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— Je crois que vous pouvez leur accorder votre confiance, Tania ! Je prendrai de vos nouvelles demain…

Un judicieux mélange de civilisations orientale et occidentale faisait un lieu magique de la grande salle où l’on allait dîner. Nappes et serviettes étaient de brocart orange tissé d’or supportant l’apparat des chandeliers d’or massif où brûlaient de longues bougies ambrées, de cristaux gravé d’or, d’un admirable service de table exécuté spécialement à Sèvres dans les couleurs assorties à d’éto

— Je possède des trésors que j’aimerais vous montrer et dont certaines pièces n’ont jamais vu l’Europe. Naturellement, je serais particulièrement honoré si la princesse Morosini me faisait la grâce de vous accompagner. J’ai beaucoup entendu vanter son charme et son éclat…

Par qui, mon Dieu, mais après tout cela n’avait rien d’extraordinaire lorsque l’on co

— Il a même épousé coup sur coup une Espagnole et une Italie

Il n’était donc pas tellement éto

Tandis que l’ambassadeur d’Angleterre reprenait le dé de la conversation après une solide rasade de porto, Aldo, rendu à lui-même pour un instant caressa l’idée d’une seconde lune de miel dans les Indes fabuleuses. Si Lisa consentait à confier les jumeaux à leur arrière-grand-mère pour une dizaine de semaines, ce pourrait être magique. Perdu dans ses pensées, il laissait son regard glisser sur la salle somptueuse occupée seulement par les hommes et soudain il reprit contact avec la réalité, posa le verre dont il dégustait le contenu et se livra à un examen attentif de ceux qui se trouvaient là. Or, nulle part il ne vit José d’Agalar.

Quand on sortit de table, il rejoignit Adalbert tout joyeux lui aussi à l’idée de l’accompagner aux Indes et mit un frein à son enthousiasme :

— Tu as raison, le voyage va être formidable mais quelque chose me tracasse : as-tu vu le grand d’Espagne ?

— Ma foi non… Pourtant il est entré avant nous dans la salle à manger et il prétendait mourir de faim. Comment se serait-il volatilisé ?

— D’autant plus qu’il n’y a aucune raison. Mais on peut toujours essayer de savoir…

Retournant dans la vaste pièce où les serviteurs s’affairaient à remettre de l’ordre, Morosini alla trouver celui qui dirigeait la manœuvre en priant le Bon Dieu qu’il parle au moins anglais :

— Je cherche le marquis d’Agalar, lui dit-il dans cette langue. Sauriez-vous me dire à quelle table il était placé ?

L’hindou s’inclina et partit chercher des cartons où les tables étaient dessinées avec les noms de leurs occupants, les parcourut des yeux puis montra à Aldo celui qui l’intéressait. Celui-ci remercia et rejoignit Adalbert :

— Il était à la table présidée par le maharadjah d’Alwar. Comment se fait-il que je ne l’aie pas aperçu ? D’où j’étais il devait se trouver dans mon champ de vision…

Une voix onctueuse teintée d’accent oriental se fit lors entendre :





— Feriez-vous allusion à ce… perso

Jay Singh Kashwalla, maharadjah d’Alwar en perso

— Si Votre Altesse le dit, ce doit être vrai. Cependant le marquis d’Agalar qui est un grand d’Espagne devrait savoir comment se comporter lorsque l’on a l’ho

— Grand d’Espagne ? Fttt !… Qu’est cela ? fit Alwar avec un geste méprisant de sa main gantée et bosselée de rubis gros comme des œufs de caille. Ce n’est qu’un marquis. Vous, vous êtes prince, m’a-t-on dit ? Un grand d’Italie, je suppose ?

— De Venise ! Très honoré de l’attention qu’un souverain étranger veut bien me porter !

— Votre réputation est grande dans le monde des pierres précieuses et vous pouvez constater que je les aime aussi. Viendriez-vous en parler avec moi… en privé ?

— Il est à craindre que Votre Altesse n’en sache plus que moi sur ce sujet.

— Ne le croyez pas ! Venez plutôt déjeuner demain ! Nous comparerons nos sciences. J’habite le Claridge. Voulez-vous treize heures ?

Impossible d’échapper, quelque envie qu’il en eût, à une invitation aussi formelle. Morosini s’inclina :

— Ce sera un ho

— Alors do

Le maharadjah tournait déjà les talons après un salut léger.

— Seigneur ! gémit Aldo en le regardant rejoindre leur hôte. Il ne me manquait plus que ça !

— Allons donc ! ironisa Adalbert. Tu as vu sa poitrine ? Il n’y a pas un joaillier au monde dont la vitrine puisse lutter avec elle. Tu vas nager dans les pierres précieuses, mon bonhomme !

— Sans doute, mais j’aimerais mieux nager avec quelqu’un d’autre parce que cette altesse-là ne me plaît pas. Surtout si j’y ajoute ce que tu m’as confié au sujet de ses relations avec Youssoupoff !

— Je n’ai dit que ce que l’on m’a raconté. Il ne s’agit peut-être que d’un simple potin…

— Auquel tu as cru. Cela me suffit.

— Pour refuser d’y aller ? Il ne va tout de même pas te violer entre la poire et le fromage ? Tu as une demi-tête de plus que lui, fit Adalbert en riant.

— J’ai accepté : j’irai. Seulement j’essaierai de faire en sorte qu’il n’y ait pas de seconde fois…

Le lendemain, habillé avec une élégance tout officielle – redingote noire, gilet gris, col à coins cassés et cravate-plastron en épaisse soie grise piquée d’une sardoine gravée à ses armes –, Aldo embarquait dans la Rolls argentée du maharadjah qui, en quelques silencieuses minutes, le conduisit à l’hôtel Claridge.