Страница 25 из 112
Ce n'était pas signé mais Catherine n'avait aucun besoin "de signature.
Elle froissa le papier en boule dans sa main et le fourra dans son aumônière.
Tout à coup, elle respirait mieux. Le poids d'angoisse qui l'étreignait depuis la veille s'allégeait. Une lueur d'espoir lui venait de sauver bientôt son amie.
Quand elle songeait à la frêle et délicate Odette, jetée au fond d'un cachot par ce froid, chargée de chaînes, pleurant de peur et de désespoir, elle s'affolait. Mais, grâce au ciel, cette nuit même, elle pourrait implorer la pitié de Philippe, arracher la liberté de son amie ! Les nausées qui l'avaient torturée toute la journée, la sensation de glace infiltrée dans ses veines, tout cela s'estompa en songeant à cette perspective. Et puis, cette nuit, il y aurait Philippe... l'amour de Philippe, ses mains douces, ses mots tendres !
Aussi Catherine était-elle presque gaie quand la litière d'Ermengarde la déposa rue de la Parcheminerie.
Le jeune La
la- Mer. Une fois pour toutes, Abou-al-Khayr avait mis à sa disposition ses deux esclaves nubiens dont la gigantesque présence et les visages, plus noirs que la nuit elle-même, mettaient en fuite les téméraires qui eussent tenté de s'attaquer à une femme ainsi escortée. Bien nourris, chaudement vêtus, les deux noirs muets valaient à eux seuls toute une troupe armée. Catherine le savait et pouvait ainsi se rendre, libre de toute crainte, aux rendez-vous de Philippe. C'était de beaucoup la solution la plus pratique.
Jean de La
— C'est gentil à vous d'être venue si vite, dame Catherine ! chuchota-t-il malicieusement. Il fait un froid de loup...
— C'est pour toi que je me suis hâtée. J'ai craint que tu ne pre
— Autrement dit, Monseigneur me doit des remerciements, conclut le page en riant. D'autant plus qu'il vous attend avec impatience.
— Comment est-il ?
La
— Comme tu es belle ! chuchota-t-il d'une voix étranglée par l'émotion...
et comme tu m'as manqué ! Quarante-cinq jours sans toi, sans ton sourire, sans tes lèvres. Mon amour... quelle éternité !
— Puisque je suis là, dit Catherine souriante en lui rendant son baiser, il faut oublier tout cela.
— Tu oublies si vite les mauvaises heures ? Pas moi... Et, malgré l'envie violente que j'avais de te retrouver, j'ai hésité, tantôt, à t'imposer cette sortie nocturne. Tu étais si pâle à la chapelle ! J'ai bien vu que tu avais failli te trouver mal...
— Le froid ! Toi aussi, tu étais pâle...
Il l'était encore. Contre elle, Catherine sentait trembler le grand corps maigre. Elle ne voulait pas lui a
Il l'avait soulevée de terre, après l'avoir débarrassée de son ample manteau et l'emportait vers le grand lit sur lequel il l'assit. Puis, il s'agenouilla devant elle pour la déchausser, il ôta doucement les petites bottes de cuir noir, les bas de soie fine qui montaient jusqu'aux genoux. Un moment, il garda entre ses mains les minces pieds nus, posant un baiser sur chacun des ongles roses.
— Tu as froid, fit-il tendrement, je vais aviver le feu.
Trois troncs d'arbres empilés flambaient dans la cheminée, mais pour que les flammes fussent plus hautes et plus ardentes, le duc alla lui-même chercher une brassée de branchages dans un débarras voisin et les empila sur les rondins. Le feu bondit... Philippe revint alors à Catherine et commença à la dévêtir. Il apportait toujours un soin et une délicatesse extrêmes à lui ôter ses vêtements. Ses gestes, doux et caressants, étaient tout pleins d'une dévotieuse adoration. C'était une espèce de rituel lent, un peu sole
Lorsque, longtemps après, Catherine s'éveilla de la délicieuse torpeur où s'était noyé son corps, sa joue reposait sur la poitrine de Philippe. Mais lui ne dormait pas. Légèrement redressé sur un coude, il jouait avec la masse soyeuse des cheveux de sa maîtresse étalés sur la soie blanche des oreillers comme une nappe d'or pur dans laquelle jouaient les flammes. Voyant qu'elle avait les yeux ouverts, il lui sourit avec ce charme que prenait, dans le sourire, son long visage hautain, un peu sévère.
— Pourquoi est-ce que je t'aime autant ? Tu mets du feu liquide dans mes veines comme aucune autre ne l'a jamais fait. Dis-moi ton secret ? Es-tu sorcière ?
— Je suis seulement moi, fit Catherine en riant.
Mais Philippe était redevenu grave. Pensivement,
il la considérait avec une espèce de respect.
C'est vrai. Cela dit tout. Tu es toi... un être d'exception, moitié femme, moitié déesse... une entité rare et précieuse pour la conquête de laquelle des armées pourraient s'affronter. Il y a eu, jadis, une femme comme cela.
Pendant dix ans deux peuples se sont entr'égorgés parce qu'elle avait abando
— Quel joli nom ! s'écria Catherine. Qu'est-ce que cela veut dire ?
Philippe la reprenait dans ses bras, la ramenait contre lui et la faisait taire d'un baiser.
— C'est encore une histoire de l'Antiquité. Je te la raconterai un autre jour...
— Pourquoi pas maintenant ?
— Devine..., fit-il en riant.