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— Hé ! la fille ! Viens un peu ici !

Ni pour or ni pour argent Catherine n'aurait pu faire un pas. Elle était comme pétrifiée. Seuls ses yeux chargés de colère vivaient encore, mais, derrière son épaule, elle sentait trembler Chryssoula. L'une des jeunes suivantes dut reco

— Oh ! Je vois ! Encore une de ces filles de joie dont mon époux fait ses délices ! Grand bien lui fasse s'il aime à ce point s'encanailler !

Et la troupe brillante s'engouffra dans le logis royal sans plus s'occuper de Catherine. La vieille se mit à la tirer si vigoureusement qu'enfin elle bougea, se laissant mener sans résistance vers le donjon, et songeant avec rage que le jour où elle abattrait La Trémoille, elle trouverait le temps de s'occuper de sa femme.

Elle allait franchir, avec sa gardie

— Voilà des jours que j'erre autour de ce château, que j'entre dans cette cour parce que j'espérais te revoir, avoir de tes nouvelles ! Et je te revois !

— Va-t'en, Fero, s'écria-t-elle. Tu ne dois pas rester ici ! Les Tziganes n'ont pas le droit d'entrer ici sans permission. Si tu étais pris...

— Cela m'est égal ! Je ne pouvais plus vivre sans te revoir ! Le poison d'amour est en moi, Tchalaï, il brûle mon âme et mon sang... et c'est toi qui l'y as mis !

Il n'était pas possible de se tromper sur la passion qui flambait dans le regard du jeune bohémien. Catherine s'en épouvanta d'autant plus que la vieille Chryssoula faisait de vains efforts pour l'arracher des mains de Fero et poussait des cris inarticulés.

— Par pitié, va-t'en ! Si les gardes...

Elle n'avait pas plus tôt prononcé le mot qu'attirés par les cris de la vieille un peloton d'archers accourait. Chryssoula devait être co

— Je t'aime ! Tu es ma femme ! Je reviendrai.

En un instant, il avait disparu et Catherine, soulagée malgré tout, suivit docilement Chryssoula qui do



La poitrine de Catherine se dégonfla d'un seul coup en un énorme soupir. Ces quelques lignes effaçaient péremptoirement la phrase menaçante de Gilles de Rais. Pas un instant, la jeune femme ne mit en doute l'affirmation de Tristan. Il y avait, dans l'étrange écuyer du co

L'esprit plus libre, elle laissa couler sur elle les mortelles heures du jour. Sa porte ne se rouvrit pas avant que les ombres du soir n'eussent envahi la pièce. Chryssoula vint alors allumer les chandelles et porter un nouveau plateau qui, cette fois, ne contenait aucun message. Mais, lorsque Catherine eut terminé son repas, la vieille esclave, au lieu de se retirer, fut rejointe par sa sœur. Toutes deux entreprirent la toilette de Catherine. Elle fut lavée, parfumée, parée d'une robe de nuit de fine mousseline blanche qui n'enveloppait son corps que d'un léger nuage, puis soigneusement installée dans le lit dont les draps de toile avaient été changés pour des draps de soie pourpre.

Tous ces préparatifs firent frémir la jeune femme. Ils n'étaient que trop significatifs. On l'accommodait de la sorte pour être plus agréable aux goûts orientaux de son nouveau maître. Tout à l'heure, cette porte, par laquelle sortaient maintenant les deux femmes, se rouvrirait sur l'énorme et somptueuse perso

Des heures coulèrent sans que rien ne se produisit. Étendue sans bouger dans son grand lit, Catherine percevait vaguement les échos de la fête royale, des cris, des rires, des chansons à boire. La pieuse reine Marie, épouse de Charles VII, devait arriver prochainement de Bourges. Le Roi, apparemment, en profitait pour se distraire avant son arrivée avec ses compagnons de plaisir habituels... Catherine entendit crier la minuit, puis ce fut la relève des archers de garde.

Combien de temps lui faudrait-il attendre encore ? Les chandelles s'usaient déjà ; bientôt, elles s'éteindraient... La Trémoille, peut- être, était trop ivre pour avoir gardé le souvenir de son rendez-vous galant...

La jeune femme se berçait de cette agréable illusion quand elle sursauta, retenant un cri. La porte de sa chambre s'ouvrait doucement...

Une instinctive et muette prière monta de son cœur à ses lèvres, mais s'acheva bientôt. Ce n'était pas le Grand Chambellan, c'était une jeune fille couro

Un instant, elles se regardèrent, la belle adolescente debout au pied du lit, Catherine assise dans ce même lit, l'une avec une curiosité dédaigneuse, l'autre avec une surprise non déguisée. Enfin la jeune fille ouvrit la bouche :

— Lève-toi, ordo

— Moi ? Mais je dois attendre ici...

— L'arrivée de Monseigneur ? Je sais. Mais sache, à ton tour, fille d'Egypte, que, lorsque ma maîtresse ordo

La jeune fille sortit, laissant Catherine interdite et assez indécise.

Que lui voulait la dame de La Trémoille ? Que signifiait cet ordre, venu en pleine nuit, et qui risquait de détruire tous ses plans ? Devait-elle obéir ? Mais, sinon, comment refuser ?

Catherine décida qu'elle n'avait pas le choix, et qu'elle ne risquait peut-être pas grand-chose à savoir ce qu'on lui voulait. Pour l'orgueilleuse comtesse, elle n'était, après tout, qu'une fille d'Égypte promise aux plaisirs de son époux, moins qu'un chien ou un objet, un être dont, certainement, elle n'était pas jalouse. Les nombreux amants de Catherine de La Trémoille devaient la mettre à l'abri de ce genre de sentiment. Est-on jalouse d'une montagne de graisse ? Le couple n'était uni que par des goûts communs pour l'or, la puissance et la débauche.