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Pierre. – Joli aussi!… Répondez, vous, Jacques Serpent.

Troisième Musicien. – Ma foi, je ne sais que dire.

Pierre. – Oh! j'implore votre pardon: vous êtes le chanteur de la bande. Eh bien, je vais répondre pour vous. La musique a le son argentin, parce que les gaillards de votre espèce font rarement so

Premier Musicien. – Voilà un fieffé coquin!

Deuxième Musicien. – Qu'il aille se faire pendre!… Sortons, nous autres! attendons le convoi, et nous resterons à dîner (Ils sortent.)

ACTE V

SCÈNE PREMIÈRE

Roméo. – Si je puis me fier aux flatteuses assurances du sommeil, mes rêves m'a

Entre Balthazar chaussé de bottes.

Roméo. – Des nouvelles de Vérone!… Eh bien, Balthazar, est-ce que tu ne m'apportes pas de lettre du moine? Comment va ma dame? Mon père est-il bien? Comment va madame Juliette? Je te répète cette question-là; car si ma Juliette est heureuse, il n'existe pas de malheur.

Balthazar. – Elle est heureuse, il n'existe donc pas de malheur. Son corps repose dans le tombeau des Capulets, et son âme immortelle vit avec les anges. Je l'ai vu déposer dans le caveau de sa famille, et j'ai pris aussitôt la poste pour vous l'a

Roméo. – Est-ce ainsi? eh bien, astres, je vous défie!… (À Balthazar) Tu sais où je loge: procure-moi de l'encre et du papier, et loue des chevaux de poste: je pars d'ici ce soir.

Balthazar. – Je vous en conjure, monsieur, ayez de la patience. Votre pâleur, votre air hagard a

Roméo. – Bah! tu te trompes!… Laisse-moi et fais ce que je te dis: est-ce que tu n'as pas de lettre du moine pour moi?

Balthazar. – Non, mon bon seigneur.

Roméo. – N'importe: va-t'en, et loue des chevaux; je te rejoins sur-le-champ. (Sort Balthazar) Oui, Juliette, je dormirai près de toi cette nuit. Cherchons le moyen… Ô destruction! comme tu t'offres vite à la pensée des hommes désespérés! Je me souviens d'un apothicaire qui demeure aux environs; récemment encore je le remarquais sous sa guenille, occupé, le sourcil froncé, à cueillir des simples; il avait la mine amaigrie; l'âpre misère l'avait usé jusqu'aux os. Dans sa pauvre échoppe étaient accrochés une tortue, un alligator empaillé et des peaux de poissons monstrueux; sur ses planches, une chétive collection de boîtes vides, des pots de terre verdâtres, des vessies et des graines moisies, des restes de ficelle et de vieux pains de roses étaient épars çà et là pour faire étalage. Frappé de cette pénurie, je me dis à moi-même: Si un homme avait besoin de poison, bien que la vente en soit punie de mort à Mantoue, voici un pauvre gueux qui lui en vendrait. Oh! je pressentais alors mon besoin présent; il faut que ce besogneux m'en vende… Autant qu'il m'en souvient, ce doit être ici sa demeure; comme c'est fête aujourd'hui, la boutique du misérable est fermée… Holà! l'apothicaire!



Une porte s'ouvre. Paraît l'apothicaire.

L’apothicaire. – Qui donc appelle si fort?

Roméo. – Viens ici, l'ami… Je vois que tu es pauvre; tiens, voici quarante ducats; do

L’apothicaire. – J'ai de ces poisons meurtriers. Mais la loi de Mantoue, c'est la mort pour qui les débite.

Roméo. – Quoi! tu es dans ce dénuement et dans cette misère, et tu as peur de mourir! La famine est sur tes joues; le besoin et la souffrance agonisent dans ton regard; le dégoût et la misère pendent à tes épaules. Le monde ne t'est point ami, ni la loi du monde; le monde n'a pas fait sa loi pour t'enrichir; viole-la donc, cesse d'être pauvre et prend ceci. (Il lui montre sa bourse.)

L’apothicaire. – Ma pauvreté consent, mais non ma volonté.

Roméo. – Je paye ta pauvreté, et non ta volonté.

L’apothicaire. – Mettez ceci dans le liquide que vous voudrez, et avalez; eussiez-vous la force de vingt hommes, vous serez expédié immédiatement.

Roméo, lui jetant sa bourse. – Voici ton or; ce poison est plus funeste à l'âme des hommes, il commet plus de meurtres dans cet odieux monde que ces pauvres mixtures que tu n'as pas le droit de vendre. C'est moi qui te vends du poison; tu ne m'en as pas vendu. Adieu, achète de quoi manger et engraisse. (Serrant la fiole que l'apothicaire lui a remise.) Ceci, du poison? non! Viens, cordial, viens avec moi au tombeau de Juliette; c'est là que tu dois me servir (Ils se séparent.)

SCÈNE II

Jean. – Saint franciscain! mon frère, holà!

Laurence. – Ce doit être la voix de frère Jean. De Mantoue. Sois le bienvenu. Que dit Roméo?… A-t-il écrit? Alors do

Jean. – J'étais allé à la recherche d'un frère déchaussé de notre ordre, qui devait m'accompagner et je l'avais trouvé ici dans la cité en train de visiter les malades; mais les inspecteurs de la ville, nous ayant rencontrés tous deux dans une maison qu'ils soupço

Laurence. – Qui donc a porté ma lettre à Roméo?

Jean. – La voici. Je n'ai pas pu t'envoyer, ni me procurer un messager pour te la rapporter tant la contagion effrayait tout le monde.

Laurence. – Malheureux événement! Par notre confrérie ce n'était pas une lettre insignifiante, c'était un message d'une haute importance, et ce retard peut produire de grands malheurs. Frère Jean, va me chercher un levier de fer, et apporte le-moi sur-le-champ dans ma cellule.