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— Exactement ! Si quelqu’un en est capable, c’est l’homme qui a su reconstituer le Pectoral…

— Ne rêvez pas ! Vous savez parfaitement quel fil conducteur solide j’ai eu en Simon Aronov qui étudiait la question depuis longtemps mais Simon n’est plus et jamais il n’a fait la moindre allusion à vos émeraudes…

La figure, déjà passablement sombre du rabbin, vira carrément aux couleurs de l’orage :

— Peut-être parce qu’il les possédait. J’ai entendu dire qu’il pouvait lire l’avenir…

C’était là une vérité. Morosini n’avait pas oublié les terribles prédictions du Boiteux touchant ce qu’il appelait l’Ordre Noir dont il a

— Je crois, fit-il avec gravité, qu’il n’avait pas besoin d’une aide quelconque, fût-ce l’héritage d’Élie, pour projeter sur l’avenir un regard clairvoyant. Mais, dites-moi, comment se fait-il que vous n’ayez pas fait allusion à ces pierres lors de la remise du Pectoral ? Vous n’auriez pas l’idée de faire cavalier seul, par hasard ?

— Notre Grand Rabbin est un vieillard sage dont les pensées se tournent plus volontiers vers le Très Haut que vers la Terre. Le retour du Joyau Sacré l’emplit d’une joie profonde et il se contente d’attendre que la Promesse se réalise et qu’Israël redevie

— Perso

— Vous refusez ?

— Positivement ! Je suis un homme d’affaires, monsieur le rabbin, et je n’ai pas de temps à consacrer à des recherches pour le moins fumeuses puisque, en dehors de Massada qui n’est plus qu’une ruine désertique, vous n’avez aucune piste à m’indiquer. Je ne sais même pas à quoi ressemblent ces pierres et vous n’en savez sûrement pas plus que moi…

— Détrompez-vous ! En voici une reproduction à l’échelle, dit Goldberg en tirant de sa lévite un carton sur lequel un véritable artiste avait reproduit à l’aquarelle ce qui, pour Morosini, représentait l’inimaginable : deux prismes d’émeraude parfaitement semblables, deux heptaèdres réguliers de trois centimètres de hauteur sur un de large, d’un vert profond et lumineux dans la transparence desquels apparaissaient deux inclusions, l’une semblable à un minuscule soleil, l’autre à un mince croissant de lune. Jamais l’expert en joyaux co

— Incroyable ! apprécia-t-il. Je n’aurais jamais cru que les flancs du Djebel Sikaït où furent découvertes les premières émeraudes vers l’an 2000 avant Jésus-Christ puissent recéler ce miracle !

— Vous avez dit le mot qui convient : miracle ! Elles ne vie

— Ce qui veut dire ?

— Que le Grand Rabbin de Palestine est le successeur naturel du Grand Prêtre d’autrefois et qu’un jour je serai appelé à cette haute fonction… Les « sorts sacrés » me permettront d’entendre la voix du Très-Haut… Voilà pourquoi il me les faut !

— Ne rêvez pas et songez plutôt que, si ces pierres ne sont pas enterrées quelque part depuis la nuit des temps, elles ont du parcourir un chemin impossible à retracer, qu’elles ont sans doute été séparées, retaillées…

Il n’ajouta pas « en admettant qu’elles aient jamais existé en dehors d’une légende et que leur image ne soit pas seulement le fruit d’un artiste poète », mais ses doutes se heurtèrent à une obstination pleine de certitude :

— Non. Yaveh ne l’aurait pas permis. Je sais qu’elles vivent toujours, quelque part, et que leur splendeur est intacte ! Le contraire serait impensable !

— C’est ce qu’on appelle la foi du charbo





— Ne dites pas de sottises ! to

— Écoutez, monsieur le rabbin, fit Morosini qui commençait à sentir la moutarde lui monter au nez, tout ce que je peux vous promettre, si d’aventure je trouvais une piste, c’est de la suivre mais ôtez-vous de la tête l’idée que je vais m’y consacrer tout entier. À présent, si vous voulez bien m’apprendre comment on sort d’ici, je voudrais rentrer à l’hôtel. J’ai froid aux pieds, figurez-vous !

Il s’attendait à une réaction de colère, d’indignation, d’obstination, à des prières peut-être mais rien de tout cela ne se produisit. Le rabbin se contenta de regarder sa montre et de sourire :

— Vous pourriez changer d’avis. Ah, j’allais oublier une chose importante, puisque vous avez bien voulu me rappeler que l’argent compte pour vous…

— Pas pour vous ?

— Plus ou moins !… Le jour où vous me rapporterez l’Ourim et le Toummim, je vous les paierai un demi-million de dollars.

Bien qu’un peu surpris par l’importance de la somme, Morosini n’en montra rien et haussa des épaules désinvoltes :

— Vous m’offririez un million entier que cela ne changerait rien à ma décision. Si je rencontre vos pierres, je vous les rendrai contre le montant des frais éventuels – achat ou autres ! – mais sans plus !

— Autrement dit, vous ne vous do

— Vous comprenez à merveille : depuis trois ans le Pectoral a bouleversé ma vie et je tiens beaucoup à celle que j’ai en ce moment. Priez Dieu que la chance me sourie et, puisque vous êtes Son serviteur, il tournera peut-être ses grâces vers vous ? Nous rentrons ?

— Encore un instant, puisque vous évoquez le Très-Haut ! Savez-vous que c’est près de cette eau que votre Christ a guéri l’aveugle de naissance ?

— Oui, je le savais.

— J’espérais que le même miracle se reproduirait car vous êtes aveugle, prince, aveugle en ce qui concerne les graves conséquences de votre refus touchant l’avenir de ce pays déchiré et le vôtre.

— C’est une menace ? gronda Morosini hautain.

— Une simple mise en garde. Que vous le vouliez ou non, votre quête récente vous a lié aux pierres sacrées que gardait le temple de Salomon. Vous êtes devenu leur serviteur et ce service-là ne se rompt pas si facilement.

— C’est ce que nous verrons. Me voilà bien payé de mes peines !… et je vous rappelle que j’ai toujours froid aux pieds.

— Réfléchissez encore… et veuillez me suivre !

Même sans le détour souterrain dont l’utilité était apparue à Morosini aussi peu convaincante que possible, le retour vers le King David ne se fit pas en cinq minutes. Franchies les ruines davidie