Добавить в цитаты Настройки чтения

Страница 47 из 105

Faites reculer votre cheval, je vais dire qu'on ouvre la porte de la cour.

Faites excuses, M'dame, bredouilla l'arrivant avec un accent berrichon réjouissant. Je n'savions point. C'est Robin, vot'métayer de Bois Patuyau, qui m'envoie à sa place, vu qu'il s'a entamé un genou et moi j'suis...

— C'est bon, c'est bon, fit Macée d'un ton mécontent. Faites reculer votre animal. Vous voyez bien qu'il incommode la compagnie.

En effet, l'escorte de la dame de La Trémoille, les gardes en velours bleu et rouge s'étaient écartés avec dédain du pseudo-rustre et c'était sans doute ce qui avait sauvé l'imprudent capitaine d'être reco

La question, à peine formulée, fit monter aux pommettes de la jeune femme une vague de sang. Là, dans la rue, une servante ouvrait la porte de la cour et Xaintrailles, traînant les pieds comme un vrai paysan, faisait tourner son attelage.

Incapable de se retenir, Catherine empoigna sa robe à deux mains et quitta le réduit en courant, sans plus s'occuper de ce qui se passait au-dessous. Elle traversa la grande salle, sortit sur la galerie de bois qui dominait la cour intérieure dont, à cette minute précise, Xaintrailles et son chariot franchissaient le portail. Il aperçut la jeune femme et lui sourit. Ce sourire entra dans le cœur de Catherine comme un rayon de soleil dans une pièce froide et close. Le capitaine n'eût pas eu ce sourire s'il était arrivé malheur à Montsalvy.

Au fond de la cour, la vieille Mahaut, la servante des Cœur, chassait la volaille vers le courtil à coups de torchon tandis que Sara aidait Macée à ouvrir la porte d'une grange devant la charrette. Au portail, Gauthier et un valet refermaient le vantail. Quand Catherine arriva dans la cour, Xaintrailles venait de faire entrer son attelage dans la grange. Catherine s'engouffra derrière lui et rejoignit Macée et Sara. Le capitaine ne la regarda même pas.

— Vite ! lança-t-il. Aidez-moi !

Il empoignait déjà les fagots, les jetait au hasard avec une hâte insolite.

— Qu'y a-t-il dans cette charrette ? demanda Catherine.

— Ne posez pas de questions stupides ! Que voulez-vous qu'il y ait ?

Avec un cri, elle se jeta à son tour sur les fagots. Ils recouvraient une sorte de caisse à claire-voie qui tenait tout le fond du véhicule, mais, comme Catherine tendait les mains vers les lattes de bois, Xaintrailles l'écarta rudement, la jetant presque dans les bras de Sara.

— J'aurais préféré qu'elle ne le voie pas tout de suite, grommela-t-il. Il n'est pas beau à voir ! Il n'était que temps...

A pleins poings, sans prendre garde aux menues échardes qui écorchaient ses mains, il arrachait maintenant le dessus de la caisse. Une forme humaine d'une effroyable saleté, un visage blême et maigre mangé d'une barbe noire, aux yeux clos, aux traits ravagés, apparut. Si semblable dans sa tragique immobilité à un cadavre que Catherine, avec un hurlement sauvage, s'arracha des bras de Macée et alla s'abattre sur le corps inerte en sanglotant.

— Arnaud !... Mon Dieu ! Arnaud... Qu'ont-ils fait de toi ?...

Elle était tellement persuadée d'étreindre un corps privé d'âme qu'il fallut que Xaintrailles détachât Catherine de force.

Il a besoin de soins immédiats, Catherine. Pas de larmes. Avez-vous une chambre où le mettre, dame Macée ?

Il y a la mie

— C'est bon ! Voyez si la route est libre.





Xaintrailles venait de prendre dans ses bras le corps

de son ami et l'enlevait sans effort apparent. Arnaud laissa aller sa tête contre l'épaule du capitaine. Il semblait ne rien voir, ne rien entendre. On eût dit un grand pantin disloqué dont les ficelles cassées ne commandaient plus les mouvements. Les yeux gros de larmes retenues à grand-peine, Catherine noua ses mains devant sa bouche et y planta ses dents.

— Il va mourir !... murmura-t-elle. Il va mourir !

J'espère que non ! gronda Xaintrailles. J'ai fait aussi vite que j'ai pu. Ouvrez cette porte.

Peut-être, hasarda Sara, vaudrait-il mieux attendre que la dame de La Trémoille ait quitté cette maison...

Mais elle s'interrompit parce que le capitaine tournait vers elle un visage soudain convulsé de rage.

— Il n'y a pas une minute à perdre, vous m'entendez ? Quant à cette putain rouquine, si je la trouve devant moi, je l'étrangle. J'en jure l'épée de mon père et l'ho

Au même instant, la porte s'ouvrit, poussée par Gauthier dont l'imposante silhouette emplit tout l'espace. Ses yeux pâles allèrent de Xaintrailles avec son fardeau à Catherine en larmes, revinrent au capitaine.

— Do

Dans les bras du géant qui l'enlevèrent sans peine, Arnaud, inconscient, avait l'air d'un enfant. Gauthier l'emporta à grands pas à travers la cour. Une pluie fine s'était mise à tomber et le ciel déjà sombre a

— Restez là, Catherine, n'y allez pas maintenant !

Mais elle n'entendait rien, rien que ce sourd grondement intérieur, cette voix désespérée qui répétait inlassablement « il va mourir... il va mourir ». Cela emplissait ses oreilles d'un bruit d'orage et son cœur semblait battre au rythme de ce refrain désespéré. Elle arriva en haut hors d'haleine, aperçut le large dos de Gauthier qui posait Arnaud sur le lit et voulut entrer dans la chambre. Mais elle se heurta à Sara qui, les yeux pleins de larmes, tenta de lui barrer le passage.

Laisse-nous d'abord nous occuper de lui, ma petite, dit la zingara doucement. Il est bien mal en point et, dans ton état...

— Qu'importe mon état, riposta Catherine les dents serrées. Qu'importe l'enfant si Arnaud agonise ! C'est à moi qu'il appartient, tu entends ? À moi seule ! Perso

À regret, Sara écarta sa haute silhouette, livrant passage à Catherine. Elle hocha la tête, murmura :

— Je ne sais trop s'il souffre. Il est inconscient bien qu'il ouvre les yeux. Il ne reco

Rassemblant son courage, Catherine se raidit contre la vague de chagrin qui s'enflait en elle. Il ne fallait pas qu'elle se laissât aller... pas maintenant ! Il fallait qu'elle fût brave, qu'elle osât regarder en face la vérité quelle qu'elle fût ! Une voix secrète lui soufflait qu'à ce prix-là seulement elle pourrait sauver Arnaud ! Comme elle avait coutume de le faire quand elle avait besoin de tout son sang-froid, elle serra ses mains l'une contre l'autre et s'avança vers le lit devant lequel s'affairait la vieille Mahaut.

Sur son chemin, elle trouva Gauthier. Le Normand se tenait au milieu de la pièce et la regardait approcher avec, dans ses yeux clairs, une étrange expression où se mêlaient la colère et la douleur. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais se ravisa, secoua ses épaules massives et se dirigea vers la porte sans se retourner. Catherine n'avait pas prêté attention à lui. Elle ne voyait qu'Arnaud et la silhouette voûtée de la vieille Mahaut qui se penchait sur lui.

— Dans quel état, doux Jésus ! Dans quel état il est, le pauvre seigneur ! se lamentait la nourrice.