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— Que veux-tu dire ? fit-il avec fureur, quelles amours ?

— Celles que je n'aurais jamais dû quitter : le duc Philippe. Je vais partir, moi aussi, Arnaud de Montsalvy, je vais rentrer chez moi, en Bourgogne, retrouver mes terres, mes châteaux, mes joyaux...

— Et la réputation d'une femme perdue ?

— Perdue ? (Elle eut un petit rire bref, infiniment douloureux.) Ne suis-je pas déjà perdue ? Penses-tu que je vais demeurer ici, enfermée dans ce château croulant, à user ma jeunesse, ma beauté, à contempler le ciel, à prier auprès de ta mère, à m'occuper de bo

Non ! Si tu l'as cru, tu t'es trompé, Monseigneur ! Je vais repartir chez moi... et j'emmènerai mon fils.

— Non !

La voix d'Arnaud avait porté si loin qu'une des sentinelles arpentant lourdement la tour voisine s'arrêta, interdite, la lance en arrêt... cherchant d'où venait ce cri. Plus bas, alors, mais avec une farouche détermination, il reprit :

— Non, Catherine. Tu ne partiras pas... Tu resteras ici, de gré ou de force !

— Pendant que tu t'en vas avec l'autre ? Tu es fou, je pense ? Je ne resterai pas une heure de plus. Avant que le soir tombe, j'aurai quitté ce château de malheur avec mes gens, avec Sara et Gauthier... et avec mon enfant !

Sa voix se fêla sur le dernier mot. Elle imaginait déjà ce départ, le pas des chevaux réso

— Ainsi, ajouta-t-elle, tu n'auras pas à quitter ton poste, tu pourras demeurer ici, entre ta mère et cette... et tu ne seras pas obligé de forfaire à l'ho

— En quoi ? fit Arnaud sèchement.

— En abando

Si Catherine tremblait de tous ses membres en parlant, Arnaud, plus que jamais, semblait une statue d'acier. L'ombre du casque dissimulait suffisamment son visage pour que Catherine ne vît pas le désespoir qui habitait les yeux. Il recula de quelques pas pour être encore moins visible.

— Écoute-moi, Catherine, dit-il, et sa voix semblait venir de très loin. Que tu le veuilles ou non, tu es dame de Montsalvy, tu es la mère de mon fils et jamais un Montsalvy ne passera en Bourgogne. La fidélité est un devoir sacré.

Sauf envers sa propre femme ! ricana douloureusement Catherine. Tu me laisserais repartir, peut- être, s'il n'y avait que moi. Mais tu es assez lâche pour te servir de mon enfant, pour m'obliger à demeurer ta captive, ta captive malgré moi, malgré tout, malgré ta trahison... Et tu veux que je demeure ici, seule, abando

Soudain, la douleur l'emporta sur la colère. Elle courut à son époux, entoura de ses bras le torse vêtu de fer, posant sa joue brillante de larmes contre la froide et lisse surface de l'armure.





— C'est un cauchemar, dis, c'est un mauvais rêve dont je vais me réveiller ? Ou alors tu veux m'éprouver pour voir si je te suis réellement fidèle ? Oui, c'est sûrement cela ? Cette fille t'a exaspéré avec ses calomnies et tu as voulu savoir...

Mais, tu sais, n'est-ce pas, tu sais que je t'aime ? Alors... par pitié, cesse de me torturer, cesse de me faire du mal... Tu vois bien que j'en meurs. Sans toi ma vie n'a plus de sens, je suis plus perdue qu'un enfant au cœur de l'orage et de la nuit. Aie pitié de moi, reste avec moi !... nous nous sommes trop aimés pour qu'il n'en reste rien !...

Sous sa tête, elle entendait battre le cœur, priso

A quoi bon tenter de réveiller ce qui n'est plus, Catherine ? Je n'y peux rien, et toi non plus... Nous n'étions pas faits l'un pour l'autre. Maintenant, écoute mes paroles, ce sont les dernières. Je n'abando

— Tout ce qui te gêne ! cria Catherine en qui la colère revenue se mêlait à une atroce déception. Mais tu ne pourras rien pour me retenir, ni toi ni tes pareils. A peine auras-tu tourné les talons que je partirai... et le nom de Montsalvy brillera bientôt à l'armoriai de Bourgogne, tu m'entends, de Bourgogne ! J'apprendrai à Michel à haïr les Armagnacs, j'en ferai, plus tard, un page du duc Philippe, un soldat de Bourgogne qui ne co

— Je saurai bien t'en empêcher, même absent ! gronda Montsalvy.

— Perso

— Gardes !

Le mot claqua et soudain les deux époux, dressés l'un en face de l'autre, ne furent plus que deux e

— Conduisez Mme de Montsalvy dans sa chambre. Elle ne devra en sortir sous aucun prétexte. Faites bo

Cette parole, je ne la do

Très droite, la tête haute, elle fit demi-tour et, sans ajouter un regard ou un mot, se dirigea vers l'escalier, ses gardes sur les talons. Tous ses mouvements étaient automatiques. Elle allait comme dans un songe, l'esprit enveloppé de brume, les yeux brûlants et la tête lourde. Elle avait la curieuse impression d'être un condamné à mort que l'on vient d'exécuter et qui, mort cependant, redescend les marches de son échafaud... L'immensité du désastre qui la frappait était telle qu'elle ne parvenait pas à le mesurer totalement. Elle était seulement accablée, hébétée... Plus tard quand ce bienheureux engourdissement prendrait fin, la souffrance, elle le savait, se réveillerait plus brûlante. Pour l'instant, la colère, l'indignation, un vague dégoût s'y mêlaient et, en quelque sorte, l'adoucissaient.

En franchissant le seuil de sa chambre, elle s'arrêta. Sara, debout auprès du berceau de Michel, se retourna et, la voyant si pâle dans le cadre de la porte, entre ces hommes d'armes assez embarrassés de leur perso

— Catherine ! Par le sang du Christ...

La jeune femme ouvrit la bouche pour dire quelque chose, tendit les bras dans un geste d'appel pitoyable... Une vague de chaleur montait à son cerveau, l'enflammait... Elle avait chaud, tout à coup... Tout brûlait dans sa tête. Soudain, une douleur la vrilla et, avec un faible cri, elle s'écroula aux pieds de Sara, tordue par une terrible crise nerveuse. Les yeux révulsés, grinçant des dents, une mousse légère au coin des lèvres, les bras et les jambes s'agitant spasmodiquement, elle se roula sur le dallage froid, à la grande terreur des hommes d'armes qui, oubliant leur mission, s'enfuirent en courant. Elle n'entendit pas le cri d'épouvante de Sara, elle ne vit pas Gauthier entrer comme une bombe dans la chambre, ni accourir les autres serviteurs du château... Elle était aux prises avec une si terrible souffrance physique que la conscience s'en était allée et que, du moins, la notion de son amour détruit était pour le moment écartée. C'était peut-être une forme de la miséricorde divine, mais, en tentant de porter secours à Catherine, Sara sentait que le calvaire ne faisait seulement que commencer.