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Que s’était-il passé derrière lui ? le moyen de le savoir sans mettre la puce à l’oreille de qui que ce soit ? La consigne qui s’imposait au caporal Vinson : motus bouche cousue. Et Juve ?

Fandor regrettait évidemment de ne pouvoir rassurer Juve.

Le reporter imaginait Juve sachant que son ami Fandor devait partir en vacances, allant se renseigner à la compagnie des Wagons-Lits. On lui dirait certainement que, le dimanche soir, 21 novembre, une place de sleeping avait été occupée par M. Fandor. Juve, de la sorte, croirait son ami en villégiature et ne s’inquiéterait plus de son sort.

— Tout va bien, s’écria Fandor, il ne me reste plus désormais qu’à prendre mon rôle au sérieux… et à le jouer avec bo

Le train siffla, ralentit. On entrait en gare de Verdun.

Fandor laissa descendre la foule des militaires et quelques rares civils.

Ayant soigneusement réajusté sa capote, arrangé les franges de ses épaulettes, et rendu à son képi une forme convenable, le caporal gagna la sortie.

Il se trouva sur un vaste terre-plein, hors de la gare, pataugeant dans la boue. Il aperçut, enveloppé d’un grand capuchon, l’ho

L’agent considéra le caporal d’un air curieux, et Fandor, qui n’était pas autrement rassuré sur les conséquences de son équipée, crut opportun de s’assurer les bo

Il ignorait en faits quels étaient les rapports officiels de l’armée et de la police.

À tout hasard, il décida d’être aimable.

— Pardon, excuse, fit-il en roulant les « r », pour s’essayer à contrefaire le campagnard – Fandor avait une âme de cabotin à certaines heures, et toujours celle d’un ironiste, – pardon, excuse, monsieur l’agent, vous pourriez pas m’dire où c’qu’est le 257 ede ligne ?

— Qu’est-ce que vous lui voulez ? interrogea le gardien de la paix.

— J’vas vous expliquer, m’sieu l’agent. Censément que j’étais au 213 een garnison à Châlons. Pour lors, voilà huit jours qu’on m’a mis en permission et que l’on m’a signifié mon changement de corps, autrement dit que j’étais affecté au 257 e.

Le gardien de la paix se gratta le menton, parut interroger sa mémoire, puis, après réflexion, objecta :

— C’est que le 257 ede ligne se trouve dans trois endroits : au bastion 14, à la caserne Saint-Benoit et au Fort-Vieux… Où c’est-y que vous vous rendez, caporal ?

Fandor n’avait pas prévu cette question.

— J’n’ai pas de préférence, murmura-t-il, en prenant une attitude imbécile, je ne sais point !…

Les deux hommes restaient immobiles. Fandor sentait qu’un fou rire le gagnait.

Mais soudain l’agent eut une idée.

— Voyons voir votre feuille de route ?…

Et Fandor s’étant exécuté, le brave gardien de la paix poussait une exclamation triomphale.

— Ça y est, j’ai trouvé, c’est écrit sur le papier, vous êtes désigné pour rallier la caserne Saint-Benoît. Mon vieux, c’est d’la veine, elle est à cinquante mètres d’ici, descendez la route, et à gauche vous verrez le mur de la caserne. L’entrée est au milieu…

Fandor, déjà accoutumé à son nouveau rôle, salua, s’enfonça à grands pas dans l’obscurité.

Il parvint quelques instants après devant la grille du quartier Saint-Benoît.

— Le 257 e ? demanda-t-il au factio

— C’est ici, répondit l’homme qui montait une garde mélancolique. Allez voir le poste.

À l’entrée de Fandor le gradé se dressa en maugréant. C’était le sergent :

— Qu’est-ce que vous voulez ?

Très militairement, Fandor articula :

— Caporal Vinson, arrive de Châlons, permutant du 213 e…

— Ah ! parfaitement, murmura le sous-officier, j’vois ce que c’est… Attendez…

Tout en s’étirant, le chef de poste allait au fond de la pièce, leva le gaz mis en veilleuse et ouvrant un cahier, en tourna lentement les pages, les mouillant du doigt pour ne point en passer :

— Caporal Vinson ?… caporal Vinson ?… âno

Soudain il s’arrêta, appela :

— Planton !…

Un homme se présentait :

— Conduisez le caporal Vinson au bâtiment A, deuxième étage… Vous êtes affecté à la troisième du deux.





***

— Vous voilà arrivé, caporal, a

Il lui désigna du doigt une vaste salle au fond d’un couloir.

La diane so

Déjà le planton s’était éclipsé et Fandor demeurait sur le pas de la porte de la chambre, n’osant pénétrer.

C’était désormais le plus dur de son rôle qui lui restait à jouer, Vinson l’avait mis en garde contre les mystères de la chambrée et ses traditions.

— Vraisemblablement, avait-il dit à Fandor, lorsque vous arriverez pour vous installer, vous ne trouverez rien du tout. Votre lit aura disparu. Or, en votre qualité de cabot, vous avez droit à un bas-flanc. Il faut l’exiger en « gueulant », les hommes feront d’abord semblant de ne pas comprendre, mais insistez de toutes vos forces, prenez d’autorité les premiers objets dont vous aurez besoin, à droite et à gauche, autour de vous, finalement votre installation se fera…

— Hum ! s’était dit Fandor, je ne me vois pas très bien…

Fandor entra dans la chambrée.

***

Il faut croire que le faux caporal Vinson avait bien suivi les recommandations du vrai, car Fandor n’était pas arrivé depuis dix minutes que les hommes s’empressaient dans tous les sens, se bousculant, affairés, allant et venant, demandant à tous les échos :

— Ous’qu’est sa paillasse ? retrouve-moi le polochon du caporal.

13 – JUVE SE DÉGUISE

Tandis que Jérôme Fandor faisait, ce lundi 21 novembre, son apprentissage de militaire à Verdun, un passant élégant et d’allure distinguée qui descendait la rue Solferino et se dirigeait vers la Seine était hélé par un mendiant.

— Pstt !… avait fait le loqueteux…

Mais le passant ne s’était pas retourné.

— Monsieur, appela l’homme.

Comme l’élégant promeneur ne semblait pas s’apercevoir qu’on le suivait, l’homme, se rapprochant soudainement de lui, murmura dans sa barbe blanche, mais assez haut pour être entendu :

— Mon lieutenant, écoutez… Monsieur de Loubersac…

À ces derniers mots, impatienté, presque furieux, le jeune homme élégant se retourna, et considéra son interlocuteur.

L’officier se trouvait en présence de Vagualame.

— Je vous colle vingt-cinq louis d’amende, avez-vous perdu la tête pour m’interpeller dans la rue ? êtes-vous devenu fou ?…

— J’ai besoin de vous voir et de vous parler, dit le mendiant.

— Demain ?

— Non, tout de suite, c’est urgent !…

— Qu’avez-vous donc ?

— Un refroidissement… Il faut absolument que nous causions.

Le lieutenant de Loubersac regardait autour de lui, non sans une certaine anxiété. Comme s’il devinait la pensée de l’officier, Vagualame désigna du doigt le petit escalier raide, qui conduisait aux berges de la Seine :

— Descendons au bord de l’eau, dit-il, nous serons tranquilles…

L’officier acquiesça.

Perso

Tandis que l’officier allait le premier, Vagualame eut dans le regard un éclair de joie. Quiconque l’aurait regardé de près aurait vu que cet œil perçant, vif, n’était pas l’œil aux regards obliques qui caractérisait habituellement la physionomie de Vagualame…

C’est qu’en effet, le Vagualame qui venait de racoler sur le trottoir le lieutenant de Loubersac n’était pas le vrai Vagualame, mais le policier Juve.

Le très subtil inspecteur, au lendemain de la fameuse soirée qu’il avait passée dans l’appartement de Jérôme Fandor, allant de surprise en surprise, avait découvert que Vagualame, agent du Deuxième Bureau, était un perso