

— Oublie-la, je t’en prie ! Puisqu’elle préfère rester dans sa cabine, qu’elle y reste et qu’elle aille au diable !

Il n’avait pas fini sa phrase que l’accompagnateur de la Rinaldi se matérialisait auprès d’eux :

— Veuillez me pardo

Adalbert éclata de rire :

— Je croyais que c’était visible à l’œil nu… mais je me sens immensément flatté que l’on puisse se poser la question. C’est Monsieur qui a cet ho

— Qu’avez-vous à me dire ? fit Aldo.

— Pas moi mais la signora Rinaldi. Elle désire vous voir !

— Après le camouflet qu’elle vient d’infliger aux passagers de ce bateau, je ne suis pas certain d’en avoir envie. Qu’est-ce qu’elle me veut ?

— Je… je ne sais pas, balbutia le jeune homme, apparemment sur des charbons ardents. Elle m’a envoyé vous chercher et je n’ai pas l’habitude de discuter ses ordres…

— Tu devrais y aller, conseilla Adalbert. Ne serait-ce que pour ce malheureux garçon. Elle doit être capable de lui couper les oreilles avec ses dents s’il revient sans toi !

— Tu as raison. Je vous suis, ajouta-t-il en jetant son cigare à l’eau.

La cantatrice l’attendait, assise devant la coiffeuse. Elle se détourna quand la porte s’ouvrit, arborant un sourire radieux :

— Venez ! Venez vite ! Ah, cher prince, recevez toutes mes excuses ! Mais comment pouvais-je deviner que vous vous trouviez au milieu du vulgaire ! s’exclama-t-elle en tendant une main baguée à chaque doigt, à l’exception du pouce, et sur laquelle il ne put que s’incliner.

— Faut-il vraiment que vous sachiez la qualité de vos auditeurs, Madame ? Cela doit vous compliquer la vie quand vous chantez à la Scala ou à Covent Garden, au San Carlo de Naples ou à l’Opéra de Paris ?

— Ce n’est absolument pas pareil. Au théâtre, il y a le public, une masse vivante qui respire à l’unisson et où je ne détaille perso