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— Qu’est-ce que je dis là! D’ailleurs, je répète constamment la faute des anciens qui n’entendaient rien aux lois de la psychophysiologie et de l’hérédité. Je voudrais toujours voir chez les autres ma mentalité et mes sentiments.
— Evda, fit Ren Boz sans approuver le repentir de son interlocuteur, suivra l’envol comme tous les habitants de la planète.
Le physicien montra les trépieds des caméras de réception blanche, infrarouge et ultraviolette, disposés en demi-cercle autour de l’astronef. Les différents groupes de rayons du spectre animaient d’une vie réelle l’image en couleurs de l’écran, de même que les diaphragmes harmoniques supprimaient la résonance métallique dans la transmission de la voix.
Dar Véter regarda en direction du nord, d’où venaient des électrobus automatiques lourdement chargés de voyageurs. Véda Kong sauta de la première voiture et courut en s’empê-trant dans l’herbe haute. Elle se jeta contre la robuste poitrine de Dar Véter, d’un élarj, si impétueux que ses longues tresses volèrent par-dessus les épaules de l’homme.
Il l’écarta doucement pour contempler le cher visage rénové par Ja coiffure inusitée.
— J’ai joué dans un film pour enfants une reine nordique des Siècles Sombres, et je n’ai eu que le temps de me changer, expliqua-t-elle, un peu essoufflée. Il était trop tard pour me recoiffer.
Dar Véter se la représenta en longue robe de brocart, la tête ceinte d’une couro
— Vous aviez une couro
— Oui, elle est comme ceci.
De son doigt, Véda traça dans J’air le contour d’un large bandeau à fleurons trèfles.
— Je la verrai?
— Aujourd’hui même. Je demanderai qu’ils te montrent le film.
Comme Dar Véter allait la questio
— Où sont donc les héros d’Achernard?
Ren Boz parcourut des yeux le terrain toujours désert autour de l’astronef.
— Là-bas! Véda indiqua une pyramide en plaques de verre laiteux, couleur pistache, à châssis argentés: la grande salle du cosmoport.
— Allons-y.
— Nous serions de trop, dit Véda d’une voix ferme. Ils regardent le salut d’adieu de la Terre. Allons vers le Cygne.
Les hommes obéirent.
Véda qui marchait à côté de Dar Véter lui demanda tout bas:
— Elle ne me ridiculise pas trop, cette coiffure à l’antique? Je pourrais…
— Non, non. Le contraste avec la robe moderne est très joli, les tresses sont plus longues que la jupe. Laisse-les!
— J’obéis, mon Véter! chuchota-t-elle, et ses paroles magiques firent palpiter le cœur de l’homme et colorèrent ses joues pâles.
Une foule nombreuse se dirigeait sans hâte vers l’astronef. Les gens souriaient à Véda et la saluaient du geste, beaucoup plus souvent que Dar Véter ou Ren Boz.
— Vous êtes populaire, Véda, fit observer le physicien. Est-ce votre renommée d’historien ou votre beauté qui en est la cause?
— Ni l’une ni l’autre. Mon travail et mon activité sociale m’obligent à voir beaucoup de monde. Vous et Véter, vous êtes tantôt confinés dans les laboratoires, tantôt absorbés par un travail nocturne qui vous isole. Votre œuvre est bien plus considérable et plus marquante que la mie
— Encore un reproche à notre civilisation technique? riposta gaiement Dar Véter.
— Pas à la nôtre, mais à la survivance des erreurs fatales du passé. II y a vingt millénaires, nos ancêtres des cavernes savaient déjà que l’art et l’éducation sentimentale qui s’y rapporte ne comptent pas moins pour la société que la science.
— En ce qui concerne les rapports entre les hommes? s’informa le physicien intéressé.
— C’est cela.
— Un sage de l’antiquité a dit que le plus difficile sur terre est de conserver la joie! intervint Dar Véter. Tenez, voici un autre allié fidèle de Véda!
Mven Mas arrivait de son pas dégagé, attirant l’attention générale par sa haute taille et son teint foncé.
— Tchara a fini de danser, conclut Véda. L’équipage du Cygne ne tardera pas.
— A leur place, je viendrais à pied, le plus lentement possible, dit soudain Dar Véter.
Véda lui prit le bras.
— Vous vous énervez.
— Bien sûr. Il m’est pénible de penser qu’ils s’en vont pour toujours et que je ne reverrai plus l’astronef. Quelque chose en moi proteste contre ce sacrifice, peut-être parce qu’il m’enlève des amis!
— Je ne crois pas, déclara Mven Mas dont l’oreille fine avait capté à distance les propos de Dar Véter. C’est la protestation naturelle de l’homme contre l’implacabilité du temps.
— Tristesse d’automne? railla doucement Ren Boz en souriant des yeux à son camarade.
— Avez-vous remarqué que l’automne mélancolique des latitudes tempérées plaît surtout aux hommes actifs, optimistes et très sensibles? répliqua Mven Mas en tapotant l’épaule du physicien.
— C’est très juste! s’exclama Véda. — Et c’est co
— Dar Véter, êtes-vous sur le terrain? Dar Véter, êtes-vous sur le terrain? rugit une voix quelque part en haut et à gauche. Junius Ante vous appelle au vidéophone du bâtiment central. Junius Ante vous appelle! Au vidéophone du bâtiment central…
Ren Boz tressaillit et se redressa.
— Puis-je vous accompagner, Dar Véter?
— Allez-y à ma place. Vous pouvez manquer l’envol. Junius Ante, fidèle aux traditions, préfère la vision directe à l’enregistrement. Il ressemble sous ce rapport à Mven Mas…
Le cosmoport possédait un puissant vidéophone et un écran hémisphérique. Ren Boz entra dans la pièce ronde silencieuse. L’employé de service tourna le commutateur et montra l’écran latéral de droite, où était apparu Junius Ante, la mine bouleversée. Celui-ci dévisagea le physicien et, comprenant la cause de l’absence de Dar Véter, salua Ren Boz de la tête.
— Moi aussi, j’aurais voulu voir l’envol. Mais c’est l’heure de la réception empirique hors programme, qui se fait dans la direction habituelle et au diapason 62/77. Levez l’ento