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JULIETTE BENZONI
L’ANNEAU D’ATLANTIDE
PLON
PREMIÈRE PARTIE
UNE RUE À VENISE
1
Un cri dans la nuit
En sortant de chez son notaire où il venait de dîner, Aldo Morosini releva le col de son manteau, alluma une cigarette, exhala la première bouffée dont il respira l’odeur avec délices en homme privé depuis plus de deux heures de sa drogue préférée pour ménager les voies respiratoires de son hôte, puis enfonça ses mains dans ses poches et entreprit de réintégrer ses pénates. Maître Massaria habitait au Rialto, sur la riva del Vin, une jolie maison ancie
C’était, en effet, un épicurien raffiné goûtant la bo
On avait discrètement évoqué son souvenir au cours du dîner, entre la langouste grillée et le risotto aux truffes blanches. Maître Massaria avait une façon bien à lui de dire « notre chère princesse Isabelle » – elle était française – ou « votre chère maman » sur une sorte de soupir qui amusait et attendrissait Aldo. Il s’émerveillait d’ailleurs de ce rare talent qu’Isabelle avait eu de s’attirer des amours incorruptibles. Le notaire vénitien n’était pas le seul homme à lui avoir voué son cœur. Il y en avait un second, écossais celui-ci, lord Killrenan, coureur des mers impénitent, qui avait passé son existence à sillo
Il n’était pas tard. Onze heures so
Le moral, en effet, n’était pas au zénith. D’abord il était seul chez lui et son palais-magasin d’antiquités lui semblait vide en l’absence de sa femme Lisa et des enfants : les jumeaux Antonio et Amelia, cinq ans, deux têtes brunes habitées par un égal esprit d’entreprise, et Marco, le petit dernier, bébé rouquin, ravissant, autoritaire et braillard, à qui Aldo reprochait de trop accaparer une jeune mère dont il ne cessait d’être très amoureux.
On avait passé les fêtes de fin d’a
En principe, Guy Buteau était lui aussi invité chez le notaire, mais il avait pris un bain de pieds involontaire en ratant une marche de l’entrée principale et, fragile des bronches, se trouvait confiné à l’intérieur depuis déjà une semaine. C’est donc seul qu’Aldo suivit le chemin du retour à travers les rues d’une Venise hivernale désertée par les touristes, ce qui n’était pas pour lui déplaire… Il aimait en effet marcher dans « sa » ville dont il co
Ce soir, pourtant, il se sentait moins sensible à la magie habituelle, justement à cause de cette humeur morose qu’il traînait derrière lui depuis qu’il avait quitté Vie
Certes, il aimait toujours autant son métier : acheter de beaux objets ou de belles pierres, les revendre à qui saurait les apprécier. Parfois il les gardait pour sa collection perso
En ce mois de janvier, ceux qu’elle appelait « son gang » étaient dispersés. Adalbert, en bon égyptologue, devait être quelque part dans la vallée du Nil ou dans les monts de Nubie. La marquise de Sommières – Tante Amélie – nantie de son fidèle bedeau, Marie-Angéline du Plan-Crépin, sa cousine et lectrice à tout faire, respirait le soleil d’un pays méditerranéen comme il convenait à une octogénaire, en pleine forme sans doute mais soucieuse de se protéger des rhumatismes. On aurait une carte postale un de ces jours, griffo