Добавить в цитаты Настройки чтения

Страница 105 из 107

Le gamin s'éloigna en courant. Catherine réfléchit un moment. Il n'y avait pas de temps à perdre. Demain, après la messe sole

— Prenez les bêtes, mon frère, et allez sans moi jusqu'à l'Hôtel-Dieu où vous demanderez que l'on veuille bien nous do

Voilà de l'or pour payer notre écot. Quant à moi, je veux, dès maintenant, monter à la cathédrale, but de notre pèlerinage. J'ai hâte de remettre à Notre-Dame ce que je lui porte et il ne convient pas que j'approche à cheval du lieu saint. Allez sans moi. Je vous retrouverai plus tard.

Le digne Frère portier de Montsalvy se contenta d'un signe de tête pour montrer qu'il avait compris et, réunissant dans sa main les brides des deux mules, poursuivit tranquillement son chemin.

Lentement, Catherine monta la rue pavoisée où les enseignes étaient nombreuses : marchands d'objets de piété y côtoyaient les auberges, les rôtisseries, les échoppes de toute sorte et, assises devant leurs portes, sur des marches de pierre, des femmes, courbées sur des coussins couverts de fils ténus, faisaient voltiger de leurs doigts agiles des multitudes de petits fuseaux... Un instant, la voyageuse s'arrêta auprès de l'une de ces dentellières, qui était jeune et jolie et qui, tout en travaillant, lui sourit avec gentillesse. Elle n'eut pas été aussi profondément femme si les fragiles merveilles nées sous ces doigts de fée ne l'avaient attirée. Mais une procession de pénitents descendait de la cathédrale en chantant

à pleine voix les cantiques de la mort, et Catherine, rappelée à son vœu, reprit son ascension. Et, à mesure qu'elle montait, elle oublia peu à peu tout ce qui l'entourait...

Sur les degrés de l'immense escalier qui, là-haut, se perdait dans l'ombre des hautes arches romanes, des gens s'échelo

D'autres entouraient l'antique pierre des Fièvres, où chaque vendredi s'étendaient quelques malades, en criant que la veille encore, Vendredi saint, un perclus avait retrouvé l'usage de ses jambes. Mais Catherine ne leur prêta aucune attention.

Son regard était fixé sur une marche, située à la hauteur des grandes portes dorées du sanctuaire. Quelques mots écrits en latin s'y lisaient : « Si tu ne crains pas le péché, crains de toucher ce seuil, car la Reine du Ciel veut des serviteurs sans tache... » Approchait-elle vraiment sans péché, elle qui, au prix d'un mensonge, allait conquérir sa liberté ? Elle demeura un instant immobile, regardant l'inscription, le cœur étreint d'une angoisse subite. Mais l'élan qui la portait était trop fort pour s'arrêter là. Elle franchit les portes, continua son ascension dans l'ombre épaisse de l'église. Les degrés montaient en une sorte de tu

Le chœur était vide, mais, sur les murs, les perso

Lentement, elle plia les genoux, se laissa tomber sur les marches de l'autel, fascinée par l'étrange statue.

Petite, assise bien raide dans le cône d'or de son manteau cousu de pierreries, la Vierge Noire avait l'aspect hiératique et terrifiant d'une idole barbare. On disait que les Croisés, jadis, l'avaient rapportée de Terre sainte, qu'elle était aussi vieille que le monde... Son noir visage lourd, à l'expression figée, luisait sous la couro

Le chant lugubre avait cessé. Le silence maintenant enveloppait l'église, troublé seulement par le brasillement léger des cierges.





Lentement, Catherine ôta le sachet de peau de son cou, en tira le diamant et, sur ses deux paumes rapprochées, le tendit vers la Vierge.

Le séculaire geste d'offrande fit étinceler de feux sanglants la pierre maudite. Jamais elle n'avait scintillé comme dans ce sanctuaire où s'étalait la grandeur de Dieu. Sur les mains de Catherine, c'était comme un noir soleil de mort tendu vers la divinité.

— Vierge toute-puissante, chuchota la jeune femme, acceptez cette pierre de douleur et de sang. Prenez-la contre vous afin qu'en sorte à jamais le démon qui l'habite, prenez-la pour que le malheur, enfin, s'éloigne de nous... pour qu'enfin le bonheur revie

Pour que je retrouve mon époux.

Doucement, elle posa la pierre aux pieds de la statue puis se prosterna, toute sa terreur envolée, mais bouleversée par une émotion nouvelle.

— Rendez-le-moi, supplia-t-elle douloureusement. Rendez-le-moi, Vierge miséricordieuse... Même s'il faut encore souffrir, même s'il faut peiner des jours et des nuits... Faites qu'au bout du chemin je le retrouve enfin ! Permettez qu'au moins je le revoie... une fois, rien qu'une seule fois... Que je puisse seulement lui dire que je l'aime, que je n'ai jamais cessé de lui appartenir et que perso

Elle enfouit son visage dans ses mains qui furent bientôt mouillées de ses larmes et demeura là un long moment, priant pour son enfant et pour Sara, pleurant doucement et attendant inconsciemment une réponse à sa brûlante prière. Et, soudain, elle entendit :

— Femme, ayez confiance ! Si votre foi est grande, vous serez entendue.

Elle releva la tête. Devant elle, un moine en longue robe blanche se tenait debout, penchant vers elle sa tête grise et son visage illuminé de douceur. Une telle paix émanait de cette blanche silhouette que Catherine, subjuguée, demeura devant lui agenouillée, les mains encore jointes comme devant une apparition. Le moine tendit sa main pâle vers la pierre qui scintillait près du manteau d'or de la Vierge, mais ne la toucha pas.

— Ce joyau fabuleux, d'où le tenez-vous ?

— Il appartenait à mon défunt époux, le Grand Argentier de Bourgogne.

— Vous êtes veuve ?

— Je ne l'étais plus. Mais l'homme que j'avais épousé, frappé de la lèpre, est parti au tombeau de Saint- Jacques implorer sa guérison et moi aussi je veux partir là-bas pour le retrouver.

Avez-vous pris rang parmi les pèlerins ? Il vous faut un billet de confession et être agréée par les chefs des errants de Dieu. Ils partent demain.

— Je sais... Mais je viens seulement d'arriver. Pensez-vous, mon père, qu'il soit trop tard ? fit Catherine avec une soudaine crainte.