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Nikolaï Vassilievitch Gogol

Tarass Boulba

Traduit du russe par Louis Viardot

PRÉFACE

La nouvelle intitulée Tarass Boulba, la plus considérable du recueil de Gogol, est un petit roman historique où il a décrit les mœurs des anciens Cosaques Zaporogues. Une note préliminaire nous semble à peu près indispensable pour les lecteurs étrangers à la Russie.

Nous ne voulons pas, toutefois, rechercher si le savant géographe Ma

Une des branches ou tribus de la nation cosaque, et la plus belliqueuse, celle des Zaporogues, paraît, pour la première fois, dans les a

Leur principal établissement, appelé la setch, avait d’habitude pour siège une île du Dniepr. C’était un assemblage de grandes cabanes en bois et en terre, entourées d’un glacis, qui pouvait aussi bien se nommer un camp qu’un village. Chaque cabane (leur nombre n’a jamais dépassé quatre cents) pouvait contenir quarante ou cinquante Cosaques. En été, pendant les travaux de la campagne, il restait peu de monde à la setch; mais en hiver, elle devait être constamment gardée par quatre mille hommes. Le reste se dispersait dans les villages voisins, ou se creusait, aux environs, des habitations souterraines, appelées zimovniki (de zima, hiver).

La setch était divisée en trente-huit quartiers ou kouréni (de kourit, fumer; le mot kourèn correspond à celui du foyer). Chaque Cosaque habitant la setch était tenu de vivre dans son kourèn; chaque kourèn, désigné par un nom particulier qu’il tirait habituellement de celui de son chef primitif, élisait un ataman (koure

Les kouréni assemblés choisissaient le chef supérieur, le kochévoï-ataman (de kosch, en tatar camp, ou de kotchévat, en russe camper). On verra dans la nouvelle de Gogol comment se faisait l’élection du kochévoï. La rada, ou assemblée nationale, qui se tenait toujours après dîner, avait lieu deux fois par an, à jours fixes, le 24 juin, jour de la fête de saint Jean-Baptiste, et le 1er octobre, jour de la présentation de la Vierge, patro

Le trait le plus saillant, et particulièrement distinctif de cette confrérie militaire, c’était le célibat imposé à tous ses membres pendant leur réunion. Aucune femme n’était admise dans la setch.

Préface à l’édition de la Librairie Hachette et Cie, 1882.

CHAPITRE I

– Voyons, tourne-toi. Dieu, que tu es drôle! Qu'est-ce que cette robe de prêtre? Est-ce que vous êtes tous ainsi fagotés à votre académie?

Voilà par quelles paroles le vieux Boulba accueillait ses deux fils qui venaient de terminer leurs études au séminaire de Kiew [1], et qui rentraient en ce moment au foyer paternel.

Ses fils venaient de descendre de cheval. C'étaient deux robustes jeunes hommes, qui avaient encore le regard en dessous, comme il convient à des séminaristes récemment sortis des bancs de l'école. Leurs visages, pleins de force et de santé, commençaient à se couvrir d'un premier duvet que n'avait jamais fauché le rasoir. L'accueil de leur père les avait fort troublés; ils restaient immobiles, les yeux fixés à terre.

– Attendez, attendez; laissez que je vous examine bien à mon aise. Dieu! que vous avez de longues robes! dit-il en les tournant et retournant en tous sens. Diables de robes! je crois qu'on n'en a pas encore vu de pareilles dans le monde. Allons, que l'un de vous essaye un peu de courir: je verrai s'il ne se laissera pas tomber le nez par terre, en s'embarrassant dans les plis.

– Père, ne te moque pas de nous, dit enfin l'aîné.

– Voyez un peu le beau sire! et pourquoi donc ne me moquerais-je pas de vous?

– Mais, parce que… quoique tu sois mon père, j'en jure Dieu, si tu continues de rire, je te rosserai.

– Quoi! fils de chien, ton père! dit Tarass Boulba en reculant de quelques pas avec éto

– Oui, même mon père; quand je suis offensé, je ne regarde à rien, ni à qui que ce soit.

– De quelle manière veux-tu donc te battre avec moi, est-ce à coups de poing?

– La manière m'est fort égale.

– Va pour les coups de poing, répondit Tarass Boulba en retroussant ses manches. Je vais voir quel homme tu fais à coups de poing.

Et voilà que père et fils, au lieu de s'embrasser après une longue absence, commencent à se lancer de vigoureux horions dans les côtes, le dos, la poitrine, tantôt reculant, tantôt attaquant.