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Le chevalier accueillit courtoisement, comme il le devait, son cousin Richardet qu’il aimait comme un frère. Roger fut aussi le bienvenu par égard pour lui. Cependant Aldigier ne vint pas à leur rencontre avec l’air joyeux qui lui était habituel. Son visage, au contraire, était triste, car il avait reçu le jour même une nouvelle qui l’avait fort affligé.

Au lieu de salut, il aborda ainsi Richardet: «Frère, nous avons une nouvelle qui n’est pas bo

» Depuis le jour où Ferragus les a faits priso

» J’en ai immédiatement avisé notre Renaud par un courrier que j’ai fait partir à francs étriers, mais je ne crois pas qu’il puisse arriver à temps, car il a trop de chemin à faire. Je n’ai pas avec moi assez de gens pour tenter une sortie. Mon envie est grande de les secourir, mais je ne puis rien. Cependant une fois que le traître les aura en son pouvoir, il les fera mourir. De sorte que je ne sais que faire et que dire.»

La fâcheuse nouvelle déplut fort à Richardet, et, par cela même, contraria vivement Roger. Les voyant tous deux se taire et ne prendre aucun parti, il leur dit avec feu: «Soyez tranquilles; je prends sur moi toute cette entreprise. Mon bras ira, a travers mille épées, rendre la liberté à vos frères.

» Je ne veux le concours ni l’aide de perso

L’autre l’écoutait, mais comme on écoute quelqu’un qui parle beaucoup sans savoir de quoi il parle. Mais Richardet, le prenant à part, lui raconta comment il avait été sauvé du bûcher par lui, et lui certifia qu’il ferait, en temps et lieu, beaucoup plus que ce dont il se vantait. Aldigier lui prêta alors une plus grande attention, et lui prodigua les marques du plus grand respect et de la plus grande estime.

Puis, à sa table, où régnait l’abondance la plus copieuse, il lui do

La nouvelle du siège qu’avait à soutenir Agramant, nouvelle qu’il avait apprise le jour même, lui tenait au cœur. Il voyait bien que le moindre retard apporté à voler à son secours était pour lui un désho

En tout autre temps, on aurait pu facilement croire que la vraie religion l’a seule touché. Mais maintenant qu’Agramant assiégé a plus que jamais besoin de son aide, chacun croira plutôt qu’il a cédé à la crainte, à une coupable lâcheté, qu’à l’entraînement d’une croyance meilleure. Voilà ce qui agite et tourmente le cœur de Roger.

D’un autre côté il souffrait à l’idée de s’éloigner sans la permission de sa reine. Ces deux pensées contraires le plongeaient tour à tour dans le doute et l’incertitude. Il avait d’abord espéré revoir Bradamante au château de Fleur-d’Épine, où ils devaient aller ensemble, comme je l’ai dit plus haut, pour secourir Richardet.

Puis il se souvint qu’elle lui avait promis de se retrouver avec lui à Vallombreuse. Il se dit que si elle y était allée, elle avait dû s’éto

Après avoir combiné divers projets, il pense que le mieux est de lui écrire tout ce qui lui était arrivé, et bien qu’il ne sache pas comment il pourra lui faire parvenir sa lettre, il ne veut pas tarder davantage. Peut-être trouvera-t-il sur son chemin quelque message fidèle. Sans plus de retard, il saute hors du lit, et se fait apporter du papier, de l’encre, des plumes et de la lumière.

Les camériers discrets et prévenants do

Il poursuit en disant qu’en cette circonstance et en présence d’un appel si pressant, elle verra elle-même quel blâme énorme il encourrait, s’il refusait l’aide qu’on lui demande; que devant être son mari, il devait se garder de toute tache, car il ne fallait pas qu’elle, si pure en tout, fût souillée par la moindre faute.

Si jamais il s’est efforcé d’acquérir, par ses œuvres, un nom illustre, et si, après l’avoir gagné, il en est fier, il doit chercher à le conserver intact. C’est ce qu’il fait en ce moment. Il est avare de la pureté de ce nom, puisqu’il doit le partager avec elle. Elle sera sa femme, et leurs deux corps ne devront avoir qu’une âme.

Aussi, ce qu’il lui avait déjà dit de vive voix, il le lui redisait encore par cette lettre: lorsque, l’heure sera venue où il sera dégagé de sa foi envers son roi, s’il n’est pas mort auparavant, il se fera chrétien de fait comme il l’est déjà d’intention. Puis il ira la demander pour femme à son père, à Renaud et à ses autres parents.

«Je désire – ajoutait-il – qu’il vous agrée que j’aille faire lever le siège autour de mon seigneur, afin que la foule ignorante se taise et n’ait pas le droit de dire: Pendant qu’Agramant fut puissant, Roger ne l’abando

» Quinze ou vingt jours, je pense, me suffiront pour dégager le camp des Sarrasins des e

Roger se répand en semblables propos que je ne saurais vous dire jusqu’au bout. Il en ajoute beaucoup d’autres, et ne termine sa lettre que lorsqu’il voit la feuille toute remplie. Puis il plie la lettre, la scelle et la met sur sa poitrine, dans l’espoir que le jour suivant il trouvera quelqu’un qui puisse la porter secrètement à sa dame.

La lettre close, il se jette de nouveau sur son lit où il peut enfin fermer les yeux et trouver quelque repos. Le sommeil vient en effet secouer sur son corps fatigué ses rameaux trempés dans l’eau du Léthé. Il repose jusqu’à ce que les nuages roses et blancs vie