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Et c ’est moi qui eu osé renouveller la même dispute! Que me sont donc les Grands de la terre, auxquels je n’envie rien, pas même le sort d’être vanté dans tout l’ univers. Pardon, Madame, je suis prêt à expier ma faute par toutes sortes de sacrifices que vous aurez la bonté de m’imposer. Combien de fois, après m’être séparé de Mr. Kouschi

Ces vers, je me les suis grav é dans la mémoire, comme le précepte de ma conduite à l’avenir. Tandis que je faisais ces reflexions, la brise s’élevait, les vagues venaient en écumant se briser aux bords de ma nacelle, un pauvre rameur maussade comme on nous représente Caron, travaillait de toute la force de ses bras nerveux. Faut-il vous dire la vérité, Madame? Il m’est arrivé mainte et mainte fois de désirer que le vent par son souffle violent ou bien les vagues par leurs chocs m’eussent arraché de mon embarcation et plongé dans fin fond de la Neva: tant j’étais mécontent de moi-même. Ce n’est pas que je ne fusse puni, en expiation de mon crime, ayant gagné un gros rhume et quel-ques petites attaques de rhumatisme par-ci par-là, mais je l’ai bien mérité.

Pour Dieu, Madame, ne revenons plus sur le chapitre des Grands de la terre: c ’est une bien triste matière pour moi: je les estime quand ils sont bons, je les plaigne quand ils sont méchants. Voilà ma profession de foi sui leur compte.

J ’ai une toute autre sur le Vôtre, Madame! Vous êtes ma divinité! Je n’ose plus vous dire que je vous aime d’amour, mais il m’est permis, il m’est doux de répéter que je vous adore, que je vous déifie: je tiens beaucoup à cela.

J ’ai encore un aveu à vous faire. Madame: j’ai fait des tentatives pour pacifier mon pauvre cœur, pour apaiser le feu qui le dévore; mais, hélas! ne le fait pas qui veut. Encore une fois: je m’étourdie sur ma future destinée, je cours droit au précipice la tête la première, je n’ose plus vous le dire et je m’en ressens davantage.

Combien l ’homme est faible et versatile dans ses projets: je vous ai promis d’être gai dans mes lettres et je suis tout au plus neutre: quan d est-ce que je me corrigerai?

Souffrez, du moins, Madame, que je continue toujours de me nommer

Vous l ’avez prononcé, Madame! vous m’avez rendu le droit de vous con-ter mes peines, de vous parler de mon amour? Hélas, ce droit est le seul qui me soit réservé: je n’ai, pour toute réalité que mes tourments et la liberté de gémir. D’autres, plus heureux que moi, respirent la douce haleine de la rose; je n’en recueille que les épines. Oh! pourquoi ne puis-je répandre mon âme sur ce papier? pourquoi ne puis-je pas écrire avec le sang de mon cœur: ces caract ères seraient brûlants, ils vous auraient embrasés des mêmes feux dont ce pauvre cœur est consumé!

Croiriez-vous, Madame, qu ’il m’arrive souvent d’être plus heureux, seul et loin de vous, qu’en votre présence? Je vais vous expliquer cette énigme: vot-re image est toujours avec moi: tout mon être intellectuel en est rempli:

Voil à la peinture la plus vraie de ce qui passe dans mon cœur, dans mon imagination, enfin dans tout mon individu. Que je suis fâché que ce ne soit pas moi-même qui ait fait ces vers! ils expriment si bien ce que j’éprouve et que je sens… Hé bien, Madame, ajoutez à cela le doux souvenir de ce que j’ai entendu, de ce que j’ai vu, et ces mots de bonté, ces mots de consolation qui flattaient de temps en temps mon oreille. «Вот милая попинька! Où est mon Oreste? Jouez, mon ange!» — Croyez-vous que je les oublierai? Ja sais bien comme je viens de le dire, que c’étaient seulement des mots de bonté, des mots de consolation, des expressions presque banales, mais je vous le répète, et je le répéterai toujours: mon cœur aime à se tromper, il est tout à ces illusions… Aussi la réalité est trop dure pour lui… je vois bien que j’ai cessé même d’être l’objet de votre indulgence: quelquefois je suis là, près de vous, et vous avez l’air de ne pas vous en apercevoir[333]. Oh! c’est l’unique occasion où je fais des reproches amères à la nature, à la providence de ne m’avoir pas comblé de leurs dons.

Pourquoi en effet ne m ’ont-elles pas do



Et en quoi suis-je fautif? J ’a toujours été si respectueux, si soumis devant vous, Madame (en même temps que j’ai vu un jeune homme se permettre de vous faire les réprimandes un peu dures en présence de tout le monde: voilà à qui peut vous compromettre et prêter au scandale…)

Veuillez bien, Madame, me pardo

Ce n ’est donc que mon talent d’écrire que vous voyez dans mes lettres, Madame. L’éloge que vous en avez fait hier n’était qu’une satire contre mon coeur: aussi vous avez pu remarquer mon embarras et mes sottes réponses à vos aimables compliments: j’étais pétrifié, anéanti. Ah, Madame! si par pitié seulement vous m’eussiez dit: tu as un coeur, tu sais aimer, je le vois; ces expressions ne peuvent partir que d’un cœur aimant, elles ne sont point enve-loppées dans une froide recherche des mots et dans le fade jargon d’un amant trouvé dans mille romans. C’aurait été plus flatteur pour moi que toutes les lo-uanges pompeuses des toutes les académies du monde. Mais ici je vois que Madame a voulu seulement plaisanter sur mon amour et tourner en ridicule mon pauvre cœur: quelle récompense!.. Vous avez beau faire. Madame! je vous aimerai toujours: ni vos rigueurs, ni vos plaisanteries n’étoufferont jamais une passion qui va chaque jour croissant, qui fait mes peines, qui f’ait mes délices, et qui enfin n’expirera qu’avec le dernier souffle de ma vie.

Qu ’il est pénible, le moment fatal où l’on voit tomber le bandeau rose qui couvrait nos yeux, laissant apercevoir, dans le lointain, un demi-bonheur et des demi-jouissances! Qu’il est pénible, dis-je, cet état où le cœur se voit détrompé! Voici précisément l’état où je me trouve, Madame! Les espérances se sont toutes envolées: un vide affreux que rien ne remplit, règne à présent dans mon cœur… Autrefois il s’ouvrait à la douce amitié, depuis quelque temps il a osé palpiter pour l’amour…

Eh bien, Madame! l ’amour l’ayant trompé et le désir même de l’amitié. Vous, Madame, vous ne le croyez pas, j’ai vu par tout ce que vous m’avez dit que vous n’en croyez rien; ou du moins, si vous condescendez à le croire, ce sentiment ne fait qu’effleurer votre cœur sans y laisser aucune trace, tandis qu’il se grave dans le mien à de traits de feu, à de traits ineffaçables.

Hier j ’ai osé encore me disputer avec vous, et vous, ange de bonté, vous excusez cet excès de folie? Je vous prie, Madame, de me faire la grâce d’impo-ser à l’avenir silence à cette langue hardie qui devient alors comme antipode de mon cœur. Quelques fortes que puissent être mes raisons, il suffit que vous me disiez: C’est mon opinion! et vous verrez que je rentrerai aussitôt dans mon caract ère, dans celui d’un amant humble et soumis, comme je le suis toujours et comme je veux toujours l’être pour

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Tandis que je vous vois si affectueuse envers les autres, si ing énieuse à leur procurer des occasions de pouvoir vous dire leurs sentiments, si prompte à aller les chercher vous-même. Et je suis là, et je reste seul, absorbé dans mes tristes pensées… (Вписано на полях.)