Добавить в цитаты Настройки чтения

Страница 2 из 75

L'influence de cet homme était immense parce qu'elle était secrète.

Joyeuse, en le voyant couper ainsi dans ses développements de stratégie et détourner l'attention du duc, Joyeuse se retira en arrière, interrompant tout net le fil de son discours.

François avait l'air de ne pas écouter, mais il écoutait réellement; aussi cette impatience de Joyeuse ne lui échappa-t-elle point, et, sur-le-champ:

– Monsieur l'amiral, dit-il, qu'avez-vous?

– Rien, monseigneur; j'attends seulement que Votre Altesse ait le loisir de m'écouter.

– Mais j'écoute, monsieur de Joyeuse, j'écoute, répondit allègrement le duc. Ah! vous autres Parisiens, vous me croyez donc bien épaissi par la guerre de Flandre, que vous pensez que je ne puis écouter deux perso

– Monseigneur, répondit Joyeuse en lançant au pauvre musicien un coup d'œil sous lequel celui-ci plia avec son humilité ordinaire, je ne suis pas un chanteur pour avoir besoin que l'on m'accompagne quand je parle.

– Bon, bon, duc; taisez-vous, Aurilly.

Aurilly s'inclina.

– Donc, continua François, vous n'approuvez pas mon coup de main sur Anvers, monsieur de Joyeuse?

– Non, monseigneur.

– J'ai adopté ce plan en conseil, cependant.

– Aussi, monseigneur, n'est-ce qu'avec une grande réserve que je prends la parole, après tant d'expérimentés capitaines.

Et Joyeuse, en homme de cour, salua autour de lui.

Plusieurs voix s'élevèrent pour affirmer au grand amiral que son avis était le leur.

D'autres, sans parler, firent des signes d'assentiment.

– Comte de Saint-Aignan, dit le prince à l'un de ses plus braves colonels, vous n'êtes pas de l'avis de M. de Joyeuse, vous?

– Si fait, monseigneur, répondit M. de Saint-Aignan.

– Ah! c'est que, comme vous faisiez la grimace…

Chacun se mit à rire. Joyeuse pâlit, le comte rougit.

– Si M. le comte de Saint-Aignan, dit Joyeuse, a l'habitude de do

– Monsieur de Joyeuse, repartit vivement Saint-Aignan, Son Altesse a eu tort de me reprocher une infirmité contractée à son service; j'ai, à la prise de Cateau-Cambrésis, reçu un coup de pique dans la tête, et, depuis ce temps j'ai des contractions nerveuses, ce qui occasio

– Non, monsieur, dit Joyeuse en lui tendant la main, c'est un reproche que vous faites, et vous avez raison.

Le sang monta au visage du duc François.

– Et à qui ce reproche? dit-il.





– Mais, à moi, probablement, monseigneur.

– Pourquoi Saint-Aignan vous ferait-il un reproche, monsieur de Joyeuse, à vous qu'il ne co

– Parce que j'ai pu croire un instant que M. de Saint-Aignan aimait assez peu Votre Altesse pour lui do

– Mais enfin, s'écria le prince, il faut que ma position se dessine dans le pays. Je suis duc de Brabant et comte de Flandre de nom. Il faut que je le sois aussi de fait. Ce Taciturne, qui se cache je ne sais où, m'a parlé d'une royauté. Où est-elle, cette royauté? dans Anvers. Où est-il, lui! dans Anvers aussi, probablement. Eh bien! il faut prendre Anvers, et, Anvers pris, nous saurons à quoi nous en tenir.

– Eh! monseigneur, vous le savez déjà, sur mon âme, ou vous seriez en vérité moins bon politique qu'on ne le dit. Qui vous a do

– Quoi! vous supposez que je puisse être battu par des marchands de laine, par des buveurs de bière?

– Ces marchands de laine, ces buveurs de bière ont do

– Ainsi, vous craignez un échec?

– Oui, monseigneur, je le crains.

– Vous ne serez donc pas là, monsieur de Joyeuse?

– Pourquoi donc n'y serais-je point?

– Parce que je m'éto

– Monseigneur, je ne doute pas de mon courage; monseigneur, je serai au premier rang, mais je serai battu au premier rang, tandis que d'autres le seront au dernier, voilà tout.

– Mais enfin votre raiso

– J'approuve que vous preniez ce qui ne se défend point.

– Eh bien! après avoir pris les petites places qui ne se défendaient pas, comme vous dites, je ne reculerai point devant la grande parce qu'elle se défend, ou plutôt parce qu'elle menace de se défendre.

– Et Votre Altesse a tort: mieux vaut reculer sur un terrain sûr que de trébucher dans un fossé en continuant de marcher en avant.

– Soit, je trébucherai, mais je ne reculerai pas.

– Votre Altesse fera ici comme elle voudra, dit Joyeuse en s'inclinant, et nous, de notre côté, nous ferons comme voudra Votre Altesse; nous sommes ici pour lui obéir.

– Ce n'est pas répondre, duc.

– C'est cependant la seule réponse que je puisse faire à Votre Altesse.

– Voyons, prouvez-moi que j'ai tort; je ne demande pas mieux que de me rendre à votre avis.