Добавить в цитаты Настройки чтения

Страница 15 из 105

Elle s'éveilla en sursaut, vit qu'il faisait nuit maintenant, mais que des centaines de cierges brûlaient devant l'autel qu'ils enveloppaient d'une gloire dorée. Là-haut, dans la tribune, des voix profondes chantaient le Miserere.La foule reprenait en chœur. Sara, qui priait auprès de Catherine, tourna les yeux vers elle. Mais son regard franchit la tête de la jeune femme et brilla soudain. Elle se leva.

— Viens, dit-elle. On nous attend...

Sur le parvis, Catherine et Sara retrouvèrent Gauthier et Anselme l'Argotier qui les attendaient. Le ciel bleu de la journée s'était chargé avec le crépuscule de lourds nuages d'orage. Hors des murs de la cathédrale, la chaleur était accablante. S'y mêlait l'odeur lourde des fumées. Un peu partout, on brûlait des herbes aromatiques et même des parfums en même temps que les cadavres. Toute la ville sentait l'encens et la mort, mais un silence de tombeau l'enveloppait comme un suaire, si profond que Catherine, impressio

— Où allons-nous ?

— Au quartier des ta

La petite troupe quitta l'ombre blanche de la cathédrale pour s'enfoncer dans le dédale des vieilles rues. Parfois, en passant devant une porte, on surprenait au vol des bribes de prière ou bien l'écho d'un sanglot.

Bientôt, on fut en bas de la colline, près de la rivière le long de laquelle s'alignaient les ta

Anselme, qui marchait en tête, l'oreille au guet, s'arrêta auprès d'un petit pont en dos d'âne et désigna, un peu plus loin, la porte étroite creusée dans la muraille de la ville, et, bien entendu, soigneusement fermée.

— La poterne Tire-Veau ! chuchota-t-il. La grille est en dessous !

En effet, sous la poterne, un bras de la rivière traversait une grille épaisse pour gagner le fossé.

— Il faut descendre dans l'eau, dit Gauthier. Je vais desceller un barreau pour que nous puissions passer.

Heureusement, la poterne n'est pas gardée. La muraille est trop haute à cet endroit.

Anselme sortit quelque chose de long de ses vêtements et le lui tendit.

— Voilà la lime. Maintenant, bo

— Vous ne venez pas avec nous ? s'éto

Elle devina plus qu'elle ne vit le sourire et la pirouette de l'étrange bonhomme.

— Non, belle dame, encore que j'en aie eu envie. Mais j'ai mes habitudes ici.

— Mais... La peste ?

— Bah ! La peste passera ! Et j'espère bien être au nombre des survivants.

Un salut profond et déjà il s'éloignait, remontant la ruelle à grands pas silencieux. Gauthier était descendu dans l'eau et Catherine pouvait entendre le bruit léger de la lime attaquant le barreau. Heureusement, une petite chute d'eau, tout auprès, en couvrait la majeure partie, mais elle ne put s'empêcher de frisso

Catherine n'avait rien dit à Sara de son aventure de l'après-midi. Elle en éprouvait une gêne, comme d'une action honteuse, et puis, pour rien au monde, elle n'aurait voulu lui raconter ce qui s'était passé entre elle et le Normand. Sara aurait poussé les hauts cris, juré qu'elle s'y attendait et que Catherine avait eu une fière chance d'être respectée par lui.

Pourtant, de cette expérience, la jeune femme sortait réconfortée, rassurée même. Elle avait acquis la certitude que Gauthier l'aimait. Mais elle avait également mesuré l'étendue de son pouvoir sur lui et la scène de tout à l'heure demeurait entre eux comme un secret commun. Jamais elle n'en parlerait à quiconque ! Peut-être, parce qu'un instant elle avait éprouvé la fugitive tentation de s'abando





Au bout d'une heure, Gauthier, haletant et trempé, remonta sur la berge. Un barreau, coupé et tordu, laissait un passage suffisant. Son regard fit le tour du petit quai, toujours aussi désert, revint aux deux femmes.

— Vous savez nager ?

Toutes deux hochèrent affirmativement la tête, encore qu'il y eût bien des a

— Que fais-tu ? chuchota Sara scandalisée. Tu ne penses pas...

— Me déshabiller ? Si. Je vais faire un paquet de mes vêtements et les porter sur ma tête. C'est la seule façon de ne pas les mouiller.

— Mais... Cet homme ? ajouta la gitane avec un regard inquiet en direction de Gauthier qui était déjà redescendu dans l'eau.

Catherine haussa les épaules.

— Il a mieux à faire qu'à me regarder ! répliqua-t-elle. Tu devrais bien en faire autant.

— Moi ? Plutôt mourir...

Et Sara, dignement, se laissa glisser à l'eau tout habillée. L'instant suivant, Catherine s'y coulait à son tour. Son corps n'avait brillé que le temps d'un éclair sur la berge et elle avait fait de ses vêtements un gros paquet retenu sur sa tête grâce aux lacets de la robe. La fraîcheur de l'eau lui parut délicieuse. Elle s'y étendit avec bonheur et se laissa porter vers la grille où attendait Gauthier. La forme mince de la jeune femme s'insinua sans peine dans la brèche ouverte. Dans l'eau, elle faisait une grande tache claire, confuse mais pleine de grâce que l'onde un peu trouble habillait à peine. C'était peut-

être pour éviter de subir son charme que Gauthier, quand Catherine passa près de lui, avait fermé les yeux. Il ne les rouvrit que lorsqu'un léger bruit de roseaux froissés lui apprit que la jeune femme avait trouvé un abri contre les regards indiscrets.

Une semaine plus tard, peu avant le coucher du soleil, Catherine, Sara et Gauthier Malencontre arrivaient en vue du château de Champtocé et s'arrêtaient un moment pour contempler le spectacle. C'est qu'aussi la plus puissante forteresse de l'Anjou valait la peine d'être regardée. Onze tours formidables sur lesquelles flottait une longue ba

— Allons-nous-en ! souffla-t-elle comme si même le son de sa propre voix l'effrayait.

— Non, dit Catherine doucement mais fermement. C'est ici que je dois retrouver Arnaud, c'est ici que je dois aller.

— Tu vois bien que la reine Yolande n'est pas là. Son étendard serait sur le château et je n'y vois pas la moindre ba

— Pourtant, intervint Gauthier, j'y vois des fleurs de lys.

Mais Catherine, qui fixait le château d'un air préoccupé, hocha la tête.

— Quand il l'a nommé maréchal de France, le roi Charles a accordé permission à messire de Rais de porter à ses armes une bordure fleurdelysée. Les autres ba

Et, résolument, la jeune femme poussa sa mule en direction de la grosse barbacane qui défendait le grand pont de la forteresse. Les autres durent suivre, bon gré, mal gré. Ces mules étaient, comme une bo