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«Poète sans initiative», dit de lui le brave marquis, et oubliant que ce n'est pas des Français qu'il parle, il ajoute: «Les Russes sont généralement incapables de comprendre nettement quelque chose de profond et de philosophique». Peut-on après cela s'éto

Franchement, il a raison, par rapport à ce monde qu'il avait choisi pour centre de son action, et qu'il nomme lui-même si excellement le monde des façades. Sans doute, c'est sa faute s'il n'a voulu rien voir derrière ces façades, et l'on aurait quelque droit de lui en faire reproche, car il répète cent fois dans son livre que l'avenir de la Russie est grand; que plus il apprend à co

Nous serions donc autorisés, en raison même de ces présages, à exiger de lui une étude un peu plus approfondie de ce Peuple; néanmoins nous devons avouer que s'il a négligé les deux tiers de la vie russe, il en a compris très bien le dernier tiers et l'а dépeint de main de maître en beaucoup d'endroits. Quoiqu'en dise l'autocratie de la cour de Pétersbourg, encore faut-il qu'elle accorde que le portrait est frappant dans ses traits principaux.

Custine sentait lui-même qu'il n'avait étudié que la Russie gouvernementale, la Russie de Pétersbourg. Il prend comme épigraphe le passage de la Bible: «Tel <qu'est> le prince de la ville, tels sont aussi les citoyens». Mais ces paroles ne convie

Rien ne saurait être plus opposé au brillant et léger marquis de Custine, que le flegmatique agronome westphalien, baron de Haxthausen, conservateur, érudit de vieille souche et l'observateur le plus bienveillant du monde. Haxthausen vint en Russie dans un but qui n'y avait amené encore perso

Cette découverte le frappa tellement qu'il vint en Russie pour y examiner de près les communes rurales. Haxthausen, instruit dès son enfance que toute puissance vient de Dieu, habitué dès ses plus jeunes ans à vénérer tous les gouvernements, Haxthausen ayant conservé les idées politiques du temps de Puffendorf et de Hugo Grotius, ne pouvait se défendre d'admirer la cour de Pétersbourg. Il se sentait écrasé par cette puissance qui a six cent mille soldats pour sa défense et neuf mille verstes de terrain pour ses ba

Cette a



Je partage entièrement l'opinion de Haxthausen; mais je crois qu'en Russie la commune rurale n'est pas tout non plus. Haxthausen a vraiment saisi le principe vivifiant du Peuple russe; mais, dans sa prévention native pour tout ce qui est patriarcal et, sans aucun talent de critique, il n'a pas vu, que c'est précisément le côté négatif de la vie communale qui a provoqué la réaction de Pétersbourg. S'il n'y avait pas eu complète absorption de la perso

Il me semble qu'il y a dans la vie russe quelque chose de plus élevé que la commune et de plus fort que le pouvoir; ce quleque chose est difficile à exprimer par des mots, et plus difficile encore à indiquer du doigt. Je parle de cette force intime n'ayant pas entièrement conscience d'elle-même, qui tenait si merveilleusement le Peuple russe sous le joug des hordes mongoles et de la bureaucratie allemande, sous le knout oriental d'un Tartare et sous la verge occidentale d'un caporal; je parle de cette force intime, à l'aide de laquelle s'est conservée la physionomie ouverte et belle et la vive intelligence du paysan russe, malgré la discipline avilissante du servage, et qui, au commandement impérial de se civiliser, a répondu, après un siècle, par la colossale apparition d'un Pouchkin; je parle de cette force, enfin, et de cette confiance en soi qui s'agite dans notre poitrine. Cette force, en dehors de tous les accidents extérieurs et malgré eux, a conservé le Peuple russe et protégé cette foi inébranlable qu'il a en lui-même: à quelle fin?.. C'est ce que le temps nous apprendra.

«Communes rurales russes et république, villages slaves et institutions sociales». Ces mots, ainsi accouplés, réso

La commune rurale russe subsiste de temps immémorial, et les formes s'en retrouvent assez semblables chez toutes les tribus slaves. Là, ou elle n'existe pas, c'est qu'elle a succombé sous l'influence germanique. Chez les Serbes, les Bulgares et les Monténégrins, elle s'est conservée plus pure encore qu'en Russie. La commune rurale représente pour ainsi dire l'unité sociale, une perso

Son principe économique est l'antithèse parfaite de la célèbre proposition de Malthus: elle laisse chacun sans exception prendre place à sa table. La terre appartient à la commune et non à ses membres en particulier; à ceux-ci appartient le droit inviolable d'avoir autant de terre que chaque autre membre en possède au dedans de la même commune; cette terre lui est do

Il arrive fréquemment, que des vieillards très âgés rendent leur terre et acquièrent par là le droit de ne point payer d'impôts. Un paysan, qui quitte pour quelque temps sa commune, ne perd pas pour cela ses droits sur la terre; ce n'est que par l'exil qu'on peut la lui retirer, et la commune ne peut prendre part à une décision de cette sorte que par un vote unanime; elle n'a cependant recours à ce moyen que dans les cas extrêmes. Enfin, un paysan perd aussi ce droit dans le cas où, sur sa demande, il est affranchi de l'union communale. Il est alors autorisé seulement à prendre avec lui son bien mobilier, rarement lui permet-on de disposer de sa maison ou de la transporter. De cette sorte, le prolétariat rural est chose impossible.