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Le camp d'Apchier est établi entre les murs de la ville et les ruines du Puy de l'Arbre. Comment pouvez-vous être certain de ne pas attirer l'attention des assaillants lorsque vous arriverez à la surface ? Rien que le bruit des pioches doit pouvoir s'entendre...

— Non. Nous sommes trop bas pour être entendus. Quant à la surface, nous n'irons pas jusque-là : ce serait trop long et trop dangereux. À la hauteur de la sixième marche de l'escalier s'ouvre un couloir rocheux. Le ruisseau qui alimente le puits l'a creusé jadis et il coule encore au fond, mais on peut le suivre et remonter ainsi jusqu'à une grotte bien cachée où le ruisseau surgit des profondeurs de la terre. Vous sortirez par cette grotte, hors de vue de l'e

— Oui, Père, j'ai compris... et je ne vous remercierai jamais assez, ajouta-t-elle en lui dédiant un sourire bien proche des larmes. De mon côté, je ne vous décevrai pas : je réussirai à vous ramener le salut.

Eh ! Je le sais bien ! Rentrons, maintenant. Il est temps de songer à vous reposer. Vous aurez besoin de vos forces...

Sans plus parler, ils refirent en sens inverse le chemin parcouru. La dalle du déambulatoire se rouvrit comme par enchantement sous la main du prêtre et se referma sans faire le moindre bruit.

Le soleil, qui inondait le cloître et faisait briller les schistes gris des toits, leur sauta au visage comme un chien familier en même temps que les rumeurs de la cité.

Catherine, comme l'abbé, marchait les yeux baissés, les mains au fond de ses larges manches, songeant à cet étrange monde souterrain qu'elle venait de découvrir et qui lui montrait le chemin de la liberté.

Elle revoyait la chapelle, étrange et dérisoire, veuve d'une immense et mystérieuse présence qu'elle ne parvenait pas à définir, mais qu'elle aimait et redoutait à la fois, grâce à cette sensibilité extrême, presque médiumnique, qui était en elle.

Le secret de l'abbé l'obsédait et, comme tous deux revenaient dans la cour d'entrée, elle releva brusquement les yeux vers lui.

— Quand pourrai-je partir, mon Père ? Cette nuit ?

— Mieux vaudrait dans la nuit de demain. Il faut que Frère Anthime puisse achever son ouvrage et reco

— Toute une nuit et tout un jour à attendre encore ? Père, souvenez-vous que Go

Je sais, mais nous ne pouvons nous permettre un échec. Si l'e

— Père ! s'écria-t-elle tout de suite alarmée.

Mais il l'apaisa d'un sourire tranquille.

— Allons ! Je n'ai pas dit que c'était certain, mais que c'était possible ! Nous sommes tous dans la main de Dieu, Dame Catherine, et vous y serez encore lorsque vous aurez quitté cette ville. Autant et peut-être plus que nous, vous aurez besoin de son secours. Mon histoire vous rendra le courage plus facile car vous comprendrez alors que le Seigneur ne peut se détourner complètement d'une terre qui fut ainsi bénie ! À vous revoir, ma fille... En attendant, faites vos préparatifs, mais n'avertissez perso

Aussitôt, elle protesta :

— Mais cela aura l'air d'une fuite ! La moindre des choses n'est-elle pas que je réunisse le Conseil et le mette au courant ?

— Ce ne serait pas la moindre, mais bien la dernière chose à faire.

N'oubliez pas qu'Augustin Fabre a été averti de ce qui se tramait pour prendre Gervais. Celui qui a parlé l'a fait par sottise ou par amitié, je ne sais... mais nous ne pouvons douter qu'il n'appartie





Nous ne pouvons prendre ce risque. Et... rassurez-vous : lorsque j'aurai parlé, perso

— Bien sûr ! Mais ce ne sera pas facile. Je les aime...

— Aimez-les, ils le méritent, mais beaucoup sont comme des enfants dont le cerveau est plein de lumière, d'une lumière qui vacille parfois. Il faut les aimer sans faiblesse pour assurer leur bonheur et ne pas toujours leur dire pourquoi...

Des enfants ? Catherine n'eut même pas le temps d'apprécier cette idée à sa juste valeur, pas plus que d'en saluer l'auteur, car Josse Rallard leur arrivait dessus à la vitesse d'un boulet de canon, un Josse visible ment hors de lui, hirsute et les vêtements en désordre comme s'il sortait d'une échauffourée.

— Où étiez-vous passée, bon Dieu ! criait-il. Voilà une éternité que je vous cherche ! Il se passe des choses terribles...

— Quoi encore ? L'e

— S'il n'y avait que ça ! Oui... Bérault d'Apchier lance une nouvelle vague d'assaut et nous la soutenons. Mais ceux qui ne sont pas à la défense des remparts se lancent à l'attaque de votre donjon...

chez vous... au château !...

— Le donjon ? s'exclama l'abbé. Mais pourquoi ? Que veulent-ils

?

La grande bouche de Josse remonta jusqu'à ses oreilles en une affreuse grimace qui n'était rien d'autre qu'un sourire amer.

— Pas difficile à deviner : la peau de Gervais ! Ils braillent que c'est un scandale qu'il ne soit pas encore pendu. Martin les mène... et ils y vont au bélier.

Catherine et l'abbé entendirent à peine les derniers mots. Ils couraient déjà vers le château d'où partaient des cris de mort rythmés par les « bang ! » du bélier frappant sur l'épaisse porte armée de fer.

Mais bientôt Catherine, plus faible, fut distancée et, prise d'un point de côté, dut accepter le bras de Josse qui venait derrière eux.

Cependant, l'abbé Bernard courait comme si tous les diables de l'enfer étaient à ses trousses...

Mais, en fait, c'était bien vers une espèce d'enfer qu'il se précipitait ainsi, car une foule tumultueuse, hurlante et glapissante battait les murs neufs du donjon, comme une grande marée. Sans ralentir sa course, l'abbé s'engouffra sous la poterne et, quand Catherine et Josse débouchèrent à leur tour dans l'enceinte seigneuriale, il avait déjà percé la cohue et, les bras en croix dans un geste de défense, il interposait sa robe noire et son corps maigre entre le lourd vantail et le bélier que retenaient à peine huit paires de bras musculeux et qui, porté par la fureur d'une foule aveugle, pouvait l'écraser d'une seconde à l'autre.

La voix hargneuse de Martin Cairou domina le tumulte.

— Ôtez-vous de là, l'abbé ! Ça ne vous regarde pas !

— Ton âme me regarde, Martin, car tu es en train de la mettre en danger. Que veux-tu faire ?

— Justice ! Elle n'a que trop tardé ! Nous voulons pendre Gervais le malfaisant ! Ôtez-vous de là, vous dis-je, ou nous continuons à taper...

Avec l'aide vigoureuse de Josse qui lui frayait un passage sans douceur dans la foule excitée, Catherine parvint à rejoindre l'abbé. Un rapide coup d'œil lui montra que le danger était réel : profitant de l'assaut, Martin avait recruté ses troupes parmi deux catégories d'individus : d'une part les plus brutaux des valets de ferme, gardiens de bestiaux ou tueurs de boucherie ; et d'autre part des paresseux, comme il en traîne toujours dans toutes les villes et tous les cabarets du monde, et celui de Montsalvy en possédait son contingent, tout comme un autre.