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Déjà les deux bourreaux empoignaient Catherine, mais La Trémoille, qui allait sortir, s'était arrêté quand la fausse Tzigane avait frappé sa femme. Avec une curiosité qui n'était pas exempte de plaisir, il avait suivi leur affrontement et, même, s'était baissé pour tremper son doigt dans le liquide répandu à terre et l'avait flairé... Il s'interposa.

— Un moment, voulez-vous ? Cette femme m'a été do

Catherine retint avec peine un soupir de soulagement, mais la dame reporta sur son époux sa colère ; et les poings serrés marcha vers lui.

— Elle m'a insultée, frappée, cette chie

— Je n'hésite pas. Elle sera punie... mais en temps voulu. Pour le moment, contentez-vous de la faire jeter au cachot. Il y a certaines choses que j'aimerais éclaircir.

— Quoi encore ?

— Par exemple... Ce qu'il y avait dans ce flacon dont la perte semble vous causer une si grande peine.

— Cela ne vous regarde pas !

— Ce n'en est que plus intéressant. Allons, vous autres, mettez cette femme au cachot. Et souvenez-vous que nul ne doit y toucher sans mon ordre formel. Vous m'en répondez sur votre vie.

— Que de précautions, siffla la comtesse haineuse mais domptée, on dirait, Dieu me pardo

— Dieu ne se soucie pas de vous, ma chère, pas plus que vous ne vous souciez de lui. Quant à cette femme, certes, elle m'est précieuse.

N'a-t-elle pas voulu vous nuire ? Pour expliquer sa haine il doit y avoir une raison

bien forte. Je vous aime trop pour ne pas chercher à la co

Il lui offrit la main avec, dans sa barbe, un sourire à la fois moqueur et ironique. Catherine pensa que, peut- être, le gros chambellan avait tout à coup moins peur de sa femme que de coutume. Il venait de découvrir une arme contre elle et, apparemment, entendait bien s'en servir. Ils se dirigeaient vers la porte, étrange couple lié par les chaînes solides de la cupidité et de la haine mieux que par le plus tendre amour, fantômes maléfiques échappés d'un cauchemar. Et elle songea que le pire des châtiments serait peut-être de les enfermer ensemble dans une étroite pièce, le chacal avec la hyène, et de les y laisser s'entre-déchirer durant une éternité... Quelle damnation vaudrait ce tête-à-tête ?

Mais elle n'eut pas le temps de les voir disparaître. L'un des bourreaux avait abattu sur son épaule sa grosse patte velue, serrée dans un poignet de cuir, et l'entraînait vers le fond de la salle de tortures.

— C'est par ici, la belle !

Cependant, son compagnon détachait le corps inerte de Fero qui glissait à terre avec un bruit mat. Catherine sentit une larme piquer ses yeux. Cet homme l'avait aimée, cette chair suppliciée avait vibré, chaude et vivante, contre la sie

En imaginant la douleur de Tereina, un sanglot monta de la poitrine de Catherine, creva sur ses lèvres. L'homme qui l'entraînait se méprit sur sa signification.

— Il est bien temps de pleurer maintenant que tu as signé ton arrêt de mort, pauvre idiote ! Quelle mouche t'a piquée de t'attaquer à cette femme terrible ?

Et, comme Catherine ne répondait pas, il hocha sa grosse tête, si dépourvue de cou qu'elle paraissait posée directement sur les massives épaules.

Ça me fera peine de te tourmenter parce que c'est dommage d'abîmer une belle fille comme toi. Mais il est probable qu'elle te fera payer cruellement ce que tu lui as fait.

— Que peut-elle faire d'autre que me tuer ? fit Catherine méprisante.

— Il y a tuer et tuer. J'aimerais bien n'avoir qu'à te pendre, mais elle ne se contentera pas de ça. Enfin... je tâcherai d'être maladroit pour que ça ne dure pas trop longtemps.



L'intention de l'homme était bo

— Merci, dit-elle seulement.

Au sortir de la salle basse, le tourmenteur et sa priso

L'une d'elles était ouverte. L'homme y poussa Catherine qui se trouva dans un cachot étroit et humide. Une cruche verdie et un tas de paille moisie composaient tout le mobilier avec une paire de bracelets de fer reliés au mur par deux chaînes rouillées. Un peu de jour pénétrait dans cette cave par un soupirail, à peine large comme la main et placé trop haut pour que l'on pût l'atteindre. Sans doute à ras du sol, car un peu d'eau boueuse en dégouttait.

— Te voilà chez toi, dit le bourreau. Do

Elle les tendit sans résistance. Les lourds bracelets de fer claquèrent autour des fragiles poignets que l'homme, un instant, garda dans les sie

— Tu as de jolies mains, dit-il, des mains de dame... Oui, c'est bien dommage. Il y a des jours où mon métier est bien triste.

— Pourquoi le faites-vous, alors ?

La face plate du bourreau prit un air de naïve surprise tandis qu'une sorte de sourire découvrait ses dents jaunes.

Mais... parce que je n'en co

Avec une horreur dont elle ne fut pas maîtresse, Catherine fixait les taches de sang encore frais qui maculaient le torse épais de l'homme.

Il s'en aperçut, ébaucha un sourire gêné.

— Allons, je ne veux pas te faire peur. Tu me prendrais pour une brute. Tâche de dormir, si tu peux.

Craignant de l'avoir froissé et désireuse de ne pas s'en faire un e

— Comment vous appelez-vous ?

— C'est gentil de le demander. C'est pas souvent que ça m'arrive, tu sais. On m'appelle Aycelin le Rouge... oui, Aycelin. Ma mère disait que c'était un joli nom...

— Elle avait raison, dit Catherine gravement. C'est un joli nom.

Les yeux de Catherine s'accoutumèrent assez rapidement à l'obscurité de son cachot. Si mince que fût le soupirail, il permettait au moins de séparer le jour de la nuit et de distinguer les choses qui l'entouraient. La priso

Assise sur la paille pourrie de sa prison, elle laissa les heures couler sur elle. Ses mains enchaînées lui permettaient tout de même tous les mouvements malgré le poids des bracelets et elle s'aperçut bientôt qu'elle pourrait peut-être, en forçant un peu, les faire glisser de ses poignets. Ses mains étaient si menues, si minces... Mieux valait pourtant, pour le moment, ne pas essayer car ce ne pourrait être qu'au prix d'une douleur qui ne permettrait sans doute pas de réintégrer les fers.

Autre sujet de satisfaction, elle n'avait pas été fouillée et la dague était toujours là, rassurante et solide au creux de sa gorge. Béni soit Dieu qui l'avait empêchée de la tirer tout à l'heure. On la lui aurait arrachée et elle ne l'aurait plus jamais retrouvée. Grâce à elle, Catherine était sûre d'échapper aux tourments que la comtesse devait méditer pour elle. Un coup rapide et tout serait dit. Elle ne hurlerait pas de souffrance sous l'œil moqueur de son e