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Tous deux se retournèrent vers la porte où Macée se tenait, toute droite et paisible en apparence. Malgré elle, Catherine se sentit rougir. Depuis combien de temps la jeune femme était-elle là ? Avait-elle vu son mari embrasser la réfugiée ?

Rien dans son comportement ne le laissait supposer et, sans doute, Macée arrivait-elle tout juste. Pourtant Catherine se sentit coupable et, presque à son corps défendant, baissa les yeux.

Je disais à maître Jacques combien j'avais regret de vous mettre en péril, Macée. Je le priais de me laisser partir.

La jeune femme fit un pas dans la pièce et sourit.

— Je suis certaine qu'il a tout fait pour vous rassurer. Chez nous, l'hôte est l'envoyé de Dieu et, comme tel, il est sacré.

Et puis, où iriez-vous, dame Catherine ? Allons, Jacques, descendez. Elle s'impatiente.

L'arrivée soudaine de Macée avait atténué la gravité de ce qu'elle venait a

Pâlissant soudain, elle se tourna vers le pelletier.

— Vite, maître Cœur, je vous en supplie... Il ne faut pas lui do

— Je sais, répondit Jacques Cœur. J'y vais.

Macée et Catherine demeurèrent seules, face à face

et silencieuses. Elles ne se regardaient pas, mais, d'un commun accord, elles tendaient l'oreille pour saisir les bruits venant du rez-de-chaussée. Elles n'attendirent pas longtemps. Il y eut le pas ferme, un peu lourd, de Jacques descendant l'escalier, puis, aussitôt, une voix de femme haut perchée qui l'interpellait. Catherine de La Trémoille n'avait jamais pris la peine, tout au long de sa vie chaotique et malsaine, de baisser le ton. Où qu'elle allât, on l'entendait sans peine sur plusieurs toises. Macée et Catherine n'eurent aucun mal à suivre la conversation.

— Maître Cœur, disait la femme du Grand Chambellan, d'où vient que je n'aie point encore reçu ces zibelines que je vous ai demandées ? Le froid arrive et vous savez que je ne peux supporter les fourrures grossières.

— Il me semblait vous avoir prouvé, Madame, que je ne les supportais pas plus que vous-même. Quant aux zibelines, si je ne les ai point encore livrées cela vient non de ma volonté, mais des malheurs de ce temps. Les caravanes de marchands qui, de Novgorod-Veliki, venaient jusqu'à la foire de Chalons n'atteignent plus notre pays. Elles gagnent Londres ou s'arrêtent à Venise.

— Alors, allez les chercher à Venise...

— Nous n'en avons plus les moyens, Madame. Le pays est exsangue, il n'y a plus de navires et les nefs qui relient Venise à Bruges évitent nos ports. Quant à aller à Bruges, vous savez mieux que perso





Le soupir que poussa la dame fut si puissant qu'il parvint aux deux femmes. Les nerfs de Catherine se tendaient jusqu'à lui faire mal. Entendre ainsi, à deux pas d'elle, la voix de cette femme que, de toutes ses forces, elle haïssait, était une rude épreuve. Instinctivement, elle fit trois pas vers la fenêtre, laissant son regard errer au-dehors. Cependant, en bas, la dame de La Trémoille disait d'un ton excédé :

— Eh bien, il me faudra me contenter de ce que vous aurez. Venez donc au palais me montrer vos plus belles peaux.

Ou plutôt, puisque me voici chez vous, montrez-les-moi maintenant. Vous ferez porter chez moi ce que j'aurai choisi.

— Comment se fait-il que nous ne l'ayons pas entendue arriver ? chuchota Catherine, les yeux sur la troupe de cavaliers et de dames d'ho

— Vous étiez trop absorbée, fit la voix douce de Macée sans que Catherine pût démêler si une intention s'y cachait.

Vous ne pouviez pas entendre. Mais je n'aime pas que cette femme s'attarde ici. Elle a des yeux aigus et des oreilles qui entendent tout...

— Et ma présence ici n'arrange rien, fit Catherine amèrement. Si elle pouvait se douter.

— Nous ne risquons guère plus à vous cacher qu'à offrir asile à maître Alain Chartier, repartit calmement la femme de Jacques. Et, de nos jours, peut-on jamais savoir si l'on est à l'abri d'une dénonciation... vraie ou fausse. Vous devriez remonter chez vous, Catherine.

La jeune femme secoua la tête. Il fallait qu'elle fût là, à deux pas de son e

Tout à coup, son regard distrait se fixa, se fit attentif. Venant de la porte d'Auron, un chariot attelé d'un gros cheval paresseux remontait la rue et s'arrêtait devant la maison des Cœur. C'était une de ces charrettes paysa

En vérité, c'était un charroi bien ordinaire et qui n'avait rien qui pût attirer l'attention... sinon peut-être son conducteur. À

le considérer, assis sur une traverse de l'avant, genoux écartés et jambes pendantes, le dos rond et les épaules larges sous une misérable souque- nille de futaine rapiécée, Catherine eut la sensation aiguë de le co

— Regardez, dit-elle. Est-ce que vous le reco

A son tour, la jeune femme pâlit.

— Seigneur ! fit-elle en joignant les mains, il n'est que trop reco

Puis, comme le faux paysan descendait de son siège improvisé dans l'intention visible de pénétrer dans le magasin, Macée, galvanisée par le danger, partit comme une flèche. Catherine l'entendit dégringoler quatre à quatre le petit escalier. Elle dut traverser le magasin à toute allure car, presque aussitôt, Catherine la vit surgir dans la rue. Il était temps, Xaintrailles, ignorant du danger qui l'attendait dans la boutique, allait y entrer. Catherine vit l'épouse de Jacques se planter devant lui, levant bien haut sa petite tête sommée d'une haute coiffe cornue pour que l'on ne vît pas, de l'intérieur, la figure de l'arrivant. Elle l'entendit s'écrier :

— A quoi pensez-vous, brave homme ? Ce n'est point au magasin que l'on rentre les fagots, mais bien dans la resserre.